La chasse aux riches et le prix de l’électricité

La chasse aux riches et le prix de l’électricité
La chasse aux riches et le prix de l’électricité

Pendant ce temps, les grandes entreprises énergivores d’ici – développement économique oblige – se vantaient de payer quelques centimes le kilowattheure, soit nettement moins que les clients résidentiels.

Les choses ont changé : à force de nous débarrasser de notre hydroélectricité, nous mourons désormais de faim. La réalité est plus complexe mais l’essentiel demeure : à moins de construire de nouveaux grands barrages, il faudra se résoudre à consommer moins et à payer plus un jour ou l’autre. C’est aussi la mesure écologique à adopter.

Ce jour approche à grands pas. Pendant ce temps, on se creuse la tête à Hydro et au cabinet du ministre de l’Économie Pierre Fitzgibbon pour trouver des solutions qui ne feraient pas trop de mal aux Québécois.

Le ministre de l’Économie Pierre Fitzgibbon. (Érick Labbé/Archives Le Soleil)

J’ai été choqué en entendant une des idées proposées, tout droit sorties du manuel du parfait socialiste, à savoir taxer les riches. Imposer des tarifs plus élevés pour les grandes maisons, dites maisons imposantes pour emprunter le vocabulaire de la société d’État dirigée par Michael Sabia.

À l’image de Québec solidaire qui voulait surtaxer les gros véhicules, la fameuse taxe orange (un bon mot de François Legault qui en manque souvent).

La riche saison de chasse est ouverte. Le bal a commencé avec l’augmentation du taux d’imposition des plus-values, une mesure qui sent bon l’équité et la justice jusqu’à ce qu’on se rende compte qu’elle pénalisera non seulement les riches, mais aussi les petits propriétaires dont la maison est la promesse de revenus pour leurs vieillesses quand il est vendu et aux petits investisseurs qui font preuve de prudence financière.

Petits côtés liberticides

Dans le cas d’Hydro-Québec, la surcharge des grandes maisons présente des aspects liberticides – peut-on choisir la maison qui nous convient sans l’intervention « morale » de l’État, ce qui soulève des questions non seulement éthiques, mais pratiques. A ce stade, il ne s’agit plus de facturation mais de taxation.

Cela me rappelle les politiciens qui tentent de déterminer qui appartient à la classe moyenne. Ce revenu varie de 50 000 $ par année à 100 000 $, ce qui fait sourciller de nombreuses personnes dans une province où le revenu médian est de 73 700 $ par année, selon Statistique Canada (données de 2020).

Qu’est-ce qu’une grande résidence en 2024 ? Un château à Westmount, un grand bungalow des années 60 dans une banlieue cossue ? Une maison de joueurs de hockey ? Un condo de 3000 pieds carrés ? Un immeuble à appartements est-il admissible?

Bref, qui décidera de ce qu’est une grande maison et selon quels critères ? D’autant plus qu’Hydro-Québec a intérêt à inclure le plus de résidences possible dans cette catégorie. Sinon, que vaut l’exercice ?

Je ne vis pas dans une grande maison – environ 1 800 pieds carrés – mais je trouve cette mesure absolument méprisable. C’est une taxe punitive. Vous avez réussi, vous avez une maison plus « imposante » que la moyenne, payez maintenant. Tu aurais dû rester dans ton quatre et demi.

Oui, mais diront ces propriétaires, nous payons déjà plus cher à cause de la taille de notre maison, de notre piscine creusée et de notre spa luxueux avec bar et télévision et petites lumières blanches qui scintillent dans la nuit. Oui, mais, répond l’entreprise publique, tous les clients résidentiels paient le même tarif. L’idée est de surfacturer, d’imposer un tarif plus élevé que celui du voisin qui se contente d’une maison dite de taille normale.

Le plaisir de l’un, c’est de voir l’autre payer davantage, pour paraphraser Félix Leclerc.

Or, Hydro-Québec l’a peut-être oublié, mais tous les clients résidentiels ne paient pas le même tarif. Il existe deux niveaux distincts : au-delà d’une certaine consommation, le prix augmente.

Hydro-Québec, créatrice de cette mesure qui pourrait être considérée comme discriminatoire, ne précise pas ce qu’est une maison imposante. Qui va le faire ? Une famille de cinq enfants — oui, cela existe — qui a besoin de plus d’espace qu’un couple sans enfants serait-elle pénalisée ? Va-t-on dire aux parents de « mettre deux enfants par chambre », de « vivre moins confortablement » ?

Contrairement à Québec solidaire qui a payé cher sa taxe orange lors des dernières élections, Hydro-Québec n’est soumise à aucun plébiscite. Elle a carte blanche. Son seul changement est le ministre Fitzgibbon. Le même qui pense que les Québécois devraient se lever au milieu de la nuit pour faire fonctionner le lave-vaisselle.

Payer plus

Nous consommons beaucoup d’électricité au Québec. On nous dit depuis de nombreuses lunes que nous avons de la chance de disposer de cette électricité bon marché. Faut-il s’étonner que nous l’utilisions généreusement ? Les habitudes sont difficiles à changer. Pour y arriver, tout le monde devra payer plus, quitte à accorder des réductions aux moins aisés. C’est la seule solution. Tout le reste n’est que frime. Demi-mesures.

J’habite en Ontario, dans l’Est francophone. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque je suis arrivé ici de constater que les coûts de l’électricité doublent au Québec. Puis-je vous dire que nous avons évolué vers l’efficacité énergétique en peu de temps ?

Quand le portefeuille pleure, nous obéissons.

Nous prenons en compte des tarifs dynamiques qui augmentent en période de pointe. Vous ne me verrez pas faire ma lessive à l’heure du souper lorsque les tarifs sont plus élevés. J’attends à 21 heures (pas au milieu de la nuit) et je ne suis pas plus mal loti.

(Comment se fait-il d’ailleurs que le Québec hésite encore à imposer des tarifs dynamiques alors qu’ils font partie de la solution énergétique dans d’autres provinces et ailleurs dans le monde ?)

Oui à l’efficacité énergétique, non aux mesures punitives. Tout le monde devra payer plus un jour. Y compris les entreprises « imposantes ». L’augmentation des tarifs doit s’appliquer à tout le monde, avec une aide pour ceux qui ont de faibles revenus.

C’est la seule solution équitable.

Sinon, que verra-t-on ? Les inspecteurs d’Hydro-Québec qui mesurent la taille des chambres, qui comptent les piscines hors terre et les spas dans les cours de banlieue ?

Cette idée de surfacturer des maisons dites « imposantes » est complètement ridicule. Un peu sérieux messieurs Sabia et Fitzgibbon. Ayez le courage de vos convictions et augmentez les prix pour tous tout en aidant les plus démunis. D’ici là, rangez votre ruban à mesurer.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

NEXT Prix ​​du gaz, démarque inconnue, nouveau plan d’économies… Ce qui change au 1er juillet