«J.Il pense que Poutine est fou. Oui, vraiment, je suis sûr qu’il se prend aussi pour un fou. C’est vrai. Il adore tuer. C’est très dangereux pour tout le monde. » C’est dans cet état d’esprit que se trouvait Volodymyr Zelensky ce jeudi à Bruxelles, à la sortie d’un conclave avec les dirigeants européens. Il suffit de dire que le président ukrainien n’a pas fait de stratagèmes diplomatiques et a rejeté sans ambages toute initiative de cessez-le-feu qui n’était pas accompagnée de solides garanties de sécurité pour son pays. Un licenciement adressé directement à Viktor Orban, dont il juge l’attitude « trop chaleureuse » envers Vladimir Poutine. Le Premier ministre hongrois avait évoqué une sorte de trêve de Noël avec un échange de prisonniers.
L’idée d’un cessez-le-feu est principalement soutenue par Donald Trump aux Etats-Unis. Mais le président élu américain refuse d’intégrer l’Ukraine dans l’OTAN. Pour Kiev, la question est existentielle : comment s’assurer que la Russie ne profite pas d’une pause dans les combats pour reconstruire ses forces ? « Que va-t-il se passer dans deux mois, six mois, un an, deux ans ? » demande le président Zelensky, qui refuse de voir son pays devenir le théâtre d’une guerre intermittente.
Aucune négociation menacée
Pour lui, pas question de négocier sous la menace. Les diplomates allemands qui ont assisté à la récente conversation téléphonique entre le chancelier Olaf Scholz et Vladimir Poutine assurent que la rhétorique du Kremlin n’a pas changé. Pour Poutine, on parle toujours de « dénazification » et de « démilitarisation » de l’Ukraine. « Il ne semble pas chercher activement une solution », glisse-t-on à Berlin.
Le soutien occidental reste donc crucial. Sur le front énergétique, l’Ukraine a besoin de 19 systèmes de défense aérienne supplémentaires pour protéger ses infrastructures critiques. Le Canada et l’Allemagne (trois systèmes Patriot) ont promis leur aide, mais celle-ci reste insuffisante face à la menace russe qui cible méthodiquement les centrales électriques du pays.
Kyiv renonce au transit du gaz russe sur son territoire
Autre signal fort : Kiev refuse catégoriquement de prolonger le transit du gaz russe à travers son territoire, qui expire à la fin de l’année. Cela a été, au sein du Conseil européen, une source de tensions avec le Premier ministre slovaque, Robert Fico, très dépendant de ce gaz russe. « Nous ne permettrons pas que des milliards supplémentaires soient gagnés sur notre sang », coupe le président Zelensky, conscient que la dépendance énergétique est l’arme favorite du Kremlin. Un message direct à Robert Fico (la Slovaquie a cessé d’envoyer des armes à l’Ukraine). Le 16e Le paquet de sanctions, en préparation, pourrait porter sur l’énergie, mais avec les limites du vote unanime qui offre, dans ce domaine, un levier à la Hongrie et à la Slovaquie.
L’Ukraine observe également avec inquiétude l’arrivée de quelque 12 000 soldats nord-coréens dans la région russe de Koursk. Les services ukrainiens ont documenté des pratiques macabres : les visages des soldats nord-coréens tués sont brûlés pour éviter leur identification, tandis que des passeports russes sont retrouvés sur leurs corps. Une tactique qui n’est pas sans rappeler le traitement réservé aux mercenaires du groupe Wagner.
« Le président Trump est un homme fort »
Face à Donald Trump, dont l’investiture le 20 janvier sera peut-être un tournant, le président Zelensky joue la carte de la séduction. « Le président Trump est un homme fort. J’espère qu’il est de notre côté», dit-il, espérant convaincre le candidat républicain de la nécessité d’une position ferme face à Poutine.
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Le président ukrainien mise sur l’unité entre les États-Unis et l’Europe pour contrer la Russie. Il salue particulièrement l’initiative du président français Emmanuel Macron concernant un éventuel déploiement de forces occidentales, tout en précisant que cela ne peut être qu’un complément à l’objectif principal : une adhésion à l’Otan que Trump, pour l’instant, n’envisage pas.
Pour l’heure, l’Ukraine résiste face à plus de 600 000 soldats russes déployés sur son territoire. Les pertes russes cumulées sont estimées entre 700 000 et 800 000 hommes, selon Kiev. Mais pour Zelensky, le nombre de victimes importe peu à Poutine. C’est précisément cette indifférence à l’égard de la vie humaine qui rend le maître du Kremlin si dangereux aux yeux du président ukrainien.