on lit l’histoire de Thibault de Montaigu

on lit l’histoire de Thibault de Montaigu
on lit l’histoire de Thibault de Montaigu

LLes défunts n’ont jamais tort de revenir. Nous les croyons enterrés mais ils pensent et agissent en nous. Thibault de Montaigu en prend conscience lorsqu’il accède à la demande de son père malade : écrire sur son arrière-grand-père Louis, capitaine des hussards abattu par un obus en 1914, lors d’une charge de cavalerie alors qu’il tentait de sauver un homme coincé. bataillon d’infanterie. Une histoire comme une offrande à ceux qui s’apprêtent à allonger le pas. Et, certainement, une intime nécessité de mieux connaître cet aristocrate sans le sou, séducteur invétéré, qui rêvait de gloire et qui s’est retrouvé dans une maison louée par deux de ses fils.

Un « pèlerinage inversé » initié lorsque son père – une insuffisance cardiaque provoque un œdème des doigts – lui confie sa chevalière, héritée de ce même Louis. Sans qu’il y ait eu un échange de paroles, cette bague scelle un pacte entre les deux hommes : perpétuer l’idylle familiale.

Une longue enquête

D’abord réticent, d’autant qu’il avait un autre projet de livre en tête, Thibault de Montaigu se lance dans une enquête de plusieurs années, fouillant les malles familiales et les archives militaires de Vincennes. Qui restent désespérément silencieux. Seuls un journal local et un manuel de français, publiés à Boston en 1921, mentionnent le fait d’armes du glorieux hussard. Il lui faut absolument élucider le mystère de cette charge, une des dernières de l’histoire de ; la cavalerie de l’époque n’était plus utilisée sur le front car jugée obsolète face aux canons et mitrailleuses. Pour le père de l’auteur, il s’agit d’un « acte inouï et suicidaire, voire suicidaire à bien des égards », comme si Louis avait cherché à mourir en héros sacrificiel en se jetant sous le feu ennemi. Mais n’en révélons pas plus.

Dans des pages lumineuses et émouvantes, on sent accrochés les spectres de toute une lignée. Autant d’âmes transparentes et mobiles qui, dans leurs explosions infinies, intiment l’essentiel au vivant. Thibault de Montaigu drape son récit d’une médiation sur l’héritage immatériel transmis de génération en génération : « Ainsi, chacun de nous est soumis à des lois non écrites, à des loyautés invisibles, remontant à nos ancêtres, qui nous poussent à reproduire, inconsciemment, le passé. comportement ou événements. »

Confidentialité intelligente

Dans un jeu de miroirs, l’histoire de ses ancêtres devient celle de l’écrivain qui s’approprie les noms d’un clan qui s’effacent peu à peu sur les tombes des cimetières. La lourde histoire familiale devient dentelle au fil des évocations. Un voyage vers le passé dans un présent de résurrection : les morts l’ont rendu plus vivant et, sans doute, moins vulnérable.

Voilà un grand livre qui s’affirme singulièrement avec force en cette rentrée littéraire. Dès les premières pages, le lecteur est installé dans une intimité intelligente. Sur la construction des mots peuvent éclore des fleurs dont la beauté vous laisse stupéfait mais jamais seul. C’est la précieuse leçon de cette confession.

« Cœur », de Thibault de Montaigu, éd. Albin Michel, 328 pp., 21,90 €, ebook 15,99 €.

 
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