Cachez cette histoire que nous ne pouvons pas voir ! – .

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« Couvre ce sein que je ne peux pas voir. De tels objets blessent les âmes, ce qui entraîne des pensées pécheresses. » Le Tartuffeacte III, scène 2, Molière.


Publié à 2h05

Mis à jour à 7h00

Si je fais confiance à plusieurs commentateurs, la semaine dernière, le chef du PQ, Paul St-Pierre Plamondon, n’aurait pas dû rappeler aux Québécois certains pans de leur histoire. À une époque qui se veut incroyablement bienveillante, le Québec semble être l’un des rares groupes humains au Canada à être critiqué pour avoir rappelé ses souffrances passées. Le ministre libéral Pablo Rodriguez trouve cela carrément violent. Son collègue François-Philippe Champagne nous encourage à « regarder vers l’avant ». Pour le député néo-démocrate Alexandre Boulerice, la déportation est ancienne. On se souvient que nos souffrances ont même fait vomir la représentante spéciale du Canada chargée de la lutte contre l’islamophobie, Amira Elghawaby.⁠1. Je vous épargnerai ce qui se dit sur les réseaux sociaux au Canada anglais.

Je n’imagine pas tout ce beau monde faire preuve de la même insensibilité envers les nations autochtones, les Métis, tous les anciens colonisés de la Terre, les Japonais emprisonnés pendant la guerre, etc. Mais j’arrête. Je n’aime pas non plus les propos victimaires. Mais j’aime le Québec, et tout comme nos souffrances passées, l’effacement du Québec est une réalité indéniable dont il faut se souvenir.

L’effacement des provinces

Lorsque les provinces se plaignent des empiètements du fédéral dans leurs domaines de compétence, le premier ministre Trudeau leur dit « On s’en fiche » et « Écartez-vous » (taisez-vous). C’est une approche radicale, en profonde contradiction avec le fédéralisme, je dirais une attaque contre la nature même du Canada. L’affaiblissement des provinces est une tendance majeure dans le Canada d’aujourd’hui. Traditionnellement, les conservateurs s’opposaient à ce phénomène. Aujourd’hui, cela dépend des enjeux : logement, pipelines, droit de retrait des provinces et laïcité, le slogan conservateur est le même que celui des libéraux : tais-toi !

Effacement culturel

Il y a quelques décennies, le Canada était défini par le bilinguisme et le biculturalisme. En instituant la doctrine multiculturaliste, l’objectif déclaré de Trudeau père était de faire des Québécois une minorité comme les autres. Aujourd’hui, Trudeau Jr. définit le Canada comme un État post-national, sans culture commune.

On est donc passé, en relativement peu de temps, de la culture québécoise comme l’une des cultures fondatrices du Canada à une culture parmi d’autres, à aucune culture du tout. N’est-ce pas la définition même de l’effacement ?

Effacement linguistique

Depuis la Conquête, le pourcentage de francophones au Canada n’a fait que diminuer. Le Québec est la seule province qui, à une certaine époque, a vu la situation du français s’améliorer… mais la tâche est difficile : chacune de ses lois linguistiques a été systématiquement contestée par l’État fédéral. Au Canada hors Québec, il y a maintenant plus de personnes dont la langue prédominante à la maison est le chinois (mandarin ou cantonais). D’ici quelques années, le pendjabi et le tagalog, deux langues en plein essor, devraient également dépasser le français. Notre langue n’a que 17 anse langue parlée à Toronto⁠2.

La devise du jour La droite, journal fondé par des Franco-Ontariens, dit : « L’avenir appartient à ceux qui luttent ». Dans ce Canada historiquement hostile au français, si les Québécois ou les francophones hors Québec ne se battent pas, ils disparaissent. Le chef du PQ n’a fait que nous le rappeler.

Effacement politique

René Lévesque aimait répéter que l’espace politique québécois s’est dilué au cours de l’histoire canadienne. À l’époque de Lévesque, l’absence de la signature du Québec au bas de la Constitution était un problème grave, une forme de colonialisme. Aujourd’hui, cela n’a absolument aucune importance pour les Canadiens anglais.

Imaginez ce que dirait Lévesque s’il savait que, de nos jours, un parti fédéral n’a même plus besoin du Québec, ni politiquement ni démographiquement, pour être majoritaire ! C’est un effacement politique.

Effacement de la mémoire

Il faut regarder vers l’avant, nous disent les députés Boulerice, Champagne et Rodriguez. A la poubelle, le « je me souviens ». Comme s’il était sain d’oublier le passé, d’oublier ceux qui, avant nous, refusaient de s’effacer.

Toutes les familles dont l’ancêtre était patriote connaissent son nom. Je sais qu’un Jobin a été tué à Batoche, en Saskatchewan, avec les compagnons de Louis Riel. Les habitants de Saint-Jacques de Montcalm célèbrent chaque année le courage de leurs ancêtres acadiens. Plusieurs d’entre nous ont des cousins ​​américains, depuis le million de Québécois contraints de s’exiler aux États-Unis, jusqu’à l’indifférence du Canada anglais. Mon père est allé apporter des livres à un ami emprisonné pendant la crise d’octobre. En 1982, des millions de Québécois partagent l’humiliation et la colère de René Lévesque après la nuit des longs couteaux. On se souvient du mépris de notre loi référendaire en 1995. En 2024, nous sommes solidaires des Acadiens lorsque nous leur crachons au visage que Dieu sauve le roi à la Chambre des communes.

Ce qui est violent, c’est de nous demander d’oublier tout cela.

Oui, notre histoire est dangereuse, elle fait peur à nos adversaires, parce qu’elle le peut, et ils le savent bien, [faire] viennent de pensées coupables » : la pensée d’indépendance, par exemple.

1. Lire la chronique « Notre souffrance la fait vomir »

2. Lire la chronique « La place du français au Canada »

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