La guerre à Gaza transforme-t-elle définitivement Israël en un État paria ? – .

La guerre à Gaza transforme-t-elle définitivement Israël en un État paria ? – .
La guerre à Gaza transforme-t-elle définitivement Israël en un État paria ? – .

Si Israël se demandait encore s’il allait se retrouver mis au ban de la guerre à Gaza, le procureur de la Cour pénale internationale, Karim Khan, lui a offert lundi une réponse très claire. [20 mai]en appelant à un mandat d’arrêt international contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ministre de la Défense Yoav Gallant.

Le fait que des mandats d’arrêt soient également requis contre les dirigeants du Hamas Yahya Sinwar, Ismail Haniyeh et Mohammed Deif n’est guère une consolation pour Israël, qui se trouve au même niveau qu’une organisation terroriste. Et surtout, ces mandats d’arrêt auront des conséquences bien plus graves pour l’État juif.

Israël n’est pas un pays isolé et est parfaitement intégré au reste du monde grâce au commerce, aux investisseurs et au tourisme, mais aussi grâce à ses liens culturels, universitaires et scientifiques. Un mandat d’arrêt de la CPI n’entraverait pas seulement les déplacements de Netanyahu à l’étranger, mais il jetterait une ombre sur l’ensemble du pays. Israël serait la première démocratie occidentale à connaître le déshonneur d’avoir à sa tête un fugitif cherchant à échapper au droit international.

Le cas de la CPI résume à lui seul les défis auxquels Israël est confronté après près de huit mois de guerre à Gaza. Cette guerre suscite de plus en plus la désapprobation de la communauté internationale. Et ces critiques ont suscité une grande mobilisation dans une bonne partie de l’Occident afin d’isoler Israël, sinon économiquement, du moins psychologiquement et moralement à travers un boycott académique et artistique.

Les mandats d’arrêt de la CPI permettront-ils à ce mouvement anti-israélien d’élargir davantage sa base et de se renforcer ? L’opinion publique va-t-elle se détourner irrémédiablement d’Israël ? Les multinationales et les investisseurs, par exemple, refuseront-ils de travailler avec Israël ? Et les gouvernements imposeront-ils des sanctions économiques ?

Puisqu’il n’y a jamais eu de précédent, il est difficile de répondre à ces questions à l’heure actuelle. Une chose est sûre : les boycotts, même modérés, les sanctions et le possible retrait des investisseurs affaiblissent Israël bien plus que tous les autres pays qui se trouvent dans le collimateur de la CPI.

Défense, économie : un pays dépendant du monde extérieur

Israël est peut-être un pays riche, mais c’est un petit pays, et son marché intérieur ne peut justifier la production nationale de la plupart des produits dont il a besoin, qu’il s’agisse des voitures ou du pétrole qui les alimente. , acier pour la construction ou smartphones. Le commerce extérieur représente 61% de son PIB. Les substitutions aux importations mises en œuvre, avec plus ou moins de succès, par la Russie et l’Iran, deux pays sanctionnés bien plus importants, ne sont pas possibles en Israël. Au cours des dix dernières années, les investissements directs étrangers ont dépassé 4 % du PIB, ce qui est bien au-dessus de la moyenne des pays membres de l’OCDE.

Le secteur de la haute technologie, moteur de la croissance économique israélienne au cours des vingt dernières années et qui est devenu sa marque de fabrique, n’a d’avenir que dans le cadre d’une économie mondialisée. Au cours des trois dernières années, les capitaux étrangers ont représenté les trois quarts des investissements des start-up israéliennes. Les entreprises technologiques israéliennes se concentrent entièrement sur les marchés étrangers et les plus grandes sont cotées à Wall Street.

Lorsque le président américain Joe Biden a menacé, à la mi-mai, de suspendre l’approvisionnement de certaines armes à Israël en cas d’invasion de Rafah, Netanyahu a promis qu’Israël se battrait aux côtés des “clous”.

“Si nous devons être seuls, nous le serons.”

Mais c’est une promesse vide de sens. L’industrie d’armement israélienne est peut-être très vaste et technologiquement sophistiquée, mais elle ne sera jamais en mesure de répondre aux besoins du pays en avions de combat, en sous-marins et en bombes. La guerre contre le Hamas à Gaza, qui nécessite d’énormes quantités de munitions fournies par les États-Unis, ne fait qu’accentuer cette dépendance. Si la confrontation s’étend au Liban contre le Hezbollah, Israël aura besoin d’encore plus d’armes américaines.

Même un boycott économique ou d’armement à petite échelle constituerait une menace sérieuse pour Israël. Mais jusqu’à présent, cela n’a pas été le cas.

