Grand format. 40 ans après leur épopée Coupe de France, « les paysans de Castets » ouvrent la boîte à souvenirs

Par

Gaël Arcuset

Publié le

13 juin 2024 à 17h33

Que faisiez-vous le samedi 18 février 1984 ? Jean-Pierre Lahiteau, Jean-Pierre Donadel, Patrice Pourrat, Thierry Laquêche et leurs amis s’en souviennent parfaitement. Joueurs de football amateurs, évoluant sous les couleurs du Castets Athletic Club (Gironde), ils ont affronté le grand FC Metz (D1); cette même équipe qui marquera un 4-1 contre le mythique FC Barcelone, quelques mois plus tard, au Camp Nou.

Quatre décennies se sont écoulées. LE les souvenirs sont encore vifs. Et la joyeuse bande n’a rien oublié la merveilleuse épopée réalisé en Coupe de France, lors de la saison 1983-1984.

Un village de 830 habitants parmi l’élite du football français

Imaginez : un village club (830 habitants) qui enchaîne les exploits, élimine toutes les équipes évoluant à des niveaux supérieurs, s’offre le luxe de faire tomber un club de deuxième division et monte à 16e final. Pour défier le futur gagnant du concours. Une pure folie. Délire.

Samedi 29 juin 2024, quarante ans plus tard, les anciens élèves se retrouveront dans leur antre, le stade des Charmilles, pour une journée de retrouvailles qui s’annonce grande.

Une grande fête à Castets… avec un ancien membre du FC Metz

Samedi 29 juin, le CA Castets fêtera les 40 ans de l’épopée du club en Coupe de France avec un grand événement festif organisé par l’association des anciens du CA Castets. A cette occasion, nous procéderons à l’installation officielle d’une pancarte à l’entrée de Charmilles qui portera le nom de feu Claude Ferrand, chef d’entreprise passionné et leader associatif décédé en 2017. Après une proposition adoptée le 22 mars lors d’une Conseil municipal réuni, le stade des Charmilles sera donc baptisé stade Claude-Ferrand. L’accueil des participants est prévu à 16 heures. L’inauguration aura lieu en présence de Valérie Cochin, petite-fille de Claude Ferrand, à 17 heures. Elle sera suivie d’interventions d’anciens dirigeants et joueurs de l’époque glorieuse. A 18h, il y aura un apéritif musical. A 20 heures, un grand repas est prévu à l’intérieur du stade. A noter : Alain Colombo, ancien joueur du FC Metz, qui affrontait Castets à l’époque, sera présent.

L’occasion pour eux de se remémorer les bons souvenirs d’une aventure humaine et sportive hors du commun.

Castets, petit Poucet à l’esprit d’acier

Coupe de France 1984 : Castets, irrésistible Petit Poucet de la compétition, défie les pronostics, étonne observateurs et connaisseurs. Une « anomalie » qui intrigue même Michel Hidalgo. Le sélectionneur de l’équipe de France (il a remporté l’Euro quelques semaines plus tard) viendra même saluer les protégés de Jean-Pierre Dubébat et de l’illustre Claude Ferrand.

« C’est la première fois qu’un club de notre niveau atteint les 16e final, avoue Patrice Pourrat. Aujourd’hui, c’est un peu plus courant, mais à l’époque c’était exceptionnel. »

Exceptionnel, tout comme le parcours de cette équipe. Pas vraiment formaté pour affronter les meilleures équipes françaises. Mais avoir, intrinsèquement, ce petit plus, ce fameux supplément d’âme, qui permet de déplacer des montagnes.

Au niveau du ballon, nous n’avons pas été maladroits, mais nous n’avions pas non plus une grande équipe. En revanche, au niveau mental, nous avons été solides.

Thierry Laquêche
L’équipe du CAC au coup d’envoi du match retour contre Metz, le 21 février 1984. Debout, de gauche à droite : Jean-Pierre Donadel, Jean-Pierre Lahiteau, Philippe Martin, Pascal Berthonneau, Didier Gravellier, Christian Grenier. Accroupis : Thierry Laquëche, Ghislain Labrèze, Eric Poutays, Patrice Pourrat et Eric Saint-Blancard. ©document envoyé à actu.fr

Les « paysans de Castets » font tomber les grands

Et leurs adversaires successifs ont échoué. « Combien de fois a-t-on entendu : ‘Ah, ce sont les paysans de Castets ?’ Mine de rien, cela nous a renforcés», estime Thierry Laquêche. Cette histoire est celle du football de ville contre le football de campagne.

