la contraception et l’avortement ont-ils réellement libéré la sexualité ?

la contraception et l’avortement ont-ils réellement libéré la sexualité ?
la contraception et l’avortement ont-ils réellement libéré la sexualité ?

Alors que nous célébrons le 50ème anniversaire de la promulgation de la loi Veil sur la dépénalisation de l’avortement, il ne faut pas oublier la première loi Veil, promulguée en décembre 1974, sur la libéralisation de l’accès à l’avortement. contraception. « Même s’ils naissent de luttes distinctes, ils vont fondamentalement ensemble »rappelle Cécile Thomé, sociologue chargée de recherche au CNRS, auteur d’une enquête sur les conséquences de la contraception sur la sexualité hétérosexuelle.

« La contraception n’est pas infaillible et son usage doit reposer à la fois sur un accès facilité à l’avortement et sur la déstigmatisation de cette pratique »elle écrit dans Carrosseries disponibles (1).

Avant, la contraception reposait principalement sur les hommes

Ensemble, ces deux lois auraient abouti à un « libération »ou même un « révolution sexuelle ». Une thèse et des représentations que Cécile Thomé nuance. D’abord parce que les évolutions qui leur sont attribuées étaient déjà en cours.

Le travail de Cécile Thomé s’appuie sur dix années de recherches sociohistoriques.
© (Cover editions La Découverte)

« L’abaissement de l’âge du premier rapport sexuel n’a pas commencé dans les années 1970note le sociologue. La naissance de la jeunesse sexuelle est accentuée par l’arrivée de la pilule mais n’en est pas une conséquence. » Il en va de même pour l’augmentation du nombre de partenaires sexuels que les femmes ont au cours de leur vie.

Ensuite, parce qu’avant sa médicalisation, la contraception reposait majoritairement sur les hommes. « Brigitte, née au milieu des années 40, se souvient que son copain “a sauté du train en marche”comme on disait à l’époque “cite Cécile Thomé. À partir des années 70, elle devient plus féminine. Cela permet aux femmes d’échapper à la dépendance – “ils étaient plus ou moins à la merci de la bonne volonté de leur partenaire et de l’efficacité de son retrait” –, mais ils récupèrent la quasi-exclusivité du « travail contraceptif ». A eux de rechercher des informations fiables, de choisir leur contraception, de la gérer…

Cécile Thomé est sociologue et chargée de recherche au CNRS.
© (Photo La Découverte)

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Enfin, parce que la contraception « peut notamment contribuer à mettre le corps de la femme à disposition de son partenaire »explique le chercheur. Les femmes ne peuvent plus justifier leur refus d’un rapport sexuel par son caractère risqué. Le sociologue s’appuie sur le témoignage d’un certain Patrick C. qui disait, dans les années 70 : « Je me demande si ma femme oublie de prendre cette pilule juste pour m’énerver, pour que je ne puisse plus faire l’amour. »

Des injonctions, parfois contradictoires

Quand il s’agit de liberté sexuelle, « la contraception est donc une condition nécessaire mais pas suffisantesupports Cécile Thomé. Il n’abolit pas les inégalités entre les sexes ni la violence qui les accompagne. » Cela ne change pas non plus la centralité de la pénétration dans les relations hétérosexuelles, ni même ne la renforce. « On dit aux gens qu’il faut avoir une contraception pour faire l’amour, ce qui implique que faire l’amour équivaut à pratiquer la pénétration avec éjaculation. Le discours médical a naturalisé le fait que la pénétration est centrale. Même si ce n’est pas la pratique qui apporte le plus de plaisir aux femmes. Notons cependant qu’ils y restent très attachés, notamment parce qu’elle est considérée comme une pratique permettant la fusion. »

Surtout, insiste Cécile Thomé, « Si la contraception médicale permettait aux femmes de se débarrasser de la peur très invasive des grossesses non désirées, qui pesaient forcément sur leur désir et leur plaisir, cette rhétorique de libération […] implique qu’ils ont désormais une sexualité forcément plus épanouissante et invisible, d’où les contraintes qui continuent de peser sur eux. »

A ce titre, elle cite certaines injonctions liées au corps féminin – épilation, maquillage, régime… Elle ajoute que ce sont principalement les femmes qui mettent en place les conditions d’une « rituel d’amour conjugal ». Et glisse, sur les nouvelles représentations fondées sur l’égalité du plaisir : « Désormais, le plaisir des femmes est aussi la réussite des hommes. »

(1) “Available bodies – How contraception shapes heterosexual sexuality” by Cécile Thomé, La Découverte editions, 306 p., €23.

 
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