Le président démocrate de 81 ans, comme alourdi par le poids des années, a complètement raté son débat face à Donald Trump. Alors que le camp démocrate panique, la question se pose de trouver un éventuel remplaçant pour la course à la Maison Blanche.
Un débat raté qui sème la panique chez les démocrates. En affrontant Donald Trump en début de campagne, Joe Biden devait mettre fin aux inquiétudes sur son âge et rassurer l’Amérique sur sa capacité à décrocher un nouveau mandat.
C’est tout le contraire qui s’est produit jeudi 27 juin sur le plateau de CNN. Sa voix rauque et hésitante, le président américain paraissait fébrile et confus, contrastant avec le ton résolu et énergique de son adversaire républicain.
Ayant parfois du mal à finir ses phrases, le candidat démocrate s’est laissé dominer par un Donald Trump plus calme que d’habitude, canalisé par les règles strictes imposées aux débatteurs. Résultat : 67% des téléspectateurs estiment que Donald Trump a remporté l’échange, selon un sondage de CNN.
«Début du laboratoire»
Pour les démocrates, le service après-vente est difficile. Lors d’un déplacement de campagne, Joe Biden a déclaré vendredi qu’il avait “bien fait”, concédant qu’il était “difficile de débattre contre un menteur”. La vice-présidente Kamala Harris a pour sa part reconnu que le chef de l’Etat américain avait fait un début “laborieux”, mais a estimé qu’il avait fini “fort”.
Mais en coulisses, la panique s’installe. Tandis que la presse américaine parle d’une performance « terrible », voire « éprouvante », un dirigeant du parti âne confie à CNN avoir du mal « à affirmer que Joe Biden devrait être notre candidat ». ».
Si l’âge de Joe Biden a longtemps pesé sur les pieds des démocrates, le débat a exacerbé toutes les craintes. Au point de relancer l’hypothèse d’un retrait du président.
Un remplaçant à trouver avant le 19 août
En théorie, il est encore possible de choisir un autre candidat avant que la Convention démocrate entérine le 19 août le choix du candidat à la Maison Blanche. Mais en pratique, “il y a de fortes chances qu’il ne se passe rien”, estime Olivier Richomme, professeur de la civilisation américaine à l’Université Lumière Lyon-2.
Joe Biden a remporté près de 90% des quelque 4 000 délégués en jeu lors des primaires démocrates. Élus sur le nom du président, ils devraient, sauf énorme surprise, voter pour lui lors de la convention.
Pour que Joe Biden soit mis à l’écart, « il faudrait que cela vienne de lui », estime Olivier Richomme. « S’il se retire, la convention devient « ouverte » (négocié) et les délégués pourront choisir un autre candidat », explique le spécialiste des États-Unis.
Dans ce scénario, inédit dans l’histoire moderne du Parti démocrate, les « super délégués » joueraient un rôle important. Il s’agit de membres du parti, nommés automatiquement sans avoir été élus contrairement aux délégués « classiques ». « Ce sont des professionnels de la politique qui, avec leur réseau, peuvent avoir une forte influence sur le choix du candidat », explique Olivier Richomme.
« Seuls Jill et Barack peuvent le lui dire »
Un retrait de Joe Biden serait de toute façon un coup de tonnerre dans un ciel bleu et déclencherait une campagne express et acharnée dans le camp démocrate. En coulisses, plusieurs personnalités nourrissent déjà des ambitions personnelles : la vice-présidente Kamala Harris, la gouverneure du Michigan Gretchen Whitmer, le gouverneur de Californie Gavin Newsom et le gouverneur de Pennsylvanie Josh Shapiro. Parmi eux, aucun n’a encore exprimé publiquement de réserves sur la candidature du président.
En l’état actuel des choses, Joe Biden ne semble pas vouloir céder sa place. « Si les sondages dégringolent dans les prochains jours, il y aura peut-être suffisamment de pression sur lui et son équipe pour qu’il envisage de se retirer », avance Olivier Richomme.
“Seuls Jill (Biden, sa femme) et Barack (Obama) peuvent lui dire cela”, a déclaré à Axios un membre du Parti démocrate.
La contre-performance de Joe Biden pourrait marquer un tournant dans une campagne jusqu’ici extrêmement serrée. Difficile toutefois de dire si le débat fera bouger radicalement les lignes, dans un pays où la polarisation politique est extrême.
L’enjeu n’en est pas moins énorme : si l’un des deux candidats parvient à séduire quelques électeurs indépendants, notamment dans les Etats susceptibles de faire basculer le scrutin, cela pourrait suffire à lui donner l’avantage en novembre.
