Le message d’adieu est déchirant : “Nous avons toujours fait le maximum d’efforts pour la victoire, pour aider nos combattants et notre pays […] Malheureusement, tous nos commandants n’aiment pas la vérité, et c’est dommage. » La chaîne Telegram du média ukrainien DeepState, célèbre pour ses cartes ultra précises des combats en Ukraine, annonce la couleur. Alors que l’année touche à sa fin, diffuser des informations fiables sur la situation du front n’est plus du goût de la hiérarchie, au point d’interdire un média non gouvernemental, l’équivalent de la plateforme russe Rybar.
C’est le chef d’état-major de l’armée ukrainienne, le général Syrsky lui-même, qui aurait demandé la fermeture de DeepState après trois années de travail remarquable, en contradiction avec les informations officielles notamment de l’opinion publique ukrainienne. se méfie, et de ceux des enthousiastes habituels des réseaux qui ont fait de la guerre en Ukraine la « fantasmagorie d’un monde autre et meilleur »comme le disait Nietzsche, où l’Ukraine continue inlassablement à vaincre l’ours russe…
Ce renforcement du contrôle de l’information en Ukraine reflète une aggravation de la situation dans presque tous les secteurs du front. Ainsi, dire la vérité revient à défaitisme, à saper la motivation chancelante des combattants et à renforcer la résistance de ceux que les sergents recruteurs traquent dans les rues du pays pour les envoyer au front. 2024, en effet, se termine sur un avantage évident pour les forces russes, même si, dans cette guerre d’usure où l’objectif reste avant tout de détruire l’adversaire, les gains territoriaux réalisés par les Russes ne s’accompagnent d’aucune percée décisive.
Admiration mutuelle
Motivation, puissance de feu, nombre de fantassins au sol, le déséquilibre entre Ukrainiens et Russes est de plus en plus flagrant. Au point qu’on peut se demander ce qui pourrait contraindre Vladimir Poutine à accéder à la volonté de Donald Trump d’entamer des négociations en Ukraine pour mettre fin à la guerre. Jeudi dernier, lors de sa traditionnelle séance de questions-réponses avec les journalistes, le président russe s’est déclaré prêt à rencontrer le président élu américain. “à tout moment”. Il a toutefois rappelé que l’objectif de « soumettre l’Ukraine et obtenir des garanties de sécurité de l’OTAN restaient de mise ».
Le 7 novembre, lors d’un forum international organisé à Sotchi, au bord de la mer Noire, il a adressé des compliments à Trump. « Son comportement au moment de la tentative d’assassinat m’a impressionné. Il s’est avéré être un homme courageux. »dit-il. Ce n’est pas tous les jours que Vladimir Poutine fait l’éloge d’un dirigeant occidental. On oublierait presque que, derrière ces manifestations d’admiration mutuelle, rien n’indique à ce stade que les propos des deux dirigeants se traduisent par un changement dans leur gestion des affaires internationales et notamment de la guerre en Ukraine.
La suite après cette annonce
Donald Trump s’est certainement démarqué de son prédécesseur en mettant ouvertement en place les négociations et la paix. « vingt-quatre heures ». Mais Vladimir Poutine n’a pas oublié, comme il l’a souligné à plusieurs reprises, que lors de son précédent mandat, ce même Donald Trump avait mis en place « plus de restrictions et de sanctions contre la Russie que n’importe quel président américain avant lui ». Poutine sait également que Trump a été le premier chef d’État occidental à fournir à Kiev des fusils de précision et des missiles antichar Javelin.
En termes de plan, il s’agirait de proposer un gel frontal
Ensuite, d’après ce qui a pu fuir, le plan de paix de Trump, concocté avec son conseiller pour l’Ukraine, le général Kellogg, belliciste anti-russe notoire, consiste à proposer un gel du front de même nature que celui prévu dans les accords de Minsk. 1 et 2. Ces dernières n’ont en pratique jamais été appliquées. Ajoutons à cela que, selon Temps FinancierDes membres de l’équipe de Trump, désireux de rassurer leurs alliés européens sur le sort de l’Ukraine, auraient confirmé que la nouvelle administration avait l’intention de continuer à fournir une assistance militaire à Kiev. Pour quiconque veut arrêter une guerre, continuer à livrer des armes est une idée très curieuse. En contrepartie, les Européens seraient tenus d’augmenter leur budget de défense jusqu’à 5 %. La promesse de mettre fin à la guerre devrait se traduire par un désengagement américain et une augmentation de la contribution européenne à l’effort de guerre en Ukraine ou du moins à une forme de paix armée, laissant aux belligérants la possibilité de recommencer. la guerre plus tard.
Les Russes avancent
On voit bien que le plan de paix de Donald Trump comporte de nombreux écueils. Mais même en supposant que Poutine soit prêt à négocier, ce plan repose sur l’hypothèse que l’Ukraine continuera à tenir bon. Toutefois, l’avancée russe, si elle reste pour l’instant lente et progressive, pourrait s’accélérer avec la prise des dernières villes forteresses ukrainiennes du Donbass. Les forces russes ne se trouvent qu’à quelques kilomètres de Pokrovsk, au sud de Donetsk. Toretsk est conquise et Kourakhove est encerclée. Plus au nord, les Russes sont dans la banlieue de Koupiansk et les bombardements d’artillerie ont repris au sud, à Kherson. Au total, plus de 200 localités ont été conquises en 2024, dont la majorité se trouvent dans l’oblast de Donetsk.
Face à cette situation, les Ukrainiens sont contraints de réagir par des attaques spectaculaires, comme celles par drones contre des bâtiments de la ville de Kazan, ou l’assassinat du commandant des forces de défense radiologiques, chimiques et biologiques russes, le général Igor Kirillov, en le cœur de Moscou. Kiev prouve ainsi qu’elle est capable de frapper de plus en plus loin à l’intérieur de la Russie, mais n’est-ce pas avant tout une marque de désespoir face à un sort des armes de plus en plus défavorable à l’Ukraine ? ?