Après le tandem JA-FDSEA 36 qui a reçu, mercredi 16 octobre, le numéro 2 de la FNSEA, la Coordination rurale de l’Indre a également accueilli un responsable de son syndicat, jeudi 17 octobre, dans le cadre de la campagne des élections à la Chambre d’agriculture, prévues à Janvier 2025.
Et pas n’importe laquelle puisque c’est la présidente nationale elle-même, Véronique Le Floc’h, qui, lors d’une tournée dans neuf départements, a fait un détour par la ferme d’un jeune de 27 ans, Cyprien Royauté, à Prissac, pour une soirée d’échanges avec les membres et sympathisants locaux. Entretien.
Pourquoi venir en Indre ?
« Le terrain est ce qui se traduit le mieux au niveau national. Et c’est aussi ce qu’attend le ministère de l’Agriculture, auquel je peux signaler des dysfonctionnements. Et l’Indre c’est parce que c’est un département central, mixte, avec beaucoup de cultures, de bio, d’irrigation, des problèmes de prix cette année et des excès d’eau… »
Vous avez annoncé que l’Indre, où la FDSEA est longtemps majoritaire, fait partie des départements que vous pensez pouvoir gagner aux prochaines élections à la Chambre d’agriculture en janvier. Qu’est-ce qui te fait penser ça ?
« Ici, les élus du CR sont réels, parlent avec leur cœur et leur expérience. Nous ne savons pas ce que les agriculteurs mettent dans les urnes et aujourd’hui, le soutien qu’ils nous apportent montre que les gens s’intéressent à nous. »
“Nous voulons un vrai calendrier et des engagements écrits”
Qu’est-ce qui vous distingue fondamentalement de la FNSEA ?
«Le modèle. Notre modèle, c’est une France avec 400 000 exploitations demain. Celle de la FNSEA est celle qui a vu disparaître 100 000 exploitations et un million de vaches ces dix dernières années, et cela va s’accélérer si rien n’est fait, avec des départs à la retraite. Nous voulons rompre avec toute cette domination économique que valide la FNSEA. Elle repose encore sur un modèle qui fonctionne en partie pour l’export, donc pour l’industrie. Mais aujourd’hui, la souveraineté alimentaire de la France est perdue. Notre pays avait une balance commerciale excédentaire de 4,9 milliards d’euros dans ses échanges intra-européens en 2014. Dix ans plus tard, il est négatif de 2,6 milliards ! Cela signifie que cette politique n’est pas la bonne. »
Près d’un an après le mouvement de contestation que votre syndicat a lancé dans le Sud-Ouest, qu’en reste-t-il aujourd’hui ?
« Cela s’est amplifié. Les retours ne sont pas au rendez-vous. Les résultats sont catastrophiques pour les céréaliers et les viticulteurs. Rien n’est résolu pour les agriculteurs bio… Nous avons souligné que les minima qui nous limitent à 20 000 € d’aide sur trois ans étaient insuffisants pour certaines exploitations qui auraient pu prétendre à bien plus. Nous avons relancé mercredi le cabinet du ministre à ce sujet (16 octobre 2024) pour lui demander où il se trouve. Et pour nous, ce n’est pas 50 000 € sur trois ans que nous voulons, c’est 50 000 € par exploitation rien que pour 2024, pour sauver le plus d’exploitations possible ! C’est possible, puisque nous l’avons obtenu en 2010 ! En résumé, nous souhaitons le retour de la valeur et un écosystème où chacun gagne sa vie. »
Mais comment encourager l’installation de nouveaux agriculteurs ?
« La France est déjà l’un des seuls pays où les droits de mutation sur nos exploitations sont prohibitifs. Comment vouloir la transmettre à un enfant ou à un tiers quand on doit renoncer à un billet de 100 000 € ou 200 000 € ? Nous paierons le prix de l’exploitation lorsqu’elle aura été payée sur trois ou quatre générations ! Tout ce que nous demandons, c’est du bon sens pour que nos exploitations restent entre les mains de vrais agriculteurs… Dans le modèle défendu par la FNSEA, si elles passaient entre les mains des coopératives et des financiers, ils quitteraient l’agriculture ! Ils serviraient à la chasse, à la nature, à tout ce que vous voudrez, mais il n’y aura plus de production locale ! »
Comment se passent les premiers échanges avec la nouvelle ministre de l’Agriculture, Annie Genevard ?
« Ils sont plutôt rassurants. Nous lui avons dit “Nous voulons bien travailler avec vous, mais nous aimerions plus de transparence que ce que nous avions avec Marc Fesneau car vous n’avez plus notre confiance”. Dès le début, j’ai demandé l’assurance que les jeunes pourraient bénéficier des deux milliards d’euros de prêts garantis par l’État, dont 400 millions d’euros pour l’élevage. Le gouvernement a changé et j’ai eu ma réponse la semaine dernière : les prêts garantis arriveront au premier trimestre 2025. C’est ce que nous voulons : qu’il y ait non seulement des annonces pour calmer les agriculteurs sur le terrain, mais aussi un vrai calendrier et des engagements écrits. . »
En présence de l’élue RN Mylène Wunsch
Le rendez-vous de campagne de la Coordination rurale du jeudi 17 octobre 2024 à Prissac s’est déroulé en présence de l’élue du Rassemblement national (RN) Mylène Wunsch, venue en qualité de conseillère régionale. « Je n’ai pas été invité, mais j’ai vu sur les réseaux sociaux que ce rendez-vous était ouvert à tous, j’ai donc eu envie de m’y rendre pour rencontrer des agriculteurs du département. Mais ce n’était pas du tout une réunion politique”indique le secrétaire départemental du RN.
Interrogée sur des propositions ou des positions du CR qu’elle partagerait, elle précise : « J’ai appris que la FDSEA et la JA avaient également tenu une réunion, mais je n’ai rien vu sur les réseaux, sinon j’aurais fait le même chemin, car j’aime avoir le ressenti des gens de terrain et pas seulement ce qu’on peut entendre sur les chaînes d’information. C’est dommage, car je connais très bien le nouveau manager de JA. » Et en cas de réunion similaire de la Confédération Paysanne ? « J’ai envie d’y aller, mais je risque d’être moins bien accueilli que là-bas… »
Interrogée, Maguelonne de Sèze, présidente du CR 36, confirme que “l’événement était ouvert à tous et diffusé sur les réseaux sociaux”. Elle précise également qu’elle a “a invité tous les parlementaires”. Frédérique Gerbaud « n’a pas pu venir mais était déjà venu à notre rassemblement festif du 14 septembre à Migné ». Nicolas Forissier “n’a pas été invité car il n’était pas dans sa circonscription”unlike François Jolivet and Nadine Bellurot “qui n’a pas pu venir”. Interrogée sur d’éventuels points de concordance avec le RN, elle assure : ” Certainement pas. Notre volonté est de faire connaître notre position sur l’agriculture. Et au niveau national, nous travaillons avec tous les parlementaires qui veulent s’occuper de l’agriculture. Pour nous, c’est très clair : nous n’avons pas de programme politique, juste un programme agricole. »