C’est un tour de vis contre les fraudeurs : le Conseil de Paris a voté jeudi à l’unanimité de nouvelles mesures pour encadrer la location de meublés touristiques dans la capitale. A Montmartre, certains habitants alertent sur les conséquences locales du succès de plateformes comme Airbnb.
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Sur la place des Abbesses, l’une des places les plus fréquentées de Montmartre, on entend toutes les langues parlées dans les allées du marché de Noël. On voit aussi régulièrement passer des touristes, qui gravissent plus ou moins facilement les rues pavées de la colline avec leurs valises à roulettes.
“Avec le développement de plateformes comme Airbnb, Montmartre risque de devenir une simple carte postale, un musée», estime Pierre, qui habite le quartier depuis plus de 30 ans. “Il est - de réglementer ça, il faut dire stop», réagit-il, alors que la Mairie de Paris vient de renforcer son arsenal juridique contre les meublés de tourisme.
“J’ai la chance de vivre dans un immeuble de 15 appartements, avec 13 propriétaires présents dans leurs logements. Nous sommes donc très vigilants. Mais dans le Marais, cela a complètement tari l’offre locative. Il existe également un risque de nuisance pour les habitants, se retrouvant avec une bande de fêtards à côté de chez eux. En bon égoïste, je ne veux pas qu’il se passe la même chose à Montmartre», sourit le Parisien.
“Ici il y a toutes les nationalités, il explique. Il y a du tourisme haut de gamme, on commence à avoir beaucoup de boutiques un peu ‘chic’, de macarons par exemple. En tant qu’habitant du quartier, c’est horrible mais ce n’est pas grave. Il y a aussi de nombreuses familles, venant de différents pays. Et enfin le tourisme religieux avec le Sacré-Cœur, c’est une particularité. Et ce n’est pas trop massif, les guides sont souvent accompagnés de 10 à 15 personnes. Autre spécificité : les touristes sont là toute l’année, pas seulement à Noël ou à Pâques.“
“Il est bon de légiférer face au phénomène, juge Dominique, un autre résident. C’est vraiment devenu un business. Voilà pour un soulagement temporaire, je peux en voir les avantages. Mais du fait que ce type de location soit institutionnalisé, je trouve que cela nuit à la vie des gens, localement. Il y a des prix qui augmentent, des gens qui cherchent à louer et qui ne trouvent rien. Et même au-delà de l’aspect financier : humainement, politiquement, cela fait du mal.“
Nathan est le propriétaire. “Je suis dans une position confortable. Pour les personnes qui cherchent un logement, je comprends que c’est compliqué, Airbnb ferme les portes et rend le quartier un peu élitiste. Il faut que cela soit réglementé, qu’il y ait un cadre. Je ne constate pas d’inflation des loyers mais c’est un peu plus compliqué de chercher un appartement, il y a moins de biens à louer sur le long terme. J’imagine que c’est aussi lié à la crise des taux d’intérêt», estime-t-il.
Mais Le Parisien défend aussi la logique de la location de meublés de tourisme : «Je n’ai jamais loué mon bien via ce type de plateforme mais c’est le cas de pas mal d’amis, qui paient leurs vacances ainsi. Selon la superficie de l’appartement, il se loue entre 150 et 300 euros la nuit.“
Au-delà de l’immobilier, Montmartre risque-t-elle de perdre de son charme face au tourisme et au poids des plateformes comme Airbnb ? “De ce côté de la colline, à proximité de la place des Abbesses et de Pigalle, se trouvent davantage de commerces touristiques. Mais au-delà de ça, l’esprit village est préservé avec des commerces de proximité. L’afflux touristique de masse est concentré, avec un parcours jusqu’au Sacré-Cœur et autour de la Place du Tertre», répond-il.
Du côté de la mairie de Paris, Jacques Baudrier (PCF), l’adjoint chargé du logement, met en avant l’adoption de mesures «beaucoup plus efficace« . A compter du 1er janvier 2025, la mairie va abaisser le plafond de location de la résidence principale de 120 à 90 jours, suite à une loi votée le 19 novembre à l’Assemblée nationale, qui donne de nouveaux outils aux communes face à l’explosion des meublés de tourisme.
“Il y a un avant et un après, on a enfin un vrai arsenal après 10 ans de combatsrejoices Jacques Baudrier. Il existe environ 25 000 meublés touristiques loués illégalement à Paris, principalement via Airbnb. Et cela représente un milliard d’euros de revenus par an dans la capitale, qui est la première destination touristique mondiale. Ce sont souvent des multipropriétaires qui possèdent 5, 10 ou 15 logements, et qui les louent à l’année.“
La loi transpartisane adoptée en novembre fait évoluer notamment la jurisprudence »omniprésent“sur les règles de preuve du changement d’usage d’habitation, résume le député.”Cette évolution nous permettra de gagner 10 fois plus de procès, même si tout dépend du nombre d’audiences dont nous disposons, commente-t-il. Que fera gagner du - à nos avocats. Il y a aussi le doublement des amendes de 50 000 à 100 000 euros par logement. De quoi calmer les fraudeurs, c’est dissuasif.“
“Limiter la fréquence à laquelle les Parisiens peuvent louer leur résidence principale ne fera que pénaliser les familles qui comptent sur les revenus de la location de leur logement pour améliorer leur pouvoir d’achat.», répond Airbnb dans un communiqué. Clément Eurly, son PDG, estime sur franceinfo que «cela n’aura aucun impact positif sur le logement« . Il appelle à «réfléchir à un autre cadre réglementaire« verser »jelibérer un logement“dans la capitale et”permettre aux touristes et aux familles de profiter de Paris grâce à un tourisme abordable« .