Ces femmes ukrainiennes osent dénoncer les horreurs de la guerre (et blâmer les soldats russes) – .

Ces femmes ukrainiennes osent dénoncer les horreurs de la guerre (et blâmer les soldats russes) – .
Ces femmes ukrainiennes osent dénoncer les horreurs de la guerre (et blâmer les soldats russes) – .

Daria a subi des viols répétés de la part de soldats russes en 2022, Alissa a été violée en 2014 par un officier russe : ces trentenaires ukrainiennes ont surmonté la peur et la stigmatisation pour témoigner, une « nécessité » pour que « le monde sache »…


Ces femmes ukrainiennes osent dénoncer les horreurs de la guerre (et accusent les soldats russes) Manifestation contre les viols de femmes ukrainiennes commis par des soldats russes, le 16 avril 2022 à Vilnius, Lituanie © AFP, PETRAS MALUKAS

Daria a subi des viols répétés de la part de soldats russes en 2022, Alissa a été violée en 2014 par un officier russe : ces Ukrainiennes de trente ans ont surmonté la peur et la stigmatisation pour témoigner, une « nécessité » pour que « le monde sache » et pour donner du courage aux autres victimes.

Contrastant avec sa petite silhouette et son visage réservé et très pâle, les mots forts de Daria Zymenko, 33 ans, ont impressionné lors d’une conférence de presse organisée à Paris il y a quelques jours notamment par l’ONG SEMA Ukraine, qui vient en aide aux femmes ukrainiennes victimes de viols commis par des soldats russes.

“C’est très douloureux de parler… mais je sens aujourd’hui qu’il est nécessaire d’expliquer ce que j’ai vécu, car la Russie continue de torturer des gens et de commettre des crimes sexuels quotidiennement en Ukraine”, a-t-elle déclaré, en ukrainien traduit en français, dans un entretien avec AFP.

Le 24 février 2022, alors que les premières explosions retentissent dans la banlieue de Kiev et que l’offensive russe débute en Ukraine, Daria, une illustratrice, se réfugie à Gavronchtchyna, le village de ses parents, près de la capitale. Mais l’armée russe s’empare du village.

Peu de temps après, des soldats « ivres et armés de fusils » ont fait irruption dans leur maison, exigeant que Daria les accompagne pour un « interrogatoire ». « Ma famille les a suppliés… mais ils ont pointé leurs armes sur nous, disant que si je ne les accompagnais pas, ils nous tueraient. »

Emmenée le 28 mars dans une maison abandonnée par les voisins, les militaires lui ont demandé de se déshabiller. « J’ai compris que ce ne serait pas un interrogatoire : ils m’ont violée pendant deux heures. »

De retour chez ses parents, quand la jeune femme voit déjà le désespoir sur leurs visages, elle préfère « se taire ». Le 29 mars, les soldats sont revenus « pour la même chose… », murmure-t-elle, le regard tourmenté et les yeux embués. Le lendemain, l’armée ukrainienne « est arrivée heureusement ».

« Je veux que le monde entier le sache et que les gens me voient comme une personne vivante et pas seulement comme une statistique ! », a déclaré Daria à l’AFP, jugeant « extrêmement important de parler au nom des personnes qui ne peuvent pas témoigner » parce qu’elles se trouvent dans les territoires occupés ou parce qu’elles craignent la stigmatisation.

Venue spécialement de Kiev, Alissa Kovalenko, 36 ans, est membre de SEMA Ukraine depuis la création de l’ONG en 2019. Son regard sérieux et sa personnalité combative sont parfois illuminés par un sourire franc, son visage chaleureux entouré de longs cheveux blonds.

Réalisatrice de documentaires renommée, ses œuvres ont remporté plusieurs prix dans le monde entier. Elle termine actuellement son dernier film, « Traces », sur les victimes de viols qui sont membres de SEMA Ukraine.

« Aujourd’hui encore, je dirais que 80% des femmes victimes de viol restent silencieuses et n’en parlent pas… », estime Alissa à l’AFP. « Mais les 20% qui parlent, c’est déjà une victoire. »

C’est alors qu’elle travaillait sur un film dans la région de Donetsk en 2014 qu’Alissa, encore étudiante, a été arrêtée par des séparatistes pro-russes.

“Je quittais (la région) en taxi” le 15 mai 2014, “et c’est le chauffeur qui m’a dénoncé à un check-point avec des séparatistes, disant que j’étais avec des militaires ukrainiens peu avant”.

“Ils m’ont sorti de la voiture et m’ont interrogé” pendant plusieurs jours, menaçant de “lui couper les oreilles, les doigts”.

Entre le 15 et le 18 mai, un policier – russe selon elle – l’a emmenée dans un appartement de Kramatorsk. « Il m’a obligée à me déshabiller, à entrer dans une baignoire et ensuite j’ai été violée… ».

Pendant des années, Alissa n’a parlé de sa captivité qu’à ses proches. Ils n’ont appris son viol que bien plus tard, raconte-t-elle, très émue.

Selon SEMA Ukraine, les gens parlent peu à peu dans ce pays du tabou de la violence sexuelle.

Daria explique qu’elle a « d’abord décidé d’oublier cette terrible expérience », mais qu’elle souffrait régulièrement de crises d’angoisse. Elle a ensuite pu bénéficier d’une aide psychologique grâce à SEMA Ukraine.

Elle a porté plainte à l’étranger, mais préfère ne pas préciser dans quel pays.

Alissa n’a pas non plus bénéficié du soutien de l’État ukrainien, mais c’est sa rencontre en 2019 avec le fondateur de l’ONG SEMA Ukraine et d’autres « survivantes » de viol qui lui ont fait prendre conscience de « ce point noir, ce traumatisme qui était resté en moi » . Elle a déposé une plainte auprès du procureur général d’Ukraine.

« On ne guérit pas après une telle expérience… on se sent juste mieux », explique Alissa, qui dit encore faire des cauchemars.

Daria dit espérer que « ceux qui lui ont fait ça seront jugés un jour », mais sait que « les auteurs sont actuellement injoignables car ils se trouvent sur le territoire russe ».

En attendant, « témoigner et aider d’autres femmes au sein de l’ONG m’aide à me reconstruire », confie-t-elle.

 
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