Alan, comment vous est venue l’idée de ce projet de documentaire sur les Amérindiens de France ?
« J’habite au Mans, c’est le pays du basket en France. A la base, je ne suis pas passionné de basket mais petit à petit je m’y suis intéressé. Et une des questions que je me posais sans trop connaître ce sport, c’était : « Que font tous ces Américains en France dans les petites villes » parce que je voyais beaucoup de noms américains dans l’effectif. Je suis allé voir le MSB et je leur ai présenté mon projet, qui ne faisait pas exception. Ce n’était pas entièrement sportif mais plutôt culturel. J’ai trouvé intéressant de parler des joueurs américains non repêchés qui venaient en France, et qui croisaient la route des jeunes français qui allaient être repêchés en NBA. J’ai croisé la route de Terry Tarpey qui possède la double nationalité franco-américaine. Il fait le lien entre les deux cultures et devient le personnage principal du documentaire, sans oublier d’y ajouter les portraits des autres acteurs.
Quelles ont été les étapes de création de ce documentaire ?
J’ai eu cette idée en 2019 et le MSB m’a donné son accord, mais puis il y a eu le Covid, donc ça a retardé le tournage. Puis, le film est entré en production en 2021 grâce à des producteurs que j’ai trouvés au Mans. J’ai ensuite fait des entretiens avec Scott Bamforth, Dante Cunningham qui venait de la NBA, et Terry Tarpey (NDLR : saison 2021-2022). Il me parlait déjà de l’équipe de France alors qu’il n’avait fait que quelques matches avec la sélection pour les fenêtres internationales. C’était son rêve et cela a commencé à lui rappeler quelque chose. Je suis allé le suivre (Tarpey) en équipe de France et j’ai été bien reçu. Quand il a explosé à l’Euro, j’ai compris que je pouvais me concentrer davantage sur son portrait. Il voulait jouer pour la France depuis qu’il était petit, lorsqu’il vivait à New York et ne parlait pas un mot de français.
Terry Tarpey est un personnage, il aurait pu faire le film tout seul, c’est ce que beaucoup de gens m’ont dit. Bien sûr, c’est ce qu’il aurait fallu faire si je n’avais pas été mulet, mais je voulais garder le portrait des autres joueurs américains. Il y a par exemple Brynton Lemar, qui n’a été que brièvement au MSB et pourtant il est un personnage clé du documentaire car il a prononcé des discours intrigants sur l’ouverture culturelle.
“Mon film joue sur cette indécision : parfois on ne sait plus si on est aux Etats-Unis ou dans une petite ville française”
Quelle est l’idée qui ressort principalement de vos discussions avec les joueurs américains ?
J’ai d’abord pensé que les Américains avaient du mal à s’adapter en arrivant en France, et c’est en partie faux. C’était plutôt comme ça dans les années 80 quand le championnat français n’était pas structuré. Les organisations sont aujourd’hui certes plus petites qu’aux États-Unis, mais elles se sont développées et les joueurs d’outre-Atlantique ressentent moins cette différence. Ils ont aussi plus de moyens de communication avec leur famille aux USA. En revanche, les jeunes joueurs universitaires qui arrivent en Europe se sentent plutôt seuls, et ils doivent quand même performer sportivement.
Ce sont des gens que j’admire car ils sacrifient beaucoup pour atteindre leurs objectifs et leur avenir est souvent incertain. Le film met l’accent sur le fait que ces joueurs changent régulièrement de club et donc parfois de pays, ils doivent constamment s’adapter mais d’un autre côté, ils découvrent de nombreuses cultures et voyagent beaucoup.
Un soir de match au Mans, nous sommes allés voir March Madness (tournoi universitaire américain de la NCAA) chez Terry Tarpey. La décoration de sa maison était américaine même si nous étions dans la banlieue du Mans. Mon film joue de cette indécision : parfois on ne sait plus si on est aux Etats-Unis ou dans une petite ville française.
“La difficulté pour le basket, c’est que si on ne connecte pas son sujet à la NBA, les diffuseurs ne sont pas forcément intéressés”
Quelles difficultés avez-vous rencontrées ?
Le problème principal que j’ai eu, c’est que le film n’a été financé par aucune chaîne de télévision. La difficulté pour le basket, c’est que si on ne connecte pas son sujet (le documentaire) à la NBA, les diffuseurs ne s’y intéressent pas forcément. Enfin, les basketteurs américains en France dont je parle dans mon documentaire sont, en quelque sorte, des antihéros ! Je ne suis pas sûr que beaucoup de jeunes connaissent Terry Tarpey en France.
J’ai dû me débrouiller avec les moyens du bord et aujourd’hui le résultat est de qualité car j’ai été suivi par des productions au Mans et j’ai eu accès à du matériel. Je n’ai pas été financé par de grosses chaînes, était-ce à moi de trouver un sujet plus sexy ? Les chaînes sont-elles frileuses et manquent-elles de curiosité ? Ou peut-être que le basket n’est pas assez démocratisé ? Le basket français veut plus de contenu pour mettre en avant son sport mais en même temps, il n’est pas facile de trouver des diffuseurs qui le financent.
Maintenant, j’aimerais que ce film soit vu car je pense qu’il peut intéresser beaucoup de fans de basket. Au-delà des valeurs sportives, ce sont des valeurs humaines comme l’amour ou la passion que l’on retrouve dans les images, de quoi toucher un public plus large.”
Diffusion du documentaire : ce lundi 1er juillet à 21h sur la chaîne Sport en France (chaîne 109 de la TNT ou sur le site sportenfrance.com).
Projection : ce Jeudi 4 juillet au cinéma Les Cinéastes, à 19h, au Mans. Billetterie ici
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