Deux silhouettes s’effacent dans l’obscurité. 8h15 et 8h19 Les vrais sont déjà au travail. Avant le lever du jour. Une fraction de seconde avant que « Sud Ouest » entre en action. Carnet et stylo dessinés trop tard. Pas grave. Ils sont venus ici, ils reviendront là-bas.
Nous sommes en Floride, point de départ prisé des joggeurs de Bayonne et d’une partie du Pays Basque. Site des bords de Nive choisi pour vérifier cette enquête Ipsos, avec le même résultat depuis 14 ans : le sport est la première résolution des Français. Voyons.
Prendre la température. Sur le thermomètre : -1°. Au troillomètre : du monde. Au kilomètre : personne aux alentours. 8h30, les lumières de la ville s’éteignent. 8h35 : un rouge-gorge dodu se pose sur la piste, fait quelques pas sauvages puis décline l’invitation sur l’asphalte. Ce n’est pas bien, bande d’humains dégénérés ? Hé, voici les deux insomniaques qui font de grands pas. José « la machine », qui s’impose une boucle de « 10 à 15 km chaque jour ». C’est dit dans le mouvement. L’homme est déjà loin. Avec ces gens-là, on ne s’arrête pas, on court. Aussi pour garder au chaud. « J’ai froid », frissonne Clémentine, l’autre kamikaze du 1er janvier 2025.
Les fidèles au rendez-vous
Entre-temps, le soleil a enfin libéré ses premiers rayons au-dessus de la plaine d’Ansot. 8h40 : un promeneur bien couvert s’engouffre sur le chemin de halage. Marie-Jeanne, septuagénaire : « Je suis ici tous les jours à 8 heures normalement, mais je n’ai pas pu venir la semaine dernière, je gardais mes petits-enfants. Je profite du 1er janvier pour recommencer. » C’est parti pour 6 bornes et une heure d’activité physique.
8h45 : alors que la Nive fume tout ce qu’elle peut, un fêtard en retard arrive une cigarette au bec en provenance du centre-ville. Le fond de l’œil est fatigué. Un petit jogging matinal ? « Non, je vais me coucher maintenant. » Bonne nuit Benjamin. “Oui et bonne année!” ” De la même manière.
Dès 9 heures, commence le bal des habitués, une bonne cinquantaine sur trois heures. Il décline poliment le micro. “Nous ne sommes pas là exprès aujourd’hui !” ” Note. Au milieu de Caroline, qui « marche (vite) du 1er janvier au 31 décembre » et de ce groupe de cyclistes bavards, Florence en vacances avec ses parents retrouve avec bonheur « le chemin de (son) enfance ». “Mais bon, je ne cours que 10 km, je suis un grand paresseux.” Euh… On ne devrait pas avoir la même définition de la paresse.
Deux déterminés à se battre
La première résolution apparaît à 10h35. Elle est désormais d’un bleu profond. Elle s’appelle Stéphanie et elle sourit à la vie : « Je ne cours pas assez régulièrement. Avec ce temps magnifique, c’est une bonne façon de commencer l’année, dans l’un des plus beaux endroits de la Côte Basque. Oui, c’est une bonne résolution, comme chaque année d’ailleurs : faire du sport et profiter des bons moments. »
11 heures, le deuxième est déterminé à en découdre avec lui-même. C’est Jean, presque 55 ans et un long réveillon dans les jambes. Opération nettoyage, 10-12 km : « Je suis venu me maudire des excès d’hier », s’amuse-t-il. J’ai commencé à 12h30 et fini à 1h15. On se croit jeune quand on ne l’est plus… Et bien les résolutions sont faites pour être vite oubliées… »
Au moins, il a essayé. Lui. Une pensée émouvante pour les faibles de la veille, le « J’irai courir à l’aube, promis, juré, craché », entre deux toasts et un cocktail. Il est midi, soyons réalistes : vous ne viendrez plus. Pas de panique : il vous reste 364 jours pour ne pas abandonner.