Les chercheurs supposent que l’art préhistorique a commencé avec des dessins sur le sable

Les chercheurs supposent que l’art préhistorique a commencé avec des dessins sur le sable
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Dans un article périlleux publié dans la revue consacrée à l’art préhistorique Recherche sur l’art rupestre, des chercheurs sud-africains sous la direction du paléontologue Charles W. Helm, de l’université Nelson Mandela de Port Elizabeth, annoncent avoir sans doute identifié la plus ancienne représentation figurative d’un être vivant. Datant d’il y a peut-être 130 000 ans, il s’agit d’un « ammoglyphe », une sculpture réalisée dans le sable qui aurait été préservée par sédimentation et qui aurait été réalisée à partir d’un modèle vivant de rayon bleu (Dasyatis chrysonota).

Cette pierre est-elle la première représentation d’un être vivant ?

Nous avons tous joué sur la plage et construit des châteaux éphémères, voués à disparaître au gré du vent et de la marée. Nous avons tous vécu cette amère expérience en reconnaissant un fait indéniable : le sable est une matière volatile. La prudence est donc de mise lorsque l’on souhaite démontrer que l’on a retrouvé une trace sculptée dans le sable il y a plus de 100 000 ans. Les chercheurs prennent donc des précautions pour étayer leur thèse.

La côte sud du Cap, où la pierre a été découverte en 2018, a conservé de multiples traces de passage d’hominidés dans des dunes cimentées (éolianites ou calcarénites), ainsi que des empreintes d’animaux. Le principe de leur préservation repose sur une combinaison de facteurs favorables – moulage dans le sable humide, sédimentation provoquant un enfouissement rapide et une lithification – avant leur réexposition due à l’érosion.

Vue aérienne (prise par drone) de la zone où la supposée sculpture de sable a été trouvée. La flèche indique une figure humaine à l’échelle. Crédits : CW Helm et al., 2024

Une forme d’art préhistorique fossilisée

Les chercheurs ont inventé le terme « ammoglyphe » (du grec munitionsdu sable, et glyphe, gravure) pour désigner ce qu’ils interprètent comme une forme d’art préhistorique fossilisé. Mais jusqu’à présent, leurs découvertes se sont limitées à des modèles réalisés en deux dimensions.

L’ammoglyphe en question présente ici une particularité supplémentaire : il s’agit d’un artefact tridimensionnel. Afin de prouver son origine anthropique, les chercheurs tentent de mettre en évidence la précision des lignes et la symétrie des motifs gravés (rainures profondes et incisions).

Pour arriver à ce résultat en forme de cerf-volant, de 5 à 6 cm d’épaisseur et une trentaine de long, ils supposent que la première action consistait à tracer le contour d’une bande bleue sur le sable. Les dimensions suggèrent qu’il s’agissait d’un jeune mâle, les femelles gravides qui s’aventurent sur les plages de sable pour mettre bas puis s’accoupler sont beaucoup plus grandes.

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Un geste artistique couplé à un geste symbolique ?

Mais on peut noter qu’il manque un détail important dans cette représentation. Et c’est là que l’interprétation prend une tournure plus risquée. Alors que les chercheurs disent vouloir séparer les faits des spéculations – “l’affirmation selon laquelle une pierre trouvée au pied des falaises côtières représente une sculpture de sable peut être considérée comme extraordinaire, nécessitant donc un haut niveau de preuve», écrivent-ils – ils assument des gestes qu’ils reconnaissent comme impossibles à vérifier.

C’est notamment le cas de l’absence de représentation de la queue de l’animal, interprétée comme un «acte de blessure symbolique», car la raie a dû représenter non seulement une Source de nourriture intéressante pour les hominidés, mais aussi un réel danger. Son épine caudale est en effet susceptible de provoquer des blessures mortelles si l’on marche dessus par inadvertance.

Superposition d’un motif à rayures bleues sur une photo 3D de la surface supérieure de la pierre. Crédits : CW Helm et al., 2024

UN “tremplin” vers l’art figuratif ?

Les conséquences de cette démonstration vont aussi bien plus loin que la simple représentation d’un animal pernicieux dont il s’agit de conjurer le pouvoir néfaste, puisqu’elle amène les chercheurs à supposer que le geste à l’origine de cet ammoglyphe représente un acte original – le «tremplin» disent-ils – faisant la transition entre la gravure de motifs abstraits (cercles, triangles, chevrons…) et la représentation d’un être vivant.

Ce qu’ils interprètent en outre comme l’anticipation précoce d’un art rupestre qui s’épanouirait des dizaines de millénaires plus tard (environ 40 000 avant notre ère) utilisant parfois le même type de support que ces sculptures profilées, comme le prouvent certains pochoirs réalisés en soufflant des pigments sur un reptile.

Comme la pierre en forme de rayon n’a pu être datée qu’indirectement des roches voisines, que les analyses se limitent à une simple observation à l’œil nu et par photogrammétrie, et même si la baie où elle a été trouvée n’est qu’à 30 km de la grotte de Blombos, réputée pour ses gravures et son industrie lithique, il manque des éléments décisifs pour convenir qu’il s’agit bien d’une représentation artistique.

Les chercheurs l’admettent dans un article publié sur le site La conversation : “Nous ne pouvons pas prouver notre interprétation et d’autres ne peuvent pas la falsifier. C’est donc de la spéculation. – bien qu’il s’agisse d’une spéculation très éclairée, basée sur notre compréhension de plusieurs dizaines de milliers de ces roches.

 
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