Dans le Lot-et-Garonne, la justice va devoir démêler le vrai du faux. Tout en reconnaissant des « mensonges » au cours de l’enquête, une mère accusée d’avoir tué ses jeunes filles lourdement handicapées a soutenu mercredi devant le tribunal que les deux jeunes filles, portées disparues depuis 2016, étaient « toujours en vie ».
Les deux adolescents, alors âgés de 12 et 13 ans et nés avec des malformations, ont été vus pour la dernière fois le 7 décembre 2016 à l’institut spécialisé de Tonneins, où ils ont été pris en charge.
” J’ai des nouvelles “
« Je maintiens, je le martèle haut et fort, ils sont toujours en vie. J’ai des nouvelles”, a déclaré au tribunal d’Agen leur mère Naïma Bel Allam, qui affirme ne pas les avoir vus “depuis mars 2017”.
Cette ex-comptable d’origine marocaine, qui paraît libre pour « homicide volontaire aggravé », a néanmoins reconnu avoir changé de version par méfiance à l’égard des autorités et crainte de placer ses filles « sous tutelle », admettant qu’il y avait « la vérité mais aussi mensonges”. Elle a notamment expliqué avoir confié ses filles à un couple marocain sur une aire d’autoroute en Espagne, une version démentie par les enquêteurs.
A l’audience, la quinquagénaire a cette fois affirmé les avoir confiés à un « groupe d’amis » qu’elle a rencontré en 2015 au Maroc. “Je ne veux pas donner leurs noms pour que (ces personnes) ne soient pas inquiétées par la justice”, a-t-elle déclaré, s’emportant sous la pression de questions, fustigeant une instruction “incriminante”.
Un « mécanisme de défense, le déni »
Un expert psychiatre a décrit devant le tribunal une femme ayant « une attitude instable et hostile à l’égard de l’ensemble du processus de justice », souffrant d’une « détresse » liée à l’opposition de sa famille à son union avec un cousin germain. Son mari, qui l’a ensuite quittée, est partie civile au procès. Cet expert évoque, entre autres hypothèses, celle d’une femme capable de « se convaincre ». «C’est un mécanisme de défense, de déni», analyse-t-elle.
Poursuivie d’abord pour « abandon de mineurs » et incarcérée de septembre 2017 à novembre 2021, Naïma Bel Allam a vu sa mise en examen reclassée en janvier 2018, après la découverte d’une tache « brunâtre » au domicile de Nérac présentant l’ADN d’une de ses filles. Interrogé mercredi sur un nettoyage en profondeur, avec sept produits différents, de cette tache, l’accusé a répondu d’une manière confuse : “Quand je nettoie, je le fais à fond”. Le verdict est attendu ce jeudi.