Bannissement culturel

En revanche, Israël fait face à des appels au boycott et aux sanctions sur les campus universitaires et dans les cercles artistiques et littéraires. Cependant, malgré l’importante couverture médiatique dont ils ont bénéficié, ces appels n’ont pas été vraiment entendus.

Seules 12 institutions universitaires ont rencontré les dirigeants des mouvements étudiants pro-palestiniens et ont écouté leurs revendications (la fin des partenariats avec des entreprises qui feraient des affaires avec le gouvernement israélien ou son armée). Mais aucune université ne s’est encore engagée de manière ferme et définitive. À moins que les manifestations ne reprennent avec la même vigueur après les vacances d’été et que les obstacles juridiques et institutionnels ne soient surmontés, il est peu probable que ces revendications se concrétisent.

La menace la plus sérieuse vient d’une forme de boycott plus discrète mais bien plus efficace : celui des universitaires, mais aussi des artistes et des auteurs. Le monde universitaire israélien est tout aussi mondialisé que son secteur technologique, et il aura du mal à tenir sa place dans un monde où la recherche est refusée aux publications internationales, où les universitaires se voient refuser les conférences et où l’accès aux bourses est bloqué. Selon certaines estimations, c’est déjà le cas.

Dans le même esprit, certains auteurs israéliens ont été censurés et certains artistes israéliens ont vu leurs performances et expositions annulées. Les artistes et écrivains israéliens ont moins à perdre de ce boycott international, mais le coup psychologique est énorme – d’autant plus que la plupart des artistes israéliens sont très critiques à l’égard de leur gouvernement.

L’opinion mondiale peut bouger

D’un autre côté, il est peu probable que les opposants à Israël réussissent à mobiliser les consommateurs et les entreprises. L’opinion publique n’est pas hostile à Israël. Dans un sondage du Pew Research Center réalisé auprès des Américains en mars dernier, 58 pour cent des personnes interrogées ont déclaré qu’Israël avait des raisons valables de combattre le Hamas. Même lorsque les victimes palestiniennes ont atteint 32 000, selon les chiffres du Hamas, le nombre d’Américains qui ont trouvé la gestion de la guerre par Israël acceptable est resté plus grand que ceux qui l’ont trouvée inacceptable.

Mais surtout, parmi les Américains âgés de 50 ans et plus – la tranche d’âge la plus susceptible de siéger dans des conseils d’administration universitaires ou d’occuper des postes de direction dans des entreprises – le soutien à la guerre menée par Israël était bien plus élevé que parmi l’ensemble des personnes interrogées (78 % contre 67 %).

Il est trop tôt pour dire si la réquisition d’un mandat d’arrêt entraînera un changement dans l’opinion publique. Mais cela renforcera certainement les sentiments pro-palestiniens et anti-israéliens qui existent déjà dans certaines communautés et galvanisera leur ferveur morale.

Ce qui est possible – mais encore une fois, il est trop tôt pour le dire – c’est que certaines entreprises soient réticentes à faire des affaires avec Israël. Mais ce sont les sanctions officielles qui poseront le plus de problèmes. Les gouvernements – et en particulier le gouvernement américain, avec sa capacité à utiliser le dollar pour imposer sa volonté au monde – détiennent le pouvoir d’imposer et de faire appliquer des mesures coercitives.

Pour le moment, Israël n’a encore aucune raison de s’inquiéter. La réaction européenne à l’annonce de Khan a été mitigée mais pas enthousiaste, et l’administration Biden a dénoncé les mandats d’arrêt visant les dirigeants israéliens.

La balle est dans le camp d’Israël

Les perspectives à long terme pour Israël sont moins roses. Parmi les jeunes Américains âgés de 18 à 29 ans, le soutien à Israël est beaucoup plus tiède. Plus de gens ont une opinion plus favorable des Palestiniens que des Israéliens. Si les jeunes conservent ce point de vue à mesure qu’ils vieillissent et accèdent à des postes de pouvoir et d’influence (et en supposant que la dynamique israélo-palestinienne reste inchangée), Israël pourrait connaître des temps difficiles.

La balle est donc dans le camp d’Israël. Le pays a une chance de se racheter. Malheureusement, le gouvernement israélien actuel n’a ni la volonté ni la capacité de le faire. Il est coincé par sa composante d’extrême droite qui définit ses priorités. Et pour l’aile ultranationaliste, l’opinion du reste du monde est tout à fait accessoire.

Sans changement de gouvernement, Israël se retrouvera ostracisé parmi les nations sans même avoir tenté de l’éviter.

 
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