Decathlon a réussi son entrée dans le peloton

Decathlon a réussi son entrée dans le peloton
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Le 27 novembre 2023 restera une date importante dans l’histoire de l’équipe de Vincent Lavenu. Ce lundi-là, le patron de l’équipe qui s’appelait encore AG2R-Citroën Team annonçait l’arrivée d’un nouveau sponsor pour cinq ans. Decathlon ferait son entrée dans le peloton professionnel, assurant l’avenir de la formation d’Oliver Naesen, Benoît Cosnefroy et Félix Gall jusqu’en 2028. Le tout avec un budget augmenté.

À l’époque, l’annonce n’a peut-être pas eu tout l’écho qu’elle méritait puisque le monde du cyclisme ne parlait que de l’échec de la fusion entre Jumbo-Visma et Soudal-Quick Step. L’avenir s’est négocié plus sereinement du côté de l’équipe savoyarde, qui a donc pris cet hiver un accent ch’ti puisque Decathlon est aujourd’hui basé à Lille, à quelques kilomètres de Villeneuve-d’Ascq où il est né en 1976.

A l’issue des classiques, les premiers résultats de ce nouveau partenariat sont plutôt flatteurs puisque l’équipe compte déjà dix victoires au compteur, soit une de plus que sur toute la saison 2023.

L’argent, mais pas seulement

Pour autant, les deux recrues stars de l’hiver, rendues possibles par l’augmentation du budget, restent discrètes. Sam Bennett est encore loin du niveau qui lui a permis de remporter dix succès sur des grands tours entre 2018 et 2022. Quant à Victor Lafay, qui a explosé lors du dernier Tour de France avec une prestigieuse victoire d’étape, il n’a pas encore pu se montrer retiré son nouveau maillot en raison de problèmes physiques.

Mais la principale contribution de l’entreprise réside peut-être ailleurs : elle a mis à la disposition de l’équipe ses tout nouveaux vélos Van Rysel RCR. Exit donc BMC qui équipe la formation depuis 2021. Mettre fin au partenariat avec une marque bien implantée dans le peloton pour s’associer à une entreprise plus connue des sportifs du dimanche que du monde professionnel pourrait s’apparenter à un pari un peu fou mais Vincent Lavenu a tenu à rassurer tout le monde dès ce fameux 27 novembre 2023 : «Les pilotes, qui auront à leur disposition une véritable machine de guerre, ne pourront pas me dire que le manque de résultats vient de la moto.

Évidemment, vous n’entendrez jamais un chef d’équipe ou un coureur douter publiquement d’un nouveau partenaire. Mais les termes de « machine de guerre », sortis de la bouche d’un Vincent Lavenu toujours mesuré, surprenaient. « Pour ma part, j’ai discuté de cette nouvelle moto avec Oliver Naesen avant de signer avec l’équipe. Il a parlé du Van Rysel comme du meilleur vélo qu’il ait piloté dans sa carrière.. J’ai directement pensé : ‘Il faut qu’il me dise ça'”, nous explique Sander De Pestel. Il n’a pas fallu longtemps pour que l’ancien coureur du Team Flandre-Baloise tombe sous le charme.

« Un gain d’environ 3% »

Sander De Pestel, coureur belge de l’équipe Decathlon – AG2R La Mondiale, est sous le charme de son vélo Van Rysel. ©Jean Luc Flémal

Lors de son stage cet hiver, De Pestel a d’abord remarqué qu’il gagnait beaucoup de temps sur plusieurs segments Strava : “Jusqu’à 30 secondes sur certaines descentes, où l’aérodynamisme devient très important.” Aligné en février sur la Ruta del Sol, dont la plupart des étapes ont été annulées à la dernière minute en raison de grèves, le coureur de 25 ans a eu l’occasion d’y partager l’entraînement avec des coureurs d’autres équipes. Des compagnons d’infortune qui ont dû bien occuper leurs journées en l’absence de compétition et qui en ont profité pour exprimer leur curiosité pour ce nouveau vélo. “J’ai fait une bosse de cinq minutes avec un ancien équipier et j’ai dû pousser 15 watts de moins à vitesse et poids équivalents. A notre niveau, où chaque détail compte, c’est une énorme différence. Le gain dépend évidemment de la vitesse mais je dirais qu’en général ce nouveau vélo me fait gagner environ 3% de force.

“L’aérodynamisme de la moto est excellent”, appuie Jordan Labrosse, coureur devenu professionnel cette année. Le Rhodanien a longtemps occupé les casquettes de membre d’équipes de jeunes et… de mécanicien dans sa formation actuelle, il s’y connaît donc beaucoup en matériel. D’autant plus que Van Rysel équipait l’équipe junior lorsqu’il y évoluait. “Le confort et la rigidité sont également au rendez-vous, ils ont fait un travail incroyable. »

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Un sport de plus en plus mécanique

Jordan Labrosse est devenu professionnel cette année. ©Jean Luc Flémal

Lui aussi est témoin de la curiosité du peloton autour de sa nouvelle monture. “Plusieurs gars m’ont déjà dit que notre vélo avait l’air super rapide. Nous savons que le cyclisme devient de plus en plus un sport mécanique, c’est donc un vrai luxe d’avoir confiance en sa machine et de savoir qu’elle optimisera nos heures d’entraînement.

