« Une situation inhabituelle »

« Une situation inhabituelle »
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Une promotion Lidl sur ses fruits et légumes fait sursauter les supermarchés concurrents, qui pointent du doigt les méthodes douteuses de hard discount. « Un manque de courtoisie inhabituel » de la part de l’enseigne low-cost, estime un expert du retail. La singularité du secteur « frais » joue un rôle dans la bataille. Car plus qu’ailleurs, les pertes et les marges sont flexibles. De quoi s’inquiéter.

« Chaque jour, les fruits et légumes les plus frais, au prix le plus bas du marché ». Ce slogan issu d’une publicité de Lidl a suffi à déclencher un règlement de compte public entre supermarchés belges. Une situation relativement inhabituelle dans un secteur où, d’habitude, la courtoisie règne entre concurrents.

Dans la dernière brochure de Lidl (24 avril), on peut lire que Colruyt coûte 1,27% plus cher pour ses fruits et légumes, Aldi 6,44% et Carrefour 18,90%. Chez Delhaize (+25,85%) et Albert Heijn (+27,86%), l’écart est encore plus accentué.

Vives réactions des supermarchés concurrents

Cette comparaison a évidemment été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Ça a fait bondir d’autres marques, qui a unanimement dénoncé la méthode de Lidl. Dans le journal De Standaard, Delhaize estime « que les différences de qualité ne sont pas prises en compte lors de la comparaison des produits ». Albert Heijn dit « ne pas reconnaître ses prix » et Aldi dénonce un tableau comparatif déformé. “Ils baissent leurs prix le mardi, jour sur lequel ils basent la comparaison, puis ils les augmentent les autres jours.” Colruyt dénonce le même processus trompeur, qui compare « des kiwis bio avec une version non bio ». Dans la vie de tous les jours, Lidl réagit en réfutant avoir délibérément baissé les prix temporairement. Insuffisant pour éteindre le feu.

La concurrence a-t-elle eu raison de réagir de manière aussi virulente ? “Dans la mesure où Colruyt est un acteur très crédible dans sa quête des meilleurs prix et que Lidl se base sur une promotion d’un jour, oui, la réaction est justifiée”, juge Gino Van Ossel, expert en vente au détail (École de commerce Vlerick). Lidl veut donner l’image qu’il est moins cher que la concurrence. Ce n’est pas illogique : en marketing, on exagère toujours un peu. Mais dans le cas de Lidl, la méthode n’est pas très claire.

Pourquoi les fruits et légumes font-ils l’objet de disputes entre grandes surfaces ?

Pour les produits de marque, c’est simple : un soda est un soda dans n’importe quel supermarché. Pour les fruits et légumes, l’enjeu est de savoir si les produits sont de qualité identique. C’est là que les choses se compliquent : étant donné que les plantes ne sont pour la plupart pas marques non identifiables, les marques ont plus de liberté pour créer une image de qualité. « Pour les magasins Forte remise, cet aspect est encore plus important car le client s’y rend principalement pour des produits de basequi comprend les fruits et légumes », analyse Gino Van Ossel.

Mais ce n’est pas la seule explication. Les fruits et légumes sont le deuxième produit le plus courant sur le ticket de caisse du client moyen, juste derrière le pain. Si les produits frais étaient initialement absents du hard discounters (le client s’y rendait principalement pour des aliments de base et des produits secs), un développement important a eu lieu ces dernières années. Aux Pays-Bas, Lidl a été élu meilleur supermarché de fruits et légumes par les consommateurs. « La raison est simple : le choix est assez limité et la priorité est donnée aux produits qui se vendent souvent. Le chiffre d’affaires est élevé et les produits sont donc plus frais. décrypte Gino Van Ossel.

En essayant de peindre son image sur les fruits et légumes, Lidl espère également inciter la clientèle « secondaire » à venir plusieurs fois dans la semaine. Car, en réalité, très peu de clients utilisent Lidl et Aldi comme magasin « principal » (où sont effectués la plupart de leurs achats). « Colruyt, Carrefour et Delhaize sont les trois principaux magasins des Belges. Le consommateur se rend ensuite dans plusieurs magasins secondaires», distingue Gino Van Ossel. Lidl et Aldi, magasins secondaires, veulent devenir des supermarchés primaires.

Le défi des pertes

La nervosité ambiante peut aussi s’expliquer par le fait que les marges sont nettement plus élevées dans le secteur des fruits et légumes. Avec un enjeu majeur pour les marques : réduire le pourcentage de volume jeté. Ceci est estimé entre 5 et 7%. Un tarif élevé, par rapport aux autres produits : les marchandises sont périssables et, contrairement aux autres, elles sont constamment manipulées par le client (qui n’a jamais touché cinq avocats avant de choisir le plus mûr ?). En limitant le choix et en augmentant la rotation, Lidl tente de réduire autant que possible ces pertes. « Pour les fruits et légumes, l’aspect perte est plus présent que pour tout autre type de produit”, confirme Gino Van Ossel. Enfin, les tensions autour de l’inflation – en baisse – continuent de jouer un rôle. « Le consommateur reste très sensible au niveau des prix. Une situation propice aux bagarres entre marques.

Finalement, « oui », Lidl a essayé de déformer la réalité, décide après réflexion Gino Van Ossel. “C’est une forme de communication inhabituelle ce qu’ils auraient dû éviter et qui n’est pas vraiment conforme à la tradition belge de courtoisie ».

 
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