Tout commence un peu avant 2016 pour Stéphane Foulardpuis double doctorant sur les thèmes des données, de l’ingénierie et de la mécatronique entre l’Allemagne et la France. Intéressé par l’automobile, sa thèse basée sur les capteurs et boîtes de vitesses virtuels a servi de point de départ à la création de son entreprise avec Rafael Fietz. “Compredict est une sorte de spin-off de ces années d’études.” L’enjeu est alors de créer un capteur virtuel basé sur les données communiquées par le véhicule défini par logiciel.
« Chaque véhicule transmet plusieurs milliers de données, entre 10 000 et 30 000, qui ne sont pas suffisamment exploitées »confirme le directeur de l’entreprise désormais basée à Munich. De son constat est née l’idée d’utiliser l’intelligence artificielle pour entrelacer toutes ces données et les utiliser à bon escient, en maintenance prédictive : « Plutôt que d’utiliser dix capteurs physiques, nous allons pouvoir les réduire à sept, tout en disposant de beaucoup plus d’informations. »
Moins de capteurs signifie des économies financières, une réduction des contraintes de conception ou encore une réduction du besoin en terres rares. Une opportunité que le groupe Renault a su détecter au bon moment. A travers Software République, un écosystème d’incubateur de start-up dont font partie le groupe Renault, Thalès et Dassault, le losange repère la jeune entreprise et décide de la soutenir grâce à son fonds d’investissement pour des projets durables, Shift4Good.
Toyota fait de même avec un financement de 15 millions de dollars de son fonds de croissance Wired Capital, mais c’est bien Renault qui reprend la technologie. En septembre dernier, le constructeur a signé un contrat commercial avec Compredict pour équiper les véhicules de ses trois marques, Renault, Dacia et Alpine, jusqu’en 2030.
Faire plus avec moins
Le capteur virtuel ne doit rien à la mécanique et à la réparation automobile. Son fonctionnement est entièrement informatisé et même basé sur l’intelligence artificielle. Intégré au calculateur de la voiture, cet algorithme utilise les données communiquées en permanence par les autres capteurs réels et les informations que renvoient les éléments mécaniques.
Ainsi, l’angle du volant, la pression dans le maître-cylindre de frein, l’accélération ou le débattement des suspensions permettront de calculer et de déduire d’autres données propices à la maintenance prédictive du véhicule. Le constructeur ou le conducteur est alors libre de personnaliser les informations qu’il juge nécessaires.
Premièrement, les capteurs virtuels destinés aux véhicules du groupe Renault doivent permettre de connaître l’épaisseur et l’usure de la bande de roulement des pneumatiques, l’état des disques de frein ou encore l’usure des plaquettes. « Nous sommes capables de générer des informations sur ce qui se passe dans le véhicule jusqu’à cent fois par seconde. Pour les pneus ou les systèmes de freinage, nous sommes précis en dessous du millimètre. Ainsi que pour les forces latérales exercées sur le pneumatique qui sont de l’ordre d’une centaine de newtons. »
Pour Stéphane Foulard, il est évident que cette maintenance prédictive doit permettre d’offrir bien d’autres possibilités au conducteur. “Pour les gens qui n’ont aucune affinité avec l’automobile, cela permettrait de connaître facilement l’état de leurs pneus, de prolonger leur durée de vie et de connaître le bon moment pour les changer.” A terme, le capteur virtuel pourrait même aider les constructeurs à concevoir des pneus…
Cet article est issu du Journal du Pneumatique n°187 de novembre-décembre 2024.