le secteur pétrolier accélère sa transformation en France, mais à quel prix ? – .

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« C’est une terrible annonce pour les salariés et leurs familles. » Ce jeudi 11 avril, après la communication faite par ExxonMobil, le ministre de l’Industrie Roland Lescure s’est empressé de prendre la parole. L’enjeu est de taille : la réduction des activités du géant pétrolier américain à Port-Jérôme (Normandie) « devrait entraîner la suppression de 677 emplois », selon l’entreprise. “Aucun départ n’est envisagé avant 2025”, précise-t-il, promettant d’engager une “recherche de solutions individuelles et collectives” pour les salariés concernés par les suppressions d’emplois. L’Etat s’en assurera : « Le groupe a l’obligation absolue d’offrir des perspectives de reclassement aux salariés et d’aménagement du site », a ajouté le ministre de l’Industrie.

Une mauvaise nouvelle n’arrive jamais seule, elle a été suivie de l’annonce du projet de vente, via la filiale Esso France, de la raffinerie de Fos-sur-Mer et des dépôts Esso de Toulouse et de Villette-de-Vienne (Isère). Le candidat au rachat, Rhône Energies, un consortium suisse composé du géant du négoce Trafigura et de l’opérateur de raffinage américain Entara, s’engage toutefois à “maintenir l’emploi des 310 salariés du site”, a expliqué à l’AFP Derek Becht. , directeur des opérations chez Entara.

Facteurs circonstanciels malgré les bénéfices

Pour justifier cette décision, ExxonMobil pointe du doigt plusieurs unités pétrochimiques qui ne sont pas « économiquement viables ». Un vapocraqueur du site de Gravenchon (Seine-Maritime) est particulièrement critiqué pour sa configuration et « sa taille par rapport aux grandes unités nouvellement construites ». Le géant américain met également en avant des facteurs économiques comme « des coûts d’exploitation et d’énergie plus élevés en Europe » qui le « rendent non compétitif ». “La société ExxonMobil Chemical France (EMCF) a enregistré plus de 500 millions d’euros de pertes depuis 2018”, précise le communiqué.

Les critiques sont souvent portées par les géants pétroliers, qui pointent du doigt des activités moins rentables, voire déficitaires, en France. Le raffinage doit en effet acheter son énergie pour fonctionner, notamment le gaz et l’électricité. Or, « le gaz naturel en France coûte, sur une base stable, environ deux fois plus cher qu’avant le Covid. Et avant le Covid, cela coûtait déjà beaucoup plus cher qu’en Amérique du Nord», a déclaré à l’AFP le président de l’Ufip, le syndicat des compagnies pétrolières, Olivier Gantois. Quant à l’activité liée aux stations-service, elle est très compétitive et présente une faible marge (en moyenne 1 centime le litre, rappelle Défis dans un article de mai dernier).

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L’explication aura cependant du mal à convaincre les salariés. « La chimie a effectivement connu une perte de 300 millions en 2023 mais le bénéfice du pétrole est de 1 milliard sur la même période », réagit Pierre-Antoine Auger, élu (FO) du CSE sur le site de Port-Jérôme. Cette décision est également difficile à comprendre au vu des résultats globaux d’ExxonMobil. En 2022, la major pétrolière américaine a affiché un bénéfice record de 51,8 milliards d’euros, porté par la guerre en Ukraine. Si le temps des superprofits est révolu, son bénéfice a tout de même atteint 33 milliards d’euros l’an dernier. «On ressent de la tristesse et de l’irritation, on ne sait pas encore comment on va réagir», ajoute Pierre-Antoine Auger. D’autant que la société pourrait bénéficier de la forte hausse des prix du baril de pétrole ces derniers jours, et donc des prix à la pompe, les produits raffinés dopant habituellement les marges des pétroliers.

Une transformation forcée

Ce changement de stratégie n’est pas un cas isolé en France, car les compagnies pétrolières sont confrontées à une transformation globale de leur activité de raffinage. Une nécessité compte tenu de la baisse de la demande en produits pétroliers, du ralentissement du chauffage au fioul et de l’électrification progressive du parc automobile. Les grands groupes s’orientent progressivement vers la conversion de raffineries en bioraffineries, qui produisent des carburants à base de biomasse, comme à La Mède (Bouches-du-Rhône) et Grandpuits (Seine-et-Marne). Avec à la clé, encore, la restructuration : ces deux sites sont passés chacun de près de 400 salariés à environ 250, selon TotalEnergies.

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Le mouvement ne devrait que se renforcer à l’avenir, selon Olivier Gantois de l’Ufip : « En 2050, en France, il y aura peut-être encore une, voire plusieurs raffineries qui traiteront du pétrole. Mais il y en aura d’autres qui ne le traiteront plus, et il est probable que ceux qui transforment encore le pétrole transformeront à ce moment-là un mélange de pétrole et de biomasse. » De quoi bousculer l’écosystème de l’ensemble de la filière, qui représente aujourd’hui entre 5 000 et 10 000 emplois directs en France. A l’instar de Roland Lescure, l’Etat serait bien avisé de suivre le dossier.

 
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