Sander De Pestel ne dit rien d’autre : « Plus que des individus, nous voyons des équipes complètes en forme. On a connu l’époque où les formations qui étaient équipées par Specialized, notamment le Soudal – Quick Step, allaient fort. Cela reste une référence mais on sent au travers des résultats récents que l’écart avec le reste du peloton s’estompe. Cette année, on constate que Decathlon-AG2R La Mondiale est plus performant qu’en 2023 et ceux qui étaient déjà dans l’équipe l’année dernière sont unanimes : c’est principalement grâce au matériel. Il faut dire que BMC n’avait proposé aucune modification de son cadre depuis plusieurs années.

Au gain direct offert par l’équipement, s’ajoutent tous les bénéfices à tirer de la spirale positive qui en résulte : «Évidemment, on est d’autant plus motivés pour faire le travail quand on sait que le matériel va rentabiliser notre bonne forme. Toute l’équipe est envahie par une spirale positive”conclut Sander De Pestel.


La performance au service du plus grand nombre

C’est au B’TWIN Village de Lille que Van Rysel conçoit ses vélos haut de gamme. ©Jean Luc Flémal

La marque Van Rysel a été créée par Decathlon en 2019 avec la volonté de se lancer sur le marché de la haute performance, tandis que B’TWIN (vélos de ville) et Triban (cyclotourisme) s’adressaient à des publics différents.

Le projet de modèle RCR est né il y a environ trois ans. Jérémie Debeuf, chef de produit, nous explique : «Depuis le début, l’ambition est de rivaliser avec les meilleurs du marché. Nous avons effectué des tests comparatifs avec les autres motos du World Tour pour nous assurer que nous apportions un avantage concurrentiel à l’équipe.

C’est donc au B’TWIN Village, à Lille, que le RCR a été développé. “Une vingtaine de prototypes ont été nécessaires, notamment via l’impression 3D qui permet de tester directement un modèle en soufflerie. Une soufflerie très accessible puisque les ingénieurs ont travaillé l’Onera (Centre français de recherche aérospatiale) qui se situe à un petit kilomètre des laboratoires de Decathlon.

Jérémie Debeuf, chef de projet chez Van Rysel. ©Jean Luc Flémal

« Il y a bien sûr l’aérodynamisme puisque la moto représente environ 25 % de la résistance vers l’avant. Mais il y a aussi la rigidité, qui garantit que la puissance transmise par le cycliste à travers les pédales n’est pas perdue. Et il y a de la légèreté, puisqu’on lutte contre la gravité… surtout dans les cols. On peut descendre jusqu’à 6,8 kg avec le RCR équipé de roues montagne », poursuit Jérémie Debeuf. Roues fournies par Swiss Side, dont l’expertise initiale est en Formule 1 puisque son co-fondateur Jean-Paul Ballard était ingénieur chez Sauber.

Concernant la légèreté, aucune concession n’a été faite : «Nous nous sommes permis un maximum de 35 grammes de peinture. Le modèle est donc très sobre puisqu’il est essentiellement recouvert de vernis noir. Il n’était pas question de sacrifier la performance au profit du design. »

Un projet à long terme

Aujourd’hui, Decathlon commercialise deux Van Rysel RCR. La version « pro » coûte jusqu’à 9 000 euros si vous souhaitez une reproduction exacte du vélo utilisé par Oliver Naesen et ses coéquipiers. Mais une version « classique » est disponible à partir de 4 200 euros. “Cette version est plus tolérante et confortable pour le cycliste amateur qui recherche moins la performance », explique Jérémie Debeuf. Les premières machines se sont vendues comme des petits pains, à tel point que certains modèles sont en rupture de stock.

Il faut dire que les prix affichés sont en dessous de ceux des marques implantées dans le peloton : jusqu’à 15 000 euros pour des vélos haut de gamme des marques les plus renommées. “Faisant partie du groupe Decathlon, Van Rysel souhaite rester accessible au plus grand nombre. Je ne peux pas garantir que le prix n’augmentera pas pour les prochains modèles car les évolutions technologiques font que nous valorisons de plus en plus la recherche et les composants, mais nous voulons rendre la performance accessible au plus grand nombre. personnes.”

Si notre interlocuteur se garde bien de dévoiler le budget nécessaire au développement d’un tel projet, il ne cache pas qu’une cinquantaine de personnes ont été impliquées durant les deux ans et demi de recherche. “Quand on voit les résultats, on se dit qu’on a eu raison de le faire. Il existe un réel lien de cause à effet entre la performance de l’équipe et l’engouement autour des produits que nous proposons. Cela nous rend fiers mais nous restons humbles car nous savons que le haut niveau nécessite un investissement permanent. Nous avons signé un contrat de cinq ans avec l’équipe du World Tour, c’est la preuve que nous voulons nous inscrire durablement parmi les meilleurs joueurs mondiaux.poursuit Jérémie Debeuf.

Afin de conclure d’autres partenariats dans le sport professionnel ? “Disons simplement qu’il y avait de la curiosité autour de Van Rysel l’année dernière et que cela s’est transformé en intérêt cette année.conclut le chef de projet.

La peinture bleue se fait discrète sur le Van Rysel RCR Pro, laissant place à une majorité de vernis noir plus clair. ©Jean Luc Flémal
 
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