Les incendies historiques qui ravagent Los Angeles et ses environs ne sont qu’un avant-goût de ce à quoi les Américains seront confrontés à l’avenir alors que le changement climatique continue de s’intensifier. Portrait des Etats-Unis à l’heure du réchauffement climatique.
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Le monde entier subit déjà les conséquences du changement climatique, 2024 étant l’année la plus chaude jamais enregistrée. Pour la première fois, la température moyenne des deux dernières années a dépassé le fameux seuil de 1,5°C de réchauffement par rapport à l’ère préindustrielle, a récemment confirmé l’observatoire européen Copernicus.
Même s’il faudra attendre quelques années pour confirmer que la planète a atteint l’objectif le plus ambitieux de l’accord de Paris, « on voit déjà quels phénomènes extrêmes cela peut provoquer », souligne Philippe Gachon, professeur d’hydroclimatologie à l’UQAM et chercheur à le Centre d’étude et de simulation du climat à l’échelle régionale.
Il suffit de penser aux nombreux records de chaleur battus en Espagne, au Japon, en Australie et en Chine ou aux inondations majeures dans le désert du Sahara.
« Le réchauffement climatique prend des ampleurs plus importantes au niveau mondial et régional », précise l’expert en hydroclimatologie.
Les États-Unis subissent également les répercussions du changement climatique, dont la progression « a pris de court la plupart des scientifiques », souligne le professeur.
À Los Angeles, les incendies de forêt sont plus intenses en raison du réchauffement climatique. Les nombreuses tornades qui se produisent hors saison et les niveaux élevés de précipitations lors des tempêtes constituent un autre impact négatif du changement climatique, a-t-il déclaré.
Des côtes en danger
Les côtes est et ouest des États-Unis seront les premières touchées par la multiplication des catastrophes climatiques, selon le professeur.
Sur la côte Est, attendez-vous à voir des tempêtes tropicales et des ouragans plus puissants en raison de la hausse des températures des océans. Ces tempêtes sont menaçantes non seulement à cause de leurs vents, mais aussi à cause des inondations et des précipitations qu’elles génèrent, qui risquent de provoquer des inondations.
Côté Pacifique, les risques d’incendie seront « majeurs », indique Philippe Gachon.
Cette région est menacée, entre autres, par les renversements climatiques (coup de fouet météorologique) — ou la transition rapide de conditions humides à sèches —, dont la fréquence est exacerbée par le changement climatique, confirme récemment publié dans Nature.
C’est aussi l’un des facteurs qui expliquent l’ampleur des incendies qui ravagent Los Angeles : les fortes précipitations hivernales ont provoqué la croissance de la végétation, qui a ensuite séché à cause de la sécheresse estivale, créant ainsi des conditions idéales pour la propagation des incendies.
Le centre du pays ne sera pas non plus épargné. Bien qu’elles soient « extrêmement difficiles à prévoir », les tornades pourraient être encore plus intenses.
« Avec des températures plus élevées dans l’atmosphère, on voit plus d’énergie dans le système et cela donne automatiquement plus d’énergie à certains phénomènes, dont les tornades, qui sont particulièrement destructeurs. On a aussi vu des tornades se former cet hiver, en janvier, ce qui est exceptionnel », note le professeur.
Questions importantes
La multiplication des événements climatiques extrêmes promet de soulever plusieurs « enjeux majeurs », indique Philippe Gachon.
La première : l’assurabilité.
« Certains secteurs ne seront plus assurables ou les coûts deviendront prohibitifs », craint-il.
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Les citoyens des classes moyennes, voire inférieures, qui vivent dans des zones plus à risque, risquent de ne plus pouvoir y trouver de nouveau logement après une catastrophe, faute de moyens.
« Cela signifie qu’au sein même des États-Unis, nous pourrions assister à une migration de personnes socio-économiquement moins favorisées », illustre le professeur.
Les événements climatiques extrêmes vont également contraindre les États-Unis à revoir la façon dont ils aménagent le territoire, notamment les zones à risque d’inondations ou d’incendies de forêt.
La présidence Trump n’augure rien de bon
Le retour de Donald Trump à la Maison Blanche n’augure rien de bon pour la lutte contre le changement climatique.
Mais à quelques jours de l’investiture du Républicain, « la nature vient lui rappeler que [les changements climatiques sont] c’est bel et bien une réalité, et qu’elle prend de l’ampleur », souligne Philippe Gachon.
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L’urgence climatique exige des gouvernements et des Etats « un peu d’humilité, d’écoute et de collaboration », estime l’expert.
« Il faut revenir [aux objectifs] que nous nous étions tous fixés dans le cadre de l’Accord de Paris. Trouver une collaboration internationale pour réduire nos émissions et trouver des solutions, car elles existent. Il faut évidemment un peu de volonté politique pour pouvoir les mettre en place », ajoute-t-il.
« Nous devons trouver un moyen de tirer les leçons de l’expérience et d’examiner ce que nous faisons bien. Quand nous mettons en œuvre notre intelligence collective, nous sommes capables de réaliser ensemble de grandes choses », conclut Philippe Gachon.