« Le racisme anti-juif, anti-noir et anti-musulman est le moteur de l’extrême droite d’hier à aujourd’hui »

« Le racisme anti-juif, anti-noir et anti-musulman est le moteur de l’extrême droite d’hier à aujourd’hui »
« Le racisme anti-juif, anti-noir et anti-musulman est le moteur de l’extrême droite d’hier à aujourd’hui »

« Quand vous entendez du mal sur les Juifs, tendez l’oreille, les gens parlent de vous. » Ce sont les propos que Frantz Fanon, psychiatre martiniquais et français, penseur du racisme anti-noir, avait entendu de la part de son professeur de philosophie, lui aussi d’origine antillaise, et qu’il a rapporté dans son livre. Peau noire, masques blancs (1952). Fanon dit qu’il a d’abord compris cette phrase de manière abstraite, dans le sens de fraternité universelle. Mais il a compris plus tard qu’il s’agissait d’une alerte très concrète : « Un antisémite est forcément négrophobe », a-t-il observé. Quelques décennies plus tôt, l’itinéraire de l’écrivain notoirement antisémite Louis-Ferdinand Céline avait commencé par un séjour au Cameroun dont l’histoire a donné lieu à un racisme anti-noir d’une rare brutalité, niant toute conscience de soi aux « nègres », «négresses» Et « des nègres » qu’il avait fait travailler comme porteurs dans ses entreprises prédatrices dans la forêt équatoriale.

Un Nègrophobe est logiquement antisémite. Au début des années 1970, le Front National (futur Rassemblement National) est né d’une mobilisation raciste issue de deux mouvements convergents : les antisémites nostalgiques du nazisme et de la collaboration, et les partisans de l’Algérie française. Mobilisés contre les Algériens, tous indistinctement qualifiés de « musulmans ».

Ce terme, usant d’un langage colonial, désignait les Algériens en général – même ceux de religion catholique – ce qui donnait l’étrange identification de « musulmans catholiques ». Ce sens revient aujourd’hui, par exemple avec l’expression « Musulman en apparence » utilisé par Nicolas Sarkozy en 2012 en se référant au seul faciès.

Ancrer les migrations dans toutes les sociétés

À partir des années 1980, le Front National a converti son idéologie raciste en prenant comme cheval de bataille politique les immigrés postcoloniaux (maghrébins et subsahariens), qui depuis la fin des années 1990 sont devenus le « migrants ». La boucle est bouclée : le racisme anti-juif, anti-noir et anti-musulman est le moteur de l’extrême droite d’hier à aujourd’hui. Et le thème de la migration, présenté par le Rassemblement national comme un problème urgent de sécurité et d’identité pour tous les Français et leur territoire, masque une infrapensée raciste réactivée face aux mouvements de personnes en provenance des pays anciennement colonisés.

Les faits eux-mêmes, ceux qui concernent la mondialisation humaine et plus précisément la circulation des personnes à l’échelle planétaire, parlent d’une réalité bien plus grande et ordinaire que tous les fantasmes véhiculés à leur sujet. La part relative de la France dans les arrivées de migrants et de réfugiés est plutôt inférieure aux moyennes européennes. Et le lien systématique entre migration et insécurité n’est pas prouvé par les données statistiques.

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