Puisqu’on savait qu’atteindre les séries éliminatoires représentait un mandat ambitieux pour le Canadien en 2024-2025, la direction a exprimé le souhait d’être au moins dans le portrait des séries éliminatoires à la fin de la saison. Ou « dans le mix », comme on le dit depuis plusieurs semaines.
Lors du tournoi de golf de l’équipe à la mi-septembre, personne n’a cependant quantifié cet objectif. Nous avons simplement déclaré que notre objectif était de jouer des « matchs significatifs » le plus tard possible. Autrement dit, des matches qui auraient un impact sur le classement et qui permettraient à l’équipe de conserver l’espoir de prolonger sa saison.
Pourtant, après 16 matches, on peut se demander si le « mix » n’est pas déjà hors de portée. Cela peut paraître cruellement précoce, surtout avec 66 matches encore au calendrier. Mais différents indices mènent à cette conclusion.
Pour y voir plus clair, nous avons tenté de trouver une définition du « mix » en déterminant d’abord combien de points sont nécessaires pour accéder aux séries éliminatoires.
En neuf saisons complètes1 depuis 2013-2014, depuis la mise en place du système de qualification actuel, une moyenne de 95 points est nécessaire pour accéder au tournoi de printemps. Parmi les 18 clubs de notre échantillon qui se sont entre-temps qualifiés pour la dernière fois à l’Est ou à l’Ouest, la médiane est également de 95 points ; environ la moitié avait besoin de plus, et l’autre moitié y est arrivée avec une récolte inférieure.
Sur la dernière décennie donc, 17 fois sur 18, le dernier club qualifié a amassé 90 à 100 points. Seul le Wild du Minnesota 2015-2016 a participé aux séries éliminatoires avec 87 points.
Année après année, à 100 points, une équipe est qualifiée. On peut donc établir que de 95 à 99 points, les chances de qualification sont excellentes, et qu’elles restent appréciables de 90 à 94 points, selon la qualité de la compétition lors d’une saison donnée. Nous proposons donc de fixer la limite inférieure du « mix » à 85 points, soit 5 de moins.
Avec ces quatre cibles en tête (85, 90, 95 et 100), nous avons cartographié la progression du Canadien, saison par saison, depuis 2021-2022.
L’exercice est évidemment imparfait, puisqu’aucune équipe n’accumule les points de façon aussi linéaire, mais il permet néanmoins de mesurer, après chaque match, où se situe l’organisation par rapport à son objectif global.
On voit par exemple qu’en 2021-2022, saison qui a sonné le glas de l’administration Bergevin, le club n’a jamais pu rien espérer. En 2022-2023, le Tricolore a tenu le coup pendant une trentaine de matchs. En 2023-2024, il est resté proche du « mix » pendant 50 matchs avant de prendre son envol. À titre de référence, précisons que c’est à peu près à cette époque que Sean Monahan a été échangé.
Après 16 matchs, en 2024-2025, le Canadien est considérablement en retard, même s’il a réussi, lundi, à mettre fin à une longue série de défaites. Pour être sur la courbe « mix », il lui faudrait avoir cumulé 16,6 points, et pour commencer à parler de séries, 17,6 points. Cependant, il n’en possède que 12.
Les joueurs et les entraîneurs se souviendront qu’il reste encore beaucoup de hockey à jouer, et c’est vrai. Soulignons cependant deux choses. Premièrement, la barre des 20 matchs approche à grands pas. Ce premier quart de saison coïncide approximativement avec le Thanksgiving américain et, depuis des années, une grande partie du portrait de la série reste inchangée depuis ce moment jusqu’à la fin du calendrier. Le Canadien manquera probablement cette première rencontre.
Ensuite, notre projection est basée sur un calendrier de 82 matchs. Cependant, les équipes ne gèrent pas leurs effectifs avec ce seul objectif en tête. Là où la distance entre le club et le « mix » sera le plus critique, c’est à la date limite des échanges, prévue le 7 mars 2025. À ce moment-là, le Canadien aura disputé 62 matchs.
Nous avons donc calculé le rythme que devront afficher les hommes de Martin St-Louis lors des 46 matches qui les séparent de cette date fatidique pour revenir soit au « mix », soit à un scénario playoffs.
- Le « mix » : .565
- Série possible : .609
- Séries probables : 0,652
- Série assurée : .685
Il faudrait donc que le Tricolore amasse 56,5 % des points disponibles d’ici le 7 mars pour demeurer dans le « mix ». Il devrait alors rapidement faire le plein de victoires, car chaque défaite en prolongation ou en tirs de barrage, qui lui donnerait un point sur deux, l’éloignerait plus de son but plutôt que de l’en rapprocher. Et chaque recul du temps réglementaire ne ferait que rendre la montée plus raide.
L’objectif, pour rester dans le match, est fixé à 64,2 points après 62 matchs. En dessous de ce seuil, on imagine que la direction n’hésiterait pas à échanger ses joueurs les plus attractifs à l’approche de la date limite des échanges – Jake Evans, David Savard, Joel Armia – avec pour effet probable de voir le club plonger en fin de parcours.
La mission n’est évidemment pas impossible. Mais c’est très dangereux. Car il faudra une équipe qui n’a jamais approché la barre des .500 non seulement pour l’atteindre, mais aussi pour la dépasser d’une marge appréciable.
Pas impossible, certes. Mais certainement peu probable.
1. Hors saisons raccourcies 2019-2020 et 2021.