“Google et Meta, les punks d’hier sont-ils devenus les vieux d’aujourd’hui ?”, Sergine Dupuy (RedPill)

“Google et Meta, les punks d’hier sont-ils devenus les vieux d’aujourd’hui ?”, Sergine Dupuy (RedPill)
“Google et Meta, les punks d’hier sont-ils devenus les vieux d’aujourd’hui ?”, Sergine Dupuy (RedPill)

Aujourd’hui, Internet souffre d’une certaine désaffection. Rien de radical, certes, mais c’est suffisamment rare et structurant pour être analysé. Plus de 60 % des marques aux États-Unis constatent une baisse de la consommation et de la transformation (selon le rapport Contentsquare 2024 Digital Experience Benchmark). Parmi les nombreuses explications, il faut considérer celle d’une expérience Internet laborieuse, voire irritante. L’excès de liens, d’interactions et d’informations fragmentées, autrefois synonymes de liberté et de diversité, rebutent les jeunes générations en quête d’expériences plus simples et fluides. Visiblement moins émerveillés que leurs aînés par le géant monopolistique Google, ils privilégient TikTok et Instagram pour leurs recherches d’informations, les sites ou applications spécialisés (alimentation, films, musique, événements…) dans lesquels leurs pairs s’expriment et inspirent leur confiance, au sein dont les algorithmes et leurs données sous-jacentes tentent de prédire leurs attentes, dans des formats simples, attrayants et personnalisés. Prabhakar Raghavan, vice-président de Google, confirme cette tendance : « Près de 40 % des jeunes recherchent des endroits où déjeuner sur TikTok ou Instagram, plutôt que sur Google. »

Dans le même temps, et c’est là qu’interviennent l’œuf… ou la poule, l’IA générative, encore plus magique qu’Internet ne nous paraissait à sa naissance, explose dans ses usages. Il est parfois difficile de déterminer si c’est l’innovation qui crée de nouvelles attentes ou si ce sont nos attentes qui stimulent l’émergence de cette innovation.

Avec l’IA, la recherche d’informations se transforme

Les courbes habituelles d’adoption des innovations sont alors bousculées comme jamais. ChatGPT a atteint son premier million d’utilisateurs en 5 jours tandis que Netflix a mis 3,5 ans. Grâce à ses évolutions récentes, et bien qu’il ne se positionne pas comme un moteur de recherche, Chat GPT apporte des réponses concises et rapides, sans pour autant noyer les utilisateurs sous une multitude de liens. Des acteurs comme Microsoft avec Copilot accessible depuis Bing, son moteur de recherche, ou encore Google avec son nouveau modèle Gemini AI, investissent massivement dans ces nouvelles expériences de Search.

Tandis que les géants travaillent avec force, les nouveaux, agiles, innovent rapidement et ne sont en aucun cas gênés par leur taille, leur conscience ou le poids du passé. C’est le cas de Perplexity qui a lancé un moteur de recherche génératif à IA, offrant une expérience d’une rare simplicité et d’une transparence remarquable. Ces outils, tout en bouleversant le modèle de recherche traditionnel, soulèvent de nouvelles questions : la simplicité de l’IA générative nous éloignera-t-elle de l’information multi-sources et donc de notre capacité d’analyse ? Parmi les géants ou les nouveaux entrants, lequel sera adopté par les consommateurs et le marché ? Quoi qu’il en soit, la manière dont nous recherchons l’information change profondément. Avec l’IA générative, cela devient plus synthétique, simple, rapide et vertical.

Ce changement de comportement, même s’il touche principalement les jeunes, les cadres et les personnes aisées, annonce un changement profond des modèles économiques fondamentaux d’Internet et de l’ensemble du marché médiatique. Actuellement, les résultats de recherche issus de la recherche payante (SEA) et de la recherche organique et gratuite (SEO) génèrent la majorité de l’audience des sites. Google, qui domine largement ce marché, génère à lui seul entre 60% et 80% du trafic total des sites web grâce au SEO, avec une nette domination du trafic organique par rapport au trafic payant.

Mais pour combien de temps encore ?

Perplexité cite ses quelques sources mais n’a pas encore élaboré de modèle économique. Chat GPT ne cite pas spontanément et systématiquement ses sources (mais le fait volontiers lorsqu’on lui demande). Que suggéreront les autres ? De nombreuses hypothèses et opportunités sont actuellement testées concernant le modèle économique. L’offre sera structurée, comme toujours. Il peut s’agir d’une vidéo ou d’un bloc de texte en « position 0 », de « réponses sponsorisées » ou encore de placements de produits pertinents, mais quoi qu’il en soit, la position préférentielle sera, par définition, rare, car la vertu du modèle d’IA générative dans la recherche n’est justement pas d’aboutir à une pléthore de liens.

En ce moment de l’histoire d’Internet, il est tentant de regarder vers l’avenir et d’assister à un grand saut dans le vide. Passionnant, troublant et quoi que ce soit, incertain. Il reste peu de chemin à parcourir pour voir la fin possible d’un monopole, celui de Google, ou du duopole qu’il forme avec Meta, car ce dernier, en même temps, est fortement menacé par TikTok.

Les champions d’hier, perçus comme punk au sein de notre économie, sont sans aucun doute devenus les nouveaux vieux d’aujourd’hui.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV La livre sterling écrasée par le rouleau compresseur du dollar, les cambistes guettent le discours de M. Reeves
NEXT Le prix et la qualité de l’eau potable dans ces huit communes de la Sarthe sont « irréprochables »