Achetez des droits de pollution à Tesla pour éviter les amendes CO2 : c’est ce qui est prévu par le groupe Stellantis. Depuis le 1est Janvier, l’objectif de réduction des émissions de CO2 imposée par la réglementation européenne, la Corporate Average Fuel Economy (Cafe) se renforce. Un nouvel objectif a ainsi été donné aux constructeurs automobiles européens : réduire le taux moyen de CO2 émis par les véhicules vendus. En 2025, la limite est fixée à 81 g/km. Pour y parvenir, les constructeurs devront en vendre environ 25 % de véhicules électriques dans l’année.
Mais cette nouvelle législation ne plaît pas à tous les constructeurs automobiles européens qui peinent à produire et vendre des véhicules électriques. Renault, par exemple, n’en a vendu que 11,3 % en 2024.
Certains constructeurs comme Stellantis — et ses quatorze marques automobiles dont Message d’intérêt public — sont donc prêts à acheter des crédits d’émission CO2 à Tesla ou Volvo, pour éviter les amendes prévues par la Commission européenne. Un système regrettable, selon Pierre Leflaive, chargé de projet mobilité durable au Réseau Action Climat (CAR), puisqu’il permet aux constructeurs automobiles de ralentir leur politique de transition.
Reporterre — Comment Stellantis peut-il racheter les droits de pollution à Tesla ?
Pierre Leflaive — Constructeurs 100 Les % électriques sont soumis aux mêmes normes que les autres. Produire des véhicules non émetteurs CO2 à l’émission, ils sont ainsi considérés comme totalement « légumes verts » et en respectant la loi Café. En autorisant les constructeurs à s’associer, la Commission européenne introduit plus de flexibilité. Les entreprises qui risquent de ne pas atteindre les objectifs fixés achètent un droit à polluer à des acteurs plus vertueux, et évitent les lourdes amendes prévues par la réglementation européenne.
L’objectif est de récompenser les bons acteurs et de donner plus de latitude aux constructeurs qui risquent de ne pas atteindre ces objectifs. Le problème est que si nous continuons à assouplir les réglementations à mesure que l’échéance approche, elles perdront leur pouvoir incitatif.
Ce rachat des droits à polluer est-il à l’opposé de l’interdiction, en 2035, de la vente de véhicules thermiques neufs dans leUE ?
Les objectifs ont été fixés il y a longtemps. Si nous fixons un cadre réglementaire, mais prévoyons des solutions de repli, la crainte est que les constructeurs ne fassent pas la transition. Stellantis en est un exemple. Il y a deux mois, le groupe affirmait que tout allait bien et deux mois plus tard, il est prêt à racheter les droits à polluer. Le fabricant a-t-il menti ? Nous ne pouvons pas dire cela. Il semble toutefois prendre des précautions et alimenter un récit de crise pour obtenir la disparition des amendes et des aides d’État supplémentaires.
Les constructeurs automobiles sont capables de produire des voitures électriques. Si le secteur se porte mal aujourd’hui, c’est qu’il a commencé par produire des véhicules haut de gamme au détriment des volumes. Elle a ainsi perdu en compétitivité et la demande a chuté. Seule une petite partie de la population peut se permettre ces véhicules électriques. Si des modèles plus abordables avaient été lancés, la concurrence chinoise ne serait pas aussi inquiétante, les pertes d’emplois dans le secteur ne seraient pas les mêmes et les objectifs seraient facilement atteints.
Face aux protestations, Stellantis a confirmé que cela l’aiderait » atteindre [s]objectifs d’émissions [de CO2] vers 2025 “, et qu’il continuerait à se développer “ technologies innovantes et à faibles émissions « . Qu’en penses-tu ?
Disons-le clairement, tous les constructeurs ont aujourd’hui la capacité de respecter la réglementation Café pour 2025. C’est une question de priorité et de choix d’investissements. Stellantis admet ainsi ne pas vouloir investir entièrement dans l’électricité. Avec ces rachats de droits à polluer, le groupe pourra ralentir sa transition vers des véhicules électriques plus abordables et continuera de travailler sur des véhicules thermiques ou hybrides à marges élevées.
Toute cette politique alimente une transition à deux vitesses, dans laquelle les plus riches bénéficieront de tous les avantages des véhicules de demain. L’autre partie de la population sera aux prises avec des véhicules vieillissants, polluants et vulnérables à la hausse des prix des carburants. Nous sommes confrontés à un problème à la fois social et environnemental.
Selon vous, le rachat des droits à polluer peut-il continuer ? ?
Nous devrions être prudents et réglementer le système. Pour racheter les droits de polluer, les industriels devraient montrer leur crédibilité, en affichant clairement ce qu’ils ont fait pour atteindre leurs objectifs et pourquoi ils n’y sont pas parvenus. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas. Certains n’ont aucune envie d’évoluer vers une politique plus verte.
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