Jordan Bardella et les favoris du RN au premier tour d’une élection historique en France

Jordan Bardella et les favoris du RN au premier tour d’une élection historique en France
Jordan Bardella et les favoris du RN au premier tour d’une élection historique en France

Le Rassemblement national (RN) de Jordan Bardella et Marine Le Pen est arrivé en tête dimanche au premier tour des élections législatives françaises. Confirmation que le parti d’extrême droite est en train de devenir « le premier parti politique de France », selon un expert.

Avec 33,2 à 33,5% des voix, le RN et ses alliés ont devancé la coalition de gauche du Nouveau Front populaire (NFP), qui a obtenu 28,1 à 28,5%, loin devant le camp du président Emmanuel Macron, à 21 à 22,1%, lors de ce scrutin marqué par une forte participation.

« Le sentiment que nous avons en France ce soir est […] qu’il y a une vraie dynamique du Rassemblement national», commente Julien Tourreille, chercheur en études stratégiques et diplomatiques à la Chaire Raoul-Dandurand.

Les Français “ont rendu un verdict définitif”, se réjouissait dimanche soir Jordan Bardella, 28 ans, qui se rapproche vraisemblablement de Matignon, siège du Premier ministre.

“Il faut une majorité absolue”, a déclaré Marine Le Pen en annonçant sa propre élection comme députée dès le premier tour dans son fief d’Hénin-Beaumont.

Ce score, le meilleur au premier tour pour le RN, au lendemain des élections européennes, devrait inciter le parti et ses dirigeants à «asseoir leur légitimité à aspirer à gouverner» d’ici le second tour des législatives, le 7 juillet, estime Julien Tourreille.

“Pour le RN, la campagne qui démarre au second tour, c’est d’essayer de convaincre les gens de leur donner la possibilité d’exercer le pouvoir en ayant la majorité absolue à l’Assemblée nationale”, soit 289 sièges, explique le chercheur.

Le Nouveau Front Populaire comme alternative

L’avancée de l’extrême droite va désormais pousser le NFP, arrivé en deuxième position, à se présenter comme la véritable alternative crédible au RN, constate Julien Tourreille.

A la fin du premier tour, où habituellement « on choisit », puis « élimine » au second, les résultats suggèrent ici un nombre record de triangulaires potentiels. Dans de nombreuses circonscriptions, trois candidats ont en effet obtenu le vote d’au moins 12,5 % des électeurs inscrits, ce qui les rend éligibles au second tour.

Dans de tels cas, les candidats arrivés deuxièmes pourraient tenter d’obtenir le retrait du candidat arrivé troisième « afin d’espérer éventuellement [finir] premier au deuxième tour», explique M. Tourreille.

« Là, le défi sera de voir qui va continuer ou qui va se retirer », affirme Julien Robin, étudiant au doctorat en science politique à l’Université de Montréal.

« La gauche sera vraiment prise en étau entre une certaine éthique de responsabilité, d’un côté, et une véritable stratégie de conquête de sièges, de l’autre », poursuit-il.

A gauche, écologistes, socialistes et communistes ont annoncé qu’ils se retireraient si un autre candidat était mieux placé pour faire barrage au RN.

Le leader de La France Insoumise (LFI), parti dominant au sein du NFP, Jean-Luc Mélenchon, a également annoncé le retrait des candidats de gauche arrivés dimanche en troisième position si le RN est en mesure de l’emporter dans un circonscription électorale.

Le parti conservateur de droite Les Républicains (LR), qui a recueilli environ 10 % des suffrages, a refusé d’appeler ses électeurs à voter contre le RN dimanche prochain.

Julien Tourreille mentionne qu’il s’agira d’un calcul qui se fera quasiment circonscription par circonscription : « Dans les prochaines minutes, les prochaines heures et les premiers jours de la semaine, ce sera [de voir] ce que nous en faisons.

