On dit que la foudre ne frappe jamais deux fois au même endroit. Le destin a décidé de s’en prendre à Nicolas Schils et à sa famille. Dimanche 22 décembre, après un épisode pluvieux important, l’homme de 38 ans surveille les infiltrations d’eau qui rongent la maison qu’il loue à Lacquy. « Ce jour-là, nous avons commencé à entendre des craquements. Cela ressemblait à des explosions dans la maison toutes les vingt ou trente minutes. Ce n’était pas régulier. » Il comprend que la structure de la maison est affectée.
En en faisant le tour, il découvre des fissures sur toutes les façades. « Là, je me suis dit, c’est grave, la maison va tomber. » Un linteau au-dessus d’une porte-fenêtre s’est effondré. Le père installe à la hâte des accessoires. Deux matchs très fébriles pour soutenir cette ancienne forge réhabilitée en maison d’habitation. « Les derniers travaux remontent à 2014, je pense qu’ils ont été réalisés à partir de morceaux », conclut le locataire.
« Vraiment peur »
« Un maçon et un menuisier sont passés. Ils ont constaté beaucoup de modifications au fil des années qui ne respectent pas l’équilibre de la maison. Par exemple, une porte-fenêtre a été créée sous une poutre porteuse de la charpente, ce qui fragilise l’ensemble, indique Nicolas Schils. Et à gauche, la maison semble s’enfoncer dans le terrain. »
À l’intérieur de la maison qu’ils occupent depuis 2021, des fissures craquent les murs. « La cloison de la chambre s’est abaissée d’un centimètre. La porte de la cuisine travaille si fort qu’elle s’ouvre toute seule. »
Nicolas Schils et sa compagne Cécile Martin ont alerté les propriétaires, leur assurance et le maire, mais les choses n’avancent pas assez vite. Le jour de Noël, le couple n’arrive plus à tenir. «Ça craquait tout le temps. Nous avions vraiment peur. » Persuadé que la maison va leur tomber sur la tête, Nicolas Schils passe sa matinée au téléphone pour trouver un hôtel. « J’ai laissé les enfants ouvrir leurs cadeaux et nous avons fait nos valises. »
Crise cardiaque, maladie et handicap
“Nous n’avons pas eu de chance ces derniers temps, donc nous n’allons pas forcer le sort”, poursuit-il. L’ancien bûcheron, victime d’un arbre « faiseur de veuves » il y a trois ans, a subi un important traumatisme crânien l’obligeant à se reconvertir. Il ouvre ensuite sa propre entreprise de lutte antiparasitaire, en plus de son poste de chauffeur de camion. « Il y a deux ans, suite à l’injection du vaccin Covid et à mon rythme de vie, j’ai eu une crise cardiaque. Maintenant, avec les traitements, je ne peux plus travailler comme avant. »
Sa compagne, victime de sarcoïdose, une maladie auto-immune qui touche ses poumons, a dû arrêter de travailler pour s’occuper de leur fils de 10 ans. « En 2018, Gabriel a été infecté par la bactérie Escherichia coli. En février 2024, on lui a diagnostiqué une anomalie génétique rare, TUBB2A. Il est handicapé à 100%. » Reste la grande sœur Amelyne, 14 ans, joueuse de rugby et fan.
Dans un premier temps, la famille s’est réfugiée, n’apportant que ce dont elle avait besoin pour trois jours. «Entre-temps, la compagnie d’assurance nous a déconseillé d’entrer dans la maison. Comme il n’est pas effondré, notre assurance ne nous couvre pas, mais s’il s’effondre alors que j’y suis, même si j’ai déclaré l’incident, je n’y suis pas non plus couvert. »
Une situation grotesque qui devient dramatique lorsque le couple manque de nutrition entérale pour le plus jeune. « J’ai appelé les pompiers. Je ne voulais pas qu’ils entrent, mais qu’ils soient là pour me sauver si nous n’avions pas de chance à nouveau», explique Nicolas Schils avec bon sens.
Toujours digne
Les propriétaires ont réservé un hébergement pour la famille afin qu’elle puisse s’abriter encore deux jours, en attendant le retour de l’analyse de la charpente et du gros oeuvre pour préciser l’ampleur du sinistre. Le maire de Lacquy, Patrick Roussarie, attend également ces éléments pour « émettre un arrêté de sécurisation de l’immeuble. Nous avons signalé le danger avec du ruban adhésif et des panneaux. Les occupants sont en sécurité, c’est le principal. Personne ne vivra ici tant que les travaux ne seront pas terminés. J’y veillerai. » C’est la première fois en quatorze ans de mandat qu’il est confronté à une telle situation.
Dans ce désastre, une maison près de Saint-Gein, adaptée au handicap de leur fils, fait office de lueur d’espoir. « Reste à savoir comment nous allons récupérer le lit médicalisé de notre fils, la collection d’autographes de notre fille, nos affaires, nos papiers, nos appareils électroménagers. Nous passons toute notre vie dans cette maison», souffle la mère. Sans colère, toujours digne.