Une vue montre le logo Gazprom installé sur le toit d’un immeuble à Saint-Pétersbourg
par Pavel Polityuk, Vladimir Soldatkin et Nina Chestney
La Russie a informé l’Autriche de la suspension de ses livraisons de gaz à partir de samedi, ce qui devrait entraîner la fermeture rapide de la dernière route du gaz russe vers l’Europe.
Cette décision signifie que la Russie ne fournira désormais que la Hongrie et la Slovaquie, bien loin de la domination qui lui permettait de couvrir 40 % des besoins en gaz de l’Union européenne (UE) avant son invasion à grande échelle de l’Ukraine en février 2022.
Le chancelier autrichien Karl Nehammer a voulu rassurer ses concitoyens sur les capacités de son pays, affirmant qu’aucune maison ne serait privée de chauffage.
“Quelque chose que l’on attendait depuis longtemps, depuis le début de la guerre en Ukraine, s’est produit et nous nous sommes préparés à faire face à cette situation”, a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse, précisant que les capacités gazières autrichiennes étaient pleines à 93 %. .
L’Autriche a été le premier pays d’Europe occidentale à acheter du gaz russe en 1968, quelques mois avant l’intervention de l’URSS en Tchécoslovaquie.
Dans une note publiée sur le site de la plateforme gazière d’Europe centrale, la société gazière autrichienne OMV a indiqué avoir été informée par son homologue russe Gazprom de la fin des livraisons de gaz à partir de samedi.
Gazprom n’a pas répondu à une demande de commentaire.
L’arrêt des livraisons de gaz fait suite à un différend entre les deux sociétés.
L’Autriche est l’un des seuls pays européens encore dépendants de la Russie pour son approvisionnement en gaz, la plupart des autres États du continent ayant déjà réduit leurs importations après la guerre en Ukraine, se tournant vers les États-Unis, la Norvège et le Qatar.
OMV s’est dite prête à affronter la fin des approvisionnements en gaz russe et a voulu rassurer sur sa capacité à livrer du gaz à ses clients via des gazoducs en provenance d’Allemagne, d’Italie et des Pays-Bas.
“Nous pensons toujours que cela aggravera la crise énergétique en Autriche, qui a provoqué une baisse significative de la demande de gaz et affecté le secteur manufacturier”, ont commenté les analystes d’Eurointelligence.
Cette annonce intervient alors que le président russe Vladimir Poutine s’est entretenu par téléphone avec le chancelier allemand Olaf Scholz, une première depuis décembre 2022.
Avant le conflit en Ukraine, l’Allemagne était particulièrement dépendante du gaz russe.
La Russie s’est déclarée prête à entamer des négociations énergétiques si Berlin manifestait son intérêt, selon le Kremlin.
“Il a été souligné que la Russie a toujours respecté strictement les traités et ses obligations contractuelles dans le secteur énergétique et qu’elle est prête à une coopération mutuellement avantageuse si la partie allemande manifeste son intérêt”, a déclaré le Kremlin.
La Russie a livré quelque 15 milliards de mètres cubes de gaz via l’Ukraine en 2023, ce qui ne représente que 8 % des flux de gaz russe transitant vers l’Europe via diverses routes en 2018-2019, soit le pic des livraisons russes, selon les données compilées par Reuters.
Les livraisons de gaz russe vers l’Europe via l’Ukraine pourraient s’arrêter le 1er janvier 2025, Kiev refusant de renégocier l’accord conclu pour cinq ans.
(Pavel Polityuk, Yuliia Dysa, Thomas Seythal et Vladimir Soldatkin, Kate Abnett, Zhifan Liu pour la version française)