Incertitudes sur le « front républicain »

Dimanche, Emmanuel Macron a appelé à « un rassemblement large, clairement démocrate et républicain pour le second tour » afin d’affronter le RN. Le président français n’a cependant pas précisé l’attitude à suivre en cas de duels entre le RN et le NFP ou de courses à trois.

“L’extrême droite est aux portes du pouvoir”, a prévenu le Premier ministre Gabriel Attal, appelant à “empêcher le Rassemblement national d’avoir la majorité absolue”.

Pour Julien Tourreille, cette union contre le RN est incertaine, notamment en raison du décalage entre les programmes politiques des partis de la coalition, ainsi que de la « haine viscérale » que certains membres cultivent entre eux.

La « figure ultrapolarisante » de Jean-Luc Mélenchon nuirait également à l’image du NFP, selon M. Tourreille : le chef de file de LFI serait tellement détesté, au sein même de l’électorat socialiste, que le RN tenterait de convaincre les gens de le choisir au détriment du NFP sous prétexte que le parti d’extrême droite ne compte pas Mélenchon dans ses rangs.

« Le plus simple pour le front anti-RN aurait été, ou serait-il encore – ils ont encore le temps – de limoger totalement Jean-Luc Mélenchon », juge Julien Tourreille, qui évoque la possibilité pour le NFP de proposer d’autres « plus » candidats « consensuels ».

Si la barrière du NFP devait fonctionner, une majorité de soutien à Mélenchon à l’Assemblée nationale serait encore « très très improbable », ajoute M. Tourreille.

L’histoire se répète

Pour ce premier tour, la participation devrait être d’au moins 65% des inscrits, selon les estimations, contre 47,51% en 2022 et 67,9% lors des dernières élections législatives organisées après une dissolution, en 1997.

Julien Tourreille voit une analogie avec l’alternance qu’il y a eu à l’élection présidentielle de 1981 avec l’arrivée au pouvoir de l’union de la gauche sous François Mitterrand.

La droite, au pouvoir depuis le début du Ve République, met alors en garde contre l’extrême gauche, sans succès : l’électorat, très fortement mobilisé, a besoin de changement.

« On a un peu la même chose, j’ai l’impression, aujourd’hui, un peu plus de quarante ans après », observe M. Tourreille. Selon le spécialiste, « la mobilisation a surtout favorisé le RN ».

Si Jordan Bardella entrait à Matignon, ce serait la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale qu’un gouvernement d’extrême droite dirigerait la France. Le président du RN a toutefois prévenu qu’il n’accepterait le poste de Premier ministre que si son parti détient la majorité absolue.

Il s’agirait aussi d’une cohabitation inédite entre Emmanuel Macron, président pro-européen, et un gouvernement bien plus hostile à l’Union européenne, qui pourrait faire des étincelles sur les prérogatives des deux chefs de l’exécutif, notamment en matière de diplomatie et de défense. .

Julien Tourreille ne serait pas surpris si le RN obtenait une très forte majorité relative le 7 juillet, non loin des 289 sièges nécessaires pour avoir la majorité absolue. Il pourrait atteindre cette dernière avec le soutien de quelques élus des Républicains.

« Je pense que ce sera encore une campagne très, très difficile pour [le RN]explique le politologue. « Ce sera leur objectif, c’est sûr, toute la semaine, juste pour dire : “Donnez-nous une chance”. »

Un autre scénario possible est celui d’une Assemblée bloquée, sans alliance possible entre des camps très polarisés, au risque de plonger la France dans l’inconnu.

Sans majorité absolue, quel que soit le gouvernement, il ne pourrait absolument rien faire, conclut enfin Julien Tourreille.

Certes, « le jeu politique va se recentrer, notamment à l’Assemblée nationale », soutient le doctorant Julien Robin. C’est ici que se jouera le cœur du jeu, et non plus au palais présidentiel.»

Avec l’Agence France-Presse

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