François Bayrou, déterminé à reconstruire Mayotte en deux ans, est arrivé lundi 30 décembre sur l’archipel dévasté par le cyclone Chido à la tête d’une imposante délégation ministérielle, avec la promesse d’un plan d’aide dit « Mayotte debout », qui précédera d’autres longs -mesures à terme.
« Les Mahorais ont souvent le sentiment que ce qu’on leur apporte, ce sont des assurances, de belles paroles de solidarité dans les déclarations, mais ce qu’ils veulent, c’est la réalité. (…) Après une journée de dialogue, nous annoncerons ce soir un plan qui s’appellera ‘Mayotte debout'”, ce qui permettra « apporter des réponses rapides »a affirmé le Premier ministre, alors que les habitants attendent de pied ferme des réponses concrètes du gouvernement.
« Et puis, il y aura une deuxième phase d’ici quelques mois. C’est un plan à long terme. Car il ne s’agit pas seulement de reconstruire Mayotte telle qu’elle était. Il s’agit de concevoir le « futur de Mayotte, autrement »a ajouté M. Bayrou.
Désireux de “faire mentir le destin”le Premier ministre a réitéré son “objectif” reconstruire Mayotte en deux ans.
Accompagné de cinq ministres, dont les ministres d’Etat Elisabeth Borne (Éducation) et Manuel Valls (Outre-mer), François Bayrou doit s’exprimer depuis le conseil départemental mahorais en fin de journée.
Le sort de Mayotte pourrait faire l’objet d’un projet de loi spécial, qui serait présenté lors du Conseil des ministres de vendredi.
39 morts et plus de 5 600 blessés
Mais pour la députée Liot de Mayotte Estelle Youssuffa, les efforts ne sont pas là “pas à la hauteur des besoins”. « Nous devons calibrer l’aide à la population réelle »dont les sans-papiers, nombreux dans l’archipel, a-t-elle souligné sur RTL.
M. Bayrou a jugé à cet égard “irresponsable” faire semblant “qu’il n’y a pas de problème d’immigration brûlant à Mayotte”. « Notre devoir est de poser la question et d’essayer d’y apporter des réponses »par « des propositions de loi qui vont isoler les sujets qui vont bloquer les sujets »dit-il.
Revenant sur le droit foncier à Mayotte, déjà restreint dans l’archipel, “C’est une question qu’il faut se poser”a-t-il précisé.
Environ un tiers de la population de Mayotte – officiellement 320 000 habitants selon l’Insee, mais peut-être 100 000 à 200 000 de plus compte tenu de l’immigration irrégulière – réside dans des habitats précaires, entièrement détruits.
Chido, le cyclone le plus dévastateur à Mayotte depuis 90 ans, a causé le 14 décembre la mort de 39 personnes et fait plus de 5.600 blessés, selon un bilan publié dimanche par la préfecture.
Concernant le bilan des morts, M. Bayrou a appelé lundi à un bilan “très prudent”affirmant que le “des rumeurs de milliers de morts” n’étaient pas “sans fondement” et que les morts étaient plutôt comptés dans “quelques dizaines ou quelques centaines”.
Le préfet de Mayotte avait évoqué, au lendemain de la catastrophe, la possibilité qu’il y ait “plusieurs centaines” de décès. « Peut-être approcherons-nous le millier, voire quelques milliers »il a ajouté.
Les dégâts sont en tout cas colossaux dans ce département, le plus pauvre de France. Depuis, les services d’urgence travaillent dur pour restaurer les services essentiels tels que les réseaux d’eau, d’électricité et de communication.
Bayrou, un « moteur diesel » à Mayotte, se moque d’un député RN
Après avoir transporté 2,5 tonnes de matériel humanitaire dans son avion, le Premier ministre a débuté la journée par plusieurs visites : usine de dessalement de Petite-Terre, collège Kaweni 2 de Mamoudzou, hôpital de campagne installé après le cyclone.
« Tout a été vandalisé »» a déploré un professeur de sport, qui exige que le collège soit “garde”.
Montrant les collines dévastées où se trouvaient les bidonvilles, le maire de Mamoudzou Ambdilwahedou Soumaila a plaidé pour “arrête ça.” « Nous ne pouvons pas laisser les gens faire les mêmes erreurs et espérer que demain il y aura des résultats différents »a-t-il argumenté auprès de M. Bayrou.
Plusieurs rencontres sont prévues avec des acteurs économiques, des forces de sécurité et des élus locaux, ainsi qu’une cérémonie d’hommage au capitaine de gendarmerie Florian Monnier décédé en intervention après le passage du cyclone.
Lors d’un déplacement les 19 et 20 décembre, où il a été confronté à l’impatience, à la colère et au désespoir des Mahorais qui ont souvent tout perdu, le président Emmanuel Macron a annoncé les premières mesures d’urgence pour Mayotte qui, «pendant des mois», «ne vivra pas dans une situation normale».
M. Bayrou, de son côté, a connu une première et intense polémique lorsqu’il s’est rendu, deux jours après le passage du cyclone, à Pau pour présider le conseil municipal de la ville dont il est maire depuis 2014.
Le chef du gouvernement était « un peu un moteur diesel » sur Mayotte, s’est moqué lundi le député Rassemblement national Laurent Jacobelli.
Le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure lui a demandé « actes » au Premier ministre, parce que « Les habitants se sentent abandonnés et attendent de l’aide. »
Au terme de sa visite à Mayotte, M. Bayrou se rendra à l’île de la Réunion, base logistique importante de l’aide à l’archipel mahorais, où il poursuivra sa visite mardi matin avant de regagner la France métropolitaine.