Patrice Pourrat se souvient‘une anecdote particulièrement savoureuse : « Quand Albi est arrivé pour jouer aux Charmilles, les joueurs ont dit : ‘C’est pas mal pour ton terrain d’entraînement. Où jouons-nous ? Là, on s’est dit qu’ils allaient être reçus… »

Nous avons mis ce qu’il fallait, sourit Jean-Pierre Donadel, illustre défenseur du CA Castets. Mais nous n’avons jamais brisé personne. » Viril, mais correct. Albi, Bayonne, La Roche-sur-Yon… Toutes ces équipes, pourtant expérimentées en matchs nationaux, se butent les unes sur les autres.

Avant le 32e de finale contre La Roche-sur-Yon, notre entraîneur, Jean-Pierre Dubébat, nous avait dit : ‘Si on gagne, on ira à Lourdes en vélo’

Jean-Pierre Lahiteau

Visiblement plus à l’aise avec les crampons que sur une selle, les joueurs du CA Castets ne parcourront qu’une partie des 196 km. Ils interrompront leur périple à la limite des Landes, à Captieux, après avoir encore englouti 50 bornes. « Nous avons chargé les voitures dans les coffres et nous sommes rentrés chez nous ! »

Après leur victoire contre La Roche-sur-Yon en 32ème de finale, les joueurs honorent la fête lancée par Jean-Pierre Dubébat et enfourchent leurs vélos pour rejoindre Lourdes depuis Castets. Ils feront finalement escale à Captieux après un parcours de 50 milles. ©document envoyé à actu.fr

La recette du succès ? Certainement cohésion de groupe, franche camaraderie. Et cela dépassait largement le rectangle vert et les vestiaires.

La troisième mi-temps épuisante d’un journaliste de Téléfoot

Il suffit de demander à ce célèbre journaliste de Téléfoot. Après le match aller joué contre le FC Metz (défaite 4-0 du CA Castets), il se retrouve, le lendemain, sur le plateau pour présenter le spectacle. Problème : il a passé la soirée, et donc la troisième mi-temps, avec les Castériots.

Sur le plateau de Téléfoot, il a gardé ses lunettes de soleil. A la fin du reportage, il déclare : « Nous avons été très bien accueillis ! En revanche, je me pose une question : comment vont-ils jouer le match retour mercredi ? C’était incroyable! Les gars de TF1 nous ont dit : “Si chaque année il pouvait y avoir des équipes comme vous”.

Patrice Pourrat

Et le football dans tout ça, vous nous dites ? Eh bien, malheureusement, après une série d’exploits, les Castériots je ne peux rien faire contre le FC Metz. Ils ont perdu par quatre buts, tant à l’aller qu’au retour, sans jamais pouvoir rivaliser avec leurs adversaires. Deux défaites 4-0. Mais le plus important est ailleurs.

Le public du stade des Charmilles célèbre ses héros. Sur l’une des pancartes, on reconnaît le portrait du gardien de but, le regretté Christian Grenier, dit « Kiki ». ©document envoyé à actu.fr

Comme les pros, les joueurs du Castets signent des autographes

« À la fin du match, au stade Saint-Symphorien, avant de monter dans le bus, des gars de là-bas nous demandaient des autographes, se souvient Thierry Laquêche. « Eh bien, la moitié de l’équipe a fait des centres », raconte en riant Jean-Pierre Lahiteau.

Des supporters messins nous ont emmenés en boîte de nuit. On nous a annoncé au micro, on a reçu une standing ovation. En fin de soirée, nous étions derrière le comptoir. C’est nous qui servions !

Thierry Laquêche

Aujourd’hui encore, quarante ans plus tard, dans la région, on parle encore de cette épopée, gravée à jamais. au panthéon du sport girondin. Le pire, c’est que tout cela n’est presque jamais arrivé. Parce que CA Castets était sur le point de tomber à l’eau dès son premier match de Coupe de France.

Un manque de licences qui coûte presque cher…

« C’était contre les Sabres, une équipe de district », se souvient Patrice Pourrat. Nous n’avions pas les permis ! L’arbitre nous a dit : “Seuls ceux qui ont la carte d’identité joueront”. Nous avons joué la première mi-temps avec seulement huit joueurs. » Aux Citrons, les deux équipes sont au coude à coude (1-1).

Heureusement, les licences arrivent… Et le CAC peut enfin évoluer à onze. En seconde période, les Sud-Girondins ont inscrit trois buts. Score final : 4-1. Ils ne le savent pas encore, mais ils viennent d’écrire les premières lignes deune des plus belles histoires du football français. Une histoire qui les emmènera à 7e ciel. Et qui marquera à jamais son club. Leur village. Leur région.

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