Béziers, cette terre d’embûches. Et on ne parle pas ici seulement d’un stade Raoul-Barrière ou Feu Méditerranée dans lequel le SUA ne s’est pas imposé depuis vingt ans. [6-16 en 2004, NDLR]. Ce qui correspond à la dernière année d’un des joueurs mythiques des bleu et blanc, le troisième ligne Philippe Benetton qui, à la fin de la saison 2003-2004, a raccroché les crampons pour enfiler le costume d’entraîneur. Il retrouve ces mêmes Héraultais en devenant manager d’une ASBH qui venait de monter en Pro D2 en 2011-2012. Appelé à entretenir et structurer le club, l’ex-Agenais a certes accompli sa mission, mais à quel prix. Explications.
1 Une équipe à reconstruire
Au terme de l’exercice 2011-2012, le Béziers de Philippe Benetton a 15 anse et première relégation. Le manager reconnaît qu’il ne doit la réussite de l’opération de maintien « qu’à ce que Bourgoin soit relégué administrativement ». La saison est compliquée, préparée dans la précipitation après avoir gagné une montée en puissance à l’issue des phases finales de Fédérale 1 qui ont rogné la préparation.
« Il fallait aussi que le club passe à un niveau supérieur et le situe dans le monde professionnel », se souvient Philippe Benetton, qui y a trouvé son plus gros défi. « La direction m’a fait comprendre que j’étais trop ‘professionnel’ », assure-t-il. Il y avait un président qui avait encore un esprit amateur, il encourageait ses joueurs plus à faire la fête qu’à travailler. »
“Un supporter m’a dit : ‘Si on ne suit pas, j’ai mon arme dans le coffre de ma voiture'”
2 Comment nous nous retrouvons
Si, depuis, « de l’eau a coulé sous les ponts », l’Agenais version 2024-2025 pourrait très bien croiser des joueurs de l’ère Benetton qui, plus de dix saisons plus tard, portent toujours le maillot de Béziers. Du pilier « Chico » Fernandez (39 ans) à l’ouvreur Charly Malié (33 ans), en passant par l’actuel manager Pierre Caillet, ils sont toujours fidèles au poste.
Tout comme un certain Andrew Mehrtens. L’ancien international néo-zélandais était à la tête des trois-quarts sous le mandat de Philippe Benetton. Le député de l’époque gagnait du terrain et assumera le rôle de co-président au sein de la nouvelle organisation après le rachat d’ASBH par un fonds d’investissement irlandais (Strangford Capital), cofondé par l’ancien patron du pilote de Formule 1 Eddie Jordan. « J’espère que ce ne sera pas comme lorsqu’il était mon adjoint… », commente Philippe Benetton.
Homme de terrain
Cours. International à 59 reprises (pour trois Tournois des V Nations, dont deux Grands Chelems en 1997 et 1998), le Cadurcien d’origine aura passé 14 saisons sous le maillot d’Agen (1987-2004) avec en prime un Brennus (1988). Une fois sa carrière de joueur terminée, il n’abandonne pas le terrain en endossant le rôle d’entraîneur auprès des pros (Racing 92, Béziers, Perpignan) ou amateurs (Cahors, Limoges et Vallée du Lot). A l’issue de cette dernière expérience (2019), il devient responsable technique de club au sein de la ligue régionale de rugby Nouvelle-Aquitaine.
3 Un environnement hostile
Même s’il avait rangé le maillot bleu et blanc pendant près de dix ans avant d’arriver dans l’Hérault, il n’est pas évident de se défaire de quatorze saisons au SUA. Entre deux mythes du rugby français et dix-neuf Brennus au total (huit pour Agen, onze pour Béziers), la rivalité est bien ancrée.
Ce qu’on lui a fait comprendre dès sa présentation à l’intersaison. « Le maire ne m’a même pas salué ni serré la main. La seule chose qu’il m’a dit, c’est que si Béziers avait perdu quand on est venu avec le SUA, c’était à cause de moi. J’aurais provoqué une bagarre et monopolisé deux ou trois de leurs joueurs, ce qui a profité aux trois quarts d’entre nous… » Du côté des supporters, l’accueil n’a pas été plus chaleureux. « Il y en a un qui vient me voir et me dit : ‘Si on ne suit pas, j’ai mon fusil dans le coffre de ma voiture’. « Ambiance.
4 Et si c’était le bon ?
S’il ne compte donc pas assister au match depuis les tribunes de Raoul-Barrière (« Je n’y suis pas vraiment le bienvenu »), il reste néanmoins un observateur averti des performances du SUA.
De là à envisager un résultat ? « Et pourquoi pas ? Agen se présente sans pression. J’étais à Armandie pour le derby contre Montauban, et c’est exactement ce qu’ont dit les dirigeants montalbans. Nous avons vu le résultat [défaite du SUA 18-25, NDLR]. Et, avec le niveau affiché par Béziers et le contenu proposé par le groupe de Sébastien Calvet, cela devrait être un match intéressant. »