“Une punition divine, peut-être.” C’est un dimanche. »
Ces propos sont ceux de Pierre-Emmanuel Germain-Thill, l’une des victimes, abusé sexuellement durant son enfance par le Père Bernard Preynat. Condamné en 2020 à cinq ans de prison pour des agressions sexuelles commises sur de jeunes scouts dans le diocèse de Lyon, le religieux est décédé ce dimanche 23 juin, à l’âge de 79 ans.
Récemment libéré sous bracelet électronique, il a été retrouvé sans vie dans sa salle de bain. Une enquête a été ouverte mais, visiblement, rien de suspect n’a été trouvé sur son corps, selon les informations de BFM Lyon.
Sa mort marque « la fin d’une histoire » pour citer l’une de ses victimes. Lors de son procès, les parties civiles ont estimé qu’il avait commis entre 3 000 et 4 000 agressions, principalement contre de jeunes scouts. Beaucoup d’autres n’ont pas pu déposer plainte en raison du délai de prescription.
Derrière la mort de Preynat : l’histoire d’un silence assourdissant
Au cours de sa longue carrière, le Père Preynat a utilisé le silence des parents, mais surtout de l’Église, pour commettre ses méfaits. Depuis des années, son comportement était connu du diocèse de Lyon, sans que celui-ci soit dénoncé. En ce sens, l’affaire Preynat est avant tout l’affaire Barbarin.
Dans le livre Histoire d’un silenceIsabelle de Gaulmyn, journalist at La Croix affirme ainsi que le cardinal en fonction à l’époque était au courant de ses actes dès sa prise de fonction à Lyon en 2002. Le prélat confirme, dans un entretien, en avoir eu connaissance en 2007.
Mais loin de le démettre de ses fonctions, il nomme Preynat « doyen du pays de Roanne de Charlieu » en 2013. Pire, il le fait gravir les échelons de la hiérarchie catholique. Alerté à nouveau en 2014 par une victime, le cardinal ne bouge pas.
Il faudra attendre 2015 et l’ouverture d’une enquête préliminaire pour que le père soit démis de ses fonctions. En décembre 2015, l’association La Parole Libée est créée. Son action sera une véritable explosion dans le monde de l’Église catholique.
Mort de Preynat : la fin d’un scandale lyonnais
L’affaire va profondément bouleverser l’Église. En février 2016, le pape François déclarait notamment :
« Un évêque qui change simplement la paroisse d’un prêtre pédophile est inconscient. La meilleure chose qui lui reste à faire est de présenter sa démission.»
Ça… Sans évoquer le cas Lyon. Dans la chronologie ci-dessous, vous retrouverez le détail de l’affaire de 2002 jusqu’au procès de 2020. Durant les dix dernières années, les plaintes n’ont cessé d’être déposées contre le prélat des Gaules.
En mars 2019, il avait notamment été condamné à six mois de prison pour « non-dénonciation ». Suite à cette décision judiciaire, le cardinal présenta sa démission au pape, qui la refusa. Malgré ce refus, le cardinal Barbarin maintient sa volonté de se retirer.
Impliqué dans le film de François Ozon, Grâce à Dieului seul incarne le silence de l’Église face aux victimes de violences sexuelles.
“Personnellement, cela ne change rien, tout comme la peine qui lui a été infligée”, a-t-il déclaré à nos confrères de Progrès, Pierre-Emmanuel Germain-Thill, ancien porte-parole de la Parole Libérée, suite au décès du Père Preynat. En revanche, je pense que c’est un grand soulagement pour la hiérarchie catholique, contrairement à ses victimes. »
L’ex-cardinal Barbarin s’en sort à bon compte, étant acquitté en appel. Il est aujourd’hui aumônier en Bretagne, loin de la justice et des victimes du Père Preynat.
