Un an et demi après le suicide de Lindsay, 13 ans, victime de harcèlement scolaire, la question de la responsabilité du directeur de l’école se pose.
En cause, une lettre d’adieu dont l’enquête a révélé qu’elle avait été écrite par sa meilleure amie, Maëlys.
L’adolescent s’est exprimé ce dimanche dans un reportage exclusif de “Sept à quatre”.
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Colère et émotion après le suicide de Lindsay, victime d’intimidation à l’école
“Si vous lisez cette lettre, c’est que je suis sûrement parti (…) Je ne supportais plus les insultes matin et soir, les moqueries, les menaces”. Il y a un an et demi, cette lettre d’adieu, signée par Lindsay, 13 ans, victime de harcèlement scolaire, choquait la France. Cette missive désignait un responsable, le directeur du collège dans lequel l’adolescente avait été scolarisée : “Je ne pouvais même pas me confier au réalisateur, car il ne voulait rien entendre”.
Mais aujourd’hui, l’enquête révèle que cet appel à l’aide, écrit trois mois avant son suicide, n’a pas été écrit par Lindsay, mais par sa meilleure amie, Maëlys. Elle se confie dans le reportage du magazine “Sept à Huit”, diffusé ce dimanche sur TF1, à retrouver en tête de cet article. « Elle m’a dit de ne dire à personne que c’était moi qui avais écrit cette lettre. C’est peut-être écrit de ma main, mais ce ne sont pas mes mots. Elle m’a dit une phrase et je l’ai copiée”assure-t-elle.
Expertise graphologique
Le 12 mai 2023, en fin de journée, Lindsay a été retrouvée pendue dans sa chambre. Depuis plusieurs mois, elle dit avoir été victime de harcèlement de la part d’un groupe de jeunes filles de son collège, à Vendin-le-Vieil, dans le Pas-de-Calais. Trois mois avant son acte fatal, la mère de Lindsay a porté plainte contre trois écolières. Elle adresse également un dossier aux services académiques dans lequel figurent des certificats médicaux attestant des coups et blessures sur Lindsay, ainsi que la fameuse lettre d’adieu. Un appel à l’aide que son beau-père aurait trouvé sous le matelas de l’adolescente. Effort inutile. Lindsay met fin à ses jours. Après son suicide, une information judiciaire a été ouverte au tribunal de Béthune. Quatre écolières sont mises en examen pour harcèlement ayant conduit au suicide. Le proviseur est placé sous le statut de témoin assisté.
Au cours de l’enquête, plusieurs écolières ont été interrogées. L’une d’elles a exprimé ses doutes quant à la lettre d’adieu de Lindsay, comme l’a raconté Maître Frank Berton, l’avocat du directeur du collège. « Ce camarade vient dire : « Cela me semble curieux. Ce n’est pas sa façon d’écrire, ce n’est pas son écriture. Ce n’est même pas la même façon qu’on écrit celui de Maëlys. Alors le juge d’instruction, clairement alerté, ordonnera une expertise graphologique. Ce qui est présenté comme la note de suicide de Lindsay n’est pas du tout écrit de sa main. Et l’expert va plus loin en donnant le nom de l’éditeur et dit : «C’est Maëlys, son amie, qui a écrit cette lettre», précise-t-il.
J’ai écrit ce qu’elle m’a dit de dire. Parfois, elle pensait à des phrases. Mais je n’ai rien écrit tout seul.
Maëlys, la meilleure amie de Lindsay
Maëlys l’explique aux côtés de sa mère devant la caméra de TF1. « Lindsay me parle de cette lettre. Elle m’explique qu’elle avait écrit une note de suicide. Que son beau-père l’avait trouvé sous son matelas”dit-elle, avant que sa mère ne continue : “Et puis ils ont eu une discussion avec Lindsay et Lindsay a déchiré cette lettre.”. Betty, la mère de Lindsay, demande alors à sa fille de réécrire la lettre. Ce jour-là, Maëlys était présente. « Betty, on peut lire : “Il faut que tu réécrives cette lettre pour l’envoyer à l’académie pour qu’elle t’aide”, poursuit la maman de Maëlys.
La jeune fille ajoute : « Elle a commencé à essayer de réécrire cette lettre, mais réécrire une lettre mot pour mot, notamment sur le suicide, était compliqué. Elle pleurait. C’est à ce moment-là qu’elle m’a demandé si je pouvais rédiger cette lettre. Donc je ne savais pas vraiment comment réagir à ça. Je préférais avoir une discussion avec elle d’abord, mais j’avais besoin qu’elle me promette que plus tard, elle ne ferait rien de stupide. rien du tout. Alors j’ai dit. ‘oui’ pour écrire cette lettre. J’ai écrit ce qu’elle m’a dit de dire. Parfois, elle pensait à des phrases. Mais je n’ai rien écrit tout seul. Je n’en ai parlé à personne.explique-t-elle.
