Il y a 25 ans, le changement d’année et surtout de millénaire risquait d’être plombé par des problèmes informatiques. L’envie de célébrer ce moment historique qu’on ne vivrait qu’une fois se mélange à la peur de l’inconnu tant au Saguenay–Lac-Saint-Jean qu’ailleurs sur la planète.
Le désastre tant attendu n’a finalement jamais eu lieu. Se préparer au changement de millénaire aura quand même coûté aux contribuables canadiens 2,5 milliards de dollars, l’équivalent de 4,3 milliards de dollars aujourd’hui.
Les programmes informatiques de l’époque ne représentaient l’année qu’avec les deux derniers chiffres. Une pratique qui pourrait s’avérer problématique au tournant des années 2000. La date de certains appareils électroniques risquait de retomber à 1900 plutôt qu’à 2000.
Daniel Boivin, directeur de service chez Blackburn & Blackburn, se souvient du travail effectué en amont pour éviter les pannes informatiques. Pendant plus de trois mois, lui et ses collègues ont rendu visite à leurs clients.
Il fallait se rendre sur place, insérer la disquette dans l’ordinateur, faire la mise à jour si le client avait trois ou quatre postes, on faisait trois ou quatre postes
se souvient celui qui était technicien à l’époque.
Daniel Boivin est directeur de service chez Blackburn & Blackburn.
Photo : - / Annie-Claude Brisson
L’opération s’est relativement bien déroulée selon les souvenirs du gérant de l’entreprise spécialisée dans la vente et la réparation de matériel de bureau.
C’était un samedi, nous n’étions pas au bureau et en plus c’était le jour de l’An. Nous avions un technicien de garde, il n’y a pas d’appels ou très très peu de petites choses
rapport-t-il.
Une grande couverture médiatique
Les médias du Saguenay–Lac-Saint-Jean ont suivi de près le passage à l’an 2000. Au début de sa carrière, Nicolas St-Pierre a participé à une émission spéciale à la radio CKRS.
Nous avons eu tout un déploiement à La Baie. Je me souviens, entre autres, de Jean-Jules Soucy avec son costume de robot. Il y avait évidemment le feu d’artifice à minuit, minuit qui était arrivé avant les autres villes de la région, je n’ai jamais compris pourquoi
dit celui qui est aujourd’hui secrétaire de rédaction à la radio de -.
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Nicolas St-Pierre est secrétaire de rédaction à - Saguenay-Lac-Saint-Jean. Journaliste surnuméraire à CKRS à l’époque, il a été témoin du changement de millénaire à La Baie.
Photo : - / Annie-Claude Brisson
Hormis les festivités, il n’y a eu aucun événement notable lors de la diffusion en direct en AM.
Tout le monde a fait des heures supplémentaires ce soir-là pour être prêt en cas de besoin, sauf que rien ne s’est passé.
se souvient le journaliste.
Le lac Saint-Jean a gelé comme chaque année, le Saguenay a continué de couler et nos ordinateurs ont continué de fonctionner.
L’équipe s’était préparée à toute éventualité.
Tout le monde attendait un peu ce qui allait se passer. Nous étions à la radio AM, donc une large portée était possible. Il y a eu une sorte de déploiement. Tout le monde était aux aguets
ajoute-t-il.
Pas un bug, mais plutôt un meurtre
Invitée à raconter ce moment charnière, Isabelle Labrie, professeure de journalisme en arts et technologies médiatiques, s’est replongée dans ses souvenirs de jeune journaliste. A l’époque, elle travaillait au journal Le Quotidien.
Nous avons écrit un texte dans l’édition papier du 31 pour dire que la région se préparait, qu’il y avait des policiers partout. On se demandait comment ça allait se passer
résume-t-elle.
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Isabelle Labrie est enseignante en arts et technologies médiatiques. A l’époque, elle était journaliste surnuméraire au journal Le Quotidien. Elle était de service le 31 décembre.
Photo : - / Annie-Claude Brisson
Comme beaucoup de journalistes au début de leur carrière, elle travaillait pendant les vacances. Elle a suivi le passage à la nouvelle année dans un bar du quartier Chicoutimi.
C’était pour voir à minuit ce qui allait se passer. Comme on avait toujours peur de manquer d’argent, que les distributeurs ne fonctionnent plus, je me souviens que j’étais allé retirer 300 $. A minuit pile, rien ne s’est passé
se souvient le professeur.
Le journal imprimé a été en pause pendant deux jours. La première édition de l’an 2000 était prévue le 3 janvier.
Nous n’avons rien à écrire. Il faut aussi remonter à l’époque, au journal Le Quotidien, il n’y avait pas de site internet, il n’y avait pas d’information en continu. Nous n’avions pas l’urgence que nous avons aujourd’hui d’écrire des nouvelles
fait-elle remarquer.
Finalement, ce n’est pas le bug de l’an 2000 qui a retenu l’attention au Saguenay–Lac-Saint-Jean, mais plutôt un homicide.
Le 1er janvier, il y avait toujours les bébés de l’année. Mais ce jour-là, au petit matin, il y avait eu un meurtre au bar Express de la rue Racine. C’est vraiment dans cela que nous déployons nos efforts.
conclut Isabelle Labrie.