« En 2009, je suis arrivé au Parlement européen, sans savoir que j’y consacrerais 15 ans de ma vie »

« En 2009, je suis arrivé au Parlement européen, sans savoir que j’y consacrerais 15 ans de ma vie »
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Thierry Monasse / Getty Images Karima Delli au Parlement européen à Strasbourg le 19 janvier 2022.

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Karima Delli au Parlement européen à Strasbourg le 19 janvier 2022.

TRIBUNE – L’eurodéputée Verte Karima Delli a été élue en 2009 à Strasbourg. Alors que le Parlement européen se réunit en plénière ce jeudi 25 avril pour la dernière fois du mandat, Karima Delli adresse ces quelques mots au Parlement européen, lieu où elle a fait l’expérience des victoires obtenues et du travail qui reste encore à accomplir à l’aube. des prochaines élections.

Lettre au Parlement européen.

En 2009, je suis arrivé au Parlement européen, sans savoir que j’y consacrerais 15 ans de ma vie. Même si mon troisième mandat s’achève le 9 juin à 20 heures, je n’envisage pas pour autant de quitter l’Europe.

Après quinze ans au Parlement, dont huit en tant que président de la commission des transports et du tourisme, je peux dire que je porte l’Europe dans mon cœur. À mon arrivée, après un passage auprès de Marie-Christine Blandin au Sénat, j’ai eu la chance d’être accompagné de José Bové, Daniel Cohn-Bendit et Éva Joly… L’Europe, c’est avant tout une certaine vision de la politique : celle qui transcende divisions ainsi que frontières, une vision qui regarde au-delà et voit plus grand. Toutes ces années, j’ai aimé travailler avec 28 nationalités différentes, puis 27 (le Brexit y étant arrivé) et chercher ensemble des compromis et des accords pour tout un continent.

L’Europe, c’est avant tout une certaine vision de la politique : celle qui dépasse les divisions comme les frontières, celle qui regarde au-delà et voit plus grand.

Pourtant, rien ne me destinait à me lancer en politique. Je suis né à Roubaix, cette ville m’a accueilli comme elle avait accueilli mes parents, comme tous ceux qui rêvaient d’une vie meilleure. Je suis le 9ème de 13 enfants. Mon père travaillait dans une usine textile et mes parents ne savaient ni lire ni écrire, mais ils m’ont inculqué des valeurs inestimables : notamment la dignité par le travail. J’ai reçu l’héritage des enfants d’ouvriers : un mélange de pragmatisme et d’idéaux, de sens du devoir, de courage et d’énergie. Au nom de cet héritage, je nous refuse la perspective du pire pour notre Europe : le cynisme démagogique et le souverainisme reclus.

Si quelqu’un m’avait dit que je deviendrais député européen et président de la commission des transports et du tourisme du Parlement européen, je ne l’aurais jamais cru ! Mais l’Europe est un projet incroyable et fantastique ! À la fin de la guerre, Robert Schuman, l’un des pères fondateurs de l’Union européenne, écrivait : « La paix mondiale ne peut être sauvegardée sans des efforts créatifs à la mesure des dangers qui la menacent ». L’Union est cet effort créatif, plus que jamais d’actualité. Aujourd’hui encore, dans l’hémicycle, je me rends compte de l’exploit unique de la présence de tant de nationalités différentes dans un seul parlement.

J’ai pris ce pari fou à bras le corps et nous avons tenu nos promesses. Nous avons construit le Green Deal lors de ce dernier mandat, avec l’ambition de faire du continent européen le leader mondial de la transition écologique. Les populistes peuvent blâmer l’Europe pour tout, notre travail est réel et il améliore la vie des gens. A la tête de la Commission Transports, nous avons réussi à fixer des objectifs de réduction des émissions de CO2 pour tous les moyens de transport. Une transition écologique oui, mais une écologie populaire : en dénonçant le scandale du Dieselgate en 2015, pour lutter contre les milliers de morts liés à la pollution de l’air ; en demandant un accord ferroviaire vert, pour répondre au défi de la fracture territoriale ; en construisant une véritable feuille de route industrielle “fabriqué en Europe”pour créer davantage d’emplois verts, mon action aura toujours été dictée par la volonté d’offrir à chacun des conditions de vie dignes.

Aujourd’hui encore, dans l’hémicycle, je me rends compte de l’exploit unique de la présence de tant de nationalités différentes dans un seul parlement.

Au cours de ce mandat, nous avons pu affronter ensemble des crises sans précédent, avec pour horizon la coopération et le dialogue. Pendant le Covid, l’obligation de maintenir tous les avions au sol a nécessité de trouver des solutions exceptionnelles pour assurer le transport des biens essentiels. Nous l’avons fait. Le Brexit nous a obligé à repenser les échanges commerciaux avec la Grande-Bretagne et à protéger les droits des travailleurs européens. Nous l’avons fait. Le retour de la guerre à nos frontières menace la souveraineté et la sécurité de notre Union, nous obligeant à apporter notre soutien aux populations ukrainiennes. Nous l’avons fait.

Sans l’Union, comment imaginer jouer un rôle international dans la lutte contre le changement climatique ? Sans l’Union, comment apporter des réponses courageuses et humanistes au défi migratoire ? L’Europe n’est pas parfaite. Comme toutes les institutions politiques, elle a des défauts et commet des erreurs. Mais c’est essentiel. Frapper Bruxelles est devenu l’agenda de ceux qui n’en ont pas.

En cette période électorale, les pro-européens ne peuvent plus garder le silence, ils ne doivent pas le faire. Le danger est trop grand. Nous, Européens, devons dire, répéter, réitérer notre attachement à l’Union européenne. Nous, Européens, devons affirmer que l’Europe sera la solution aux défis de notre temps et que le retrait sera une défaite.

L’Europe n’est pas parfaite. Elle a des défauts et fait des erreurs. Mais c’est essentiel. Frapper Bruxelles est devenu l’agenda de ceux qui n’en ont pas.

Mon troisième mandat touche à sa fin, mais pas mon aventure européenne. Elle prendra d’autres formes et se poursuivra ailleurs. Pour toujours, j’emporterai l’Europe avec moi. Mon histoire est celle d’une fille née à Roubaix, qui a toujours pensé que tout était possible. Celle d’une femme qui vit pour ses convictions et ses combats, sans jamais baisser les bras. Celle d’un homme politique qui a grandi dans un quartier populaire pour accéder à la présidence d’une Commission au Parlement européen. Alors que mon mandat touche à sa fin, je regarde avec fierté tout le travail accompli et, surtout, celui qui reste à accomplir. Ce n’est pas un au revoir, puisque ce n’est pas la fin. L’Europe appartient à ceux qui la font.

Je rêve d’une perspective heureuse pour l’Europe : celle d’une écologie qui nous ressemble et qui nous ressemble : respectueuse de notre dignité et de la nature… une écologie populaire.

Soyons les nouveaux précurseurs des conquêtes sociales. Soyons à l’avant-garde de la transition écologique.

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