« En France, les revenus du capital sont-ils vraiment un paradis fiscal ? – .

« En France, les revenus du capital sont-ils vraiment un paradis fiscal ? – .
« En France, les revenus du capital sont-ils vraiment un paradis fiscal ? – .

FIGAROVOX/TRIBUNE – Impôt sur les sociétés, prélèvement forfaitaire unique, fiscalité immobilière… le directeur de l’association des Contribuables Associés, Benoît Perrin, critique la lourde fiscalité de notre pays. En effet, en France, « un petit capital peut être plus imposé qu’un petit revenu », explique-t-il.

Benoît Perrin est directeur de l’association des Contribuables Associés.


L’un des débats majeurs sur la fiscalité en France consiste à opposer la taxe sur le travail et celle sur le capital. Certains considèrent que les revenus du capital seraient moins imposés que les revenus du travail et qu’un rééquilibrage, sans évidemment réduire la fiscalité du travail, permettrait à la fois de lutter contre les injustices sociales et de financer de nouvelles dépenses publiques. Mais les revenus du capital sont-ils vraiment un paradis fiscal ? Le doute est permis.

Prenons l’exemple du chef d’entreprise, créateur de son entreprise, qui souhaite vivre du fruit de son travail. Remarquons déjà que son capital résulte alors de son travail et qu’il est donc absurde de distinguer les deux. Analysons ensuite comment seront imposés les bénéfices réalisés par son entreprise et combien il lui restera une fois l’impôt payé. Tout d’abord, l’entreprise devra payer un impôt sur les sociétés au taux de 25 % (sauf un taux de 15 % jusqu’à 42 500 € de bénéfice). Si le bénéfice est de 100, le chef d’entreprise ne peut donc en distribuer que 75 au titre de ses droits au capital de son entreprise. S’il distribue ce bénéfice net, il devra s’acquitter du prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30 %, autrement dit, il lui restera 75 x 70 %, soit 52,5. Autrement dit, un chef d’entreprise paie 47,5% d’impôt avant de commencer à vivre du capital de son travail. Sans oublier qu’il lui reste à constituer sa couverture sociale et que la cotisation exceptionnelle de 3 ou 4% reste due pour les revenus les plus élevés.

On le voit, l’argument souvent avancé selon lequel les revenus du capital ne seraient soumis au PFU qu’au taux de 30 % est loin d’être exact. D’autant que le créateur d’entreprise qui prend des risques n’est jamais sûr de gagner. Or, si l’État est certain de gagner l’impôt en cas de réussite de l’entrepreneur, il est également certain de ne rien perdre en cas d’échec. Il s’agit d’une véritable injustice qu’il convient de garder à l’esprit avant de s’attaquer à la taxation dite injuste du capital.

Opposer le capital au travail et par conséquent leur taxation résulte donc d’une vision simpliste qui ne fait qu’obscurcir la taxation excessive de toutes les activités.

Benoît Perrin

Quant au simple actionnaire capitaliste, les dividendes qu’il perçoit au titre de ses droits dans la société sont également calculés pour lui sur un bénéfice net d’impôt sur les sociétés. Même s’il n’a apporté que du capital et non son travail, les revenus de son capital sont donc également déduits de l’impôt sur les sociétés. Par ailleurs, lorsqu’il revend ses titres, si la plus-value qu’il réalise est à nouveau soumise au fameux PFU de 30 % censé constituer un taux préférentiel, le taux réel est bien plus élevé s’il a investi en durée dans la société. En effet, la plus-value imposable ne tient plus compte de la durée de détention et l’impôt repose donc réellement sur la différence entre le prix de vente des titres et le prix investi dans l’entreprise. Il n’est absolument pas tenu compte de l’inflation et de l’érosion monétaire qui réduisent le gain réel de l’investisseur. Supposons qu’un épargnant paie 100 dans une entreprise, conserve ses actions pendant dix ans puis les revende pour 200 lorsque ses 100 sont devenus 150 avec l’inflation. Autrement dit, il aura payé un impôt de 30 pour une plus-value réelle de 50, soit un taux d’imposition de 60 %.

En réalité, on constate que le PFU de 30 % souhaité par le président Emmanuel Macron sur les revenus du capital ne profite en réalité ni au chef d’entreprise qui souhaite vivre de l’entreprise qu’il a créée, ni à l’investisseur particulièrement long terme. Les seuls bénéficiaires effectifs du PFU sont les spéculateurs à court terme qui n’investissent que pour un profit immédiat. Opposer le capital au travail et par conséquent leur taxation résulte donc d’une vision simpliste qui ne fait qu’obscurcir la taxation excessive de toutes les activités.

Enfin, on ne peut ignorer que le capital n’est pas seulement financier mais aussi immobilier. Or, la fiscalité immobilière est aujourd’hui encore plus lourde que celle du travail. Et certains ménages à faible revenu souffrent également. Un ménage de retraités non imposables qui complète sa modeste pension par le loyer d’un studio remboursé par les fruits de son travail sera peut-être exonéré de la contribution sociale généralisée et de la contribution au remboursement de la dette sociale (CSG-CRDS) sur son pension mais devra dans tous les cas payer 17,2% de cotisations sociales sur le loyer du studio. Cela montre qu’un petit capital peut être davantage imposé qu’un petit revenu.

 
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