Selon Maëlys, Lindsay n’avait qu’un objectif : cibler le directeur du collège. « En fait, elle voulait à tout prix faire savoir que le proviseur ne nous aidait pas, qu’il n’avait pas son rôle de proviseur. Qu’il ne savait pas gérer parfaitement un collège parce qu’il laissait des choses comme ça arriver, alors que ce n’était pas normal. Alors, elle voulait à tout prix faire passer ce message. explique Maëlys pour justifier son action.
« Une erreur de jugement »
Selon l’avocat de la mère de Lindsay, Maître Pierre Debuisson, elle n’a pas remarqué que cette lettre n’était pas de la main de sa fille. “Tout d’abord, il semble que l’écriture de Maëlys et Lindsay soit extrêmement proche, surtout au moment où cette lettre a été remise, il est évident que Betty était dans un état psychologique tellement fragile par rapport au harcèlement dont sa fille a été victime. victime. (…) qu’elle n’était pas capable de distinguer la lettre de sa fille d’une autre lettre dont l’écriture était extrêmement similaire »il décide. Et pour continuer : “Ce qui est sûr, c’est que le contenu de cette lettre concorde parfaitement avec toutes les déclarations qui ont pu être faites par Lindsay, verbalement, mais aussi par écrit, notamment par rapport à une plainte qui a été déposée à la police (…). « , le fait qu’elle n’ait pas été à l’origine de cette lettre ne pose aucune difficulté et surtout ne remet pas du tout en cause le harcèlement scolaire dont elle a subi les conséquences pendant près de six mois », insiste-t-il.
Ce n’est qu’en février dernier, lors d’un rendez-vous chez le médecin, en présence de sa mère et de celle de Lindsay, que Maëlys aurait reconnu avoir écrit la lettre. «C’est à ce moment-là qu’elle nous a expliqué à quoi ressemblait Lindsay. Que Lindsay était incapable d’écrire, que c’était déjà dur d’avoir écrit cette première lettre et qu’elle devait en écrire une deuxième, donc c’était “C’était dur pour Maëlys, si elle l’a fait, c’était justement pour aider Lindsay.”souligne la maman de Maëlys. Outre la lettre, un autre élément pointe la responsabilité du proviseur : un rapport de l’Inspection générale du ministère de l’Éducation nationale, rédigé en juillet 2023, soit deux mois après le suicide. Ce document que Sept à Huit révèle en exclusivité est sans équivoque. «Le directeur s’est engagé une erreur de jugement du dossier conduisant à une réponse inadaptée », pouvons-nous lire.
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Selon ce rapport, le conflit que le directeur a eu avec la famille de Lindsay lui a fait sous-estimer la portée de l’affaire et remettre en question l’intention de la jeune fille de mettre fin à ses jours. « Les investigations que nous avons demandées ont révélé des manquements très graves, avec de graves erreurs de la part de ce proviseur. (…) Et c’est aussi tout à fait révélateur d’un état d’esprit particulier de l’Éducation nationale qui préfère muter et peut-être promouvoir les gens qui commettent des erreurs plutôt que de simplement les licencier. Je trouve inacceptable que le directeur du collège soit directeur d’un nouveau collège. » avance Maître Debuisson, l’avocat de la mère de Lindsay.
Mais pour Franck Berton, l’avocat du proviseur, “on ne peut pas lui reprocher de ne pas avoir écouté.” “En tout cas, ce n’est pas quelque chose qui a été pointé du doigt comme étant une faute grave, une faute vraiment suffisamment grave pour que cet homme soit impliqué à la fois sur le plan judiciaire, mais aussi sur le plan administratif”ajoute-t-il. Au-delà du principal, le rapport académique dénonce la défaillance de toute la chaîne d’alerte anti-harcèlement, notamment de la commission départementale en charge de la question, qui a examiné le dossier de Lindsay un mois avant son suicide. Les points de contrôle “une sous-estimation de plusieurs éléments du dossier entraînant une erreur d’appréciation”et l’affaire a finalement été classée en avril 2023.
Par ailleurs, l’inspection académique, tout comme l’information judiciaire, révèle un autre élément qui aurait pu jouer le rôle d’élément déclencheur dans le suicide de l’adolescente. Une rumeur relayée sur les réseaux sociaux affirmant qu’elle aurait filmé des vidéos d’elle nue. Cette rumeur totalement infondée aurait été lancée par son ex-compagnon, comme l’explique le reportage de “Sept à Huit” à retrouver intégralement en tête de cet article.