Les prix, pas la seule raison du succès des pharmacies discount

Des dizaines de milliers de références avec des prix qui défient toute concurrence, ou du moins ceux des pharmacies : la recette est un succès au Belux. Medi-Market, sacrée Entreprise Belge de l’Année 2023, vient d’ouvrir son 10e magasin au Luxembourg, au centre commercial Opkorn à Differdange. Un établissement supplémentaire pour un maillage renforcé du territoire luxembourgeois, après la Belgique. Le modèle de parapharmacie « discount », longtemps dénigré par les pharmaciens, s’est démocratisé en s’inspirant des méthodes et des codes de la grande distribution.

L’entreprise lancée en 2014 souhaitait mettre fin à une forme de monopole pharmaceutique sur les produits sans ordonnance, qui facturaient des prix plus élevés. « Dès le départ, c’était un concept qui se voulait disruptif, imaginé par mon prédécesseur, Yvan Verougstraete, que j’ai remplacé il y a deux ou trois ans. Nous avons souhaité changer ce phénomène avec un concept réunissant santé et bien-être sous un même toit, avec un large assortiment de références au meilleur prix : en moyenne 20% inférieur à ceux des pharmacies traditionnelles. Nous avons également développé plusieurs concepts : pharmacies classiques, parapharmacies et instituts de beauté », rappelle le PDG de l’entreprise, Cédric Antoine. Des prix attractifs rendus possibles par des volumes de commandes importants, pour l’enseigne aux 140 points de vente répartis en Belgique, au Luxembourg et en Italie.

Medi-Market est né dans la lutte, car il n’est jamais agréable, dans un secteur, de voir un concurrent arriver et se développer.

Cédric Antoine, PDG , Médi-Marché

Sur les marchés luxembourgeois et italien, contrairement à la Belgique, pas de vente de médicaments : seules des parapharmacies ont été déployées. « Il est commercialement plus facile de développer un réseau de parapharmacies, car dans la plupart des pays le nombre de pharmacies est réglementé. Mais clairement, nous sommes un acteur qui a une légitimité dans le développement du pôle pharmacie également», estime Cédric Antoine, selon qui l’implantation sur le marché luxembourgeois s’est faite tout naturellement.

« Il existe encore souvent une corrélation commerciale entre la Belgique et le Luxembourg. Nous sommes dans un pays où la configuration des pharmacies était un peu similaire à celle de la Belgique : des pharmacies de proximité plutôt petites, et non de grands espaces comme celles que nous développons, où nous rassemblons une offre très attractive et compétitive. avec un bon assortiment de marques, et qui à notre avis fait la différence aujourd’hui», explique ce bon connaisseur du marché luxembourgeois, auparavant directeur commercial du centre commercial Cora à Foetz.

Positionnez-vous comme magasin de destination

Après dix ans d’activité, le scepticisme initial semble s’être estompé, selon Cédric Antoine. « Medi-Market est né dans le combat, car il n’est jamais agréable, dans un secteur, de voir un concurrent arriver et se développer. Les pharmaciens, s’ils veulent bien l’admettre, ont réalisé que nous attirions une nouvelle clientèle, en nous positionnant comme magasin de destination. Avec eux, c’est une combinaison de savoir-faire qui s’opère », défend Cédric Antoine.

Un magasin de destination est un point de vente considéré comme un lieu de visite ou de détente, pour lequel les consommateurs sont prêts à parcourir une longue distance dans le seul but d’y faire des achats, en raison de son offre ou de son caractère attractif. « Plutôt que de lutter sur nos points forts, les pharmaciens peuvent se concentrer sur leur métier : vendre des médicaments, conseiller les patients et développer de nouvelles compétences, comme la vaccination ou les différents types de dépistage. Les métiers de santé se transforment et cela ouvre de nouvelles possibilités qui font que l’on ne se concentre plus sur ce côté « combat », où chacun a peur de l’autre. De l’eau a coulé sous les ponts», poursuit Cédric Antoine.

Contacté pour connaître le point de vue des pharmaciens, le président du Syndicat des pharmaciens et patron de la Pharmacie du Cygne, Alain de Bourcy, n’a pas souhaité se prononcer sur le sujet, « ni en tant que président ni en tant que pharmacien ».

La compétition se joue également en ligne

Concurrent direct qui partage le point de vue de Medi-Market : la parapharmacie Lafayette, avenue de la Gare, ouverte à l’été 2023. « Quand je suis arrivé, je ne me suis pas seulement fait des amis. J’étais un peu l’homme qu’on tue au milieu de trois pharmacies. Désormais, Medi-Market est également présent, juste en face. Et les pharmaciens ont compris qu’ils devaient s’adapter. On sait par exemple que lorsqu’un McDonald’s ouvre quelque part, un Burger King n’est jamais loin. Je pense que la concurrence peut dynamiser le marché, les clients se tournent vers les deux et comparent. Nous attachons de l’importance à un service de qualité, afin que les gens soient bien conseillés et informés, car, à mon avis, c’est la base du succès. C’est pourquoi je pense que Medi-Market est une bonne concurrence. Nos gammes de produits comprennent des produits que l’un ou l’autre ne fait pas, je pense que nous sommes plutôt complémentaires », déclare Mikaël Wallerich, le gérant de Lafayette, dont la recette connaît également un succès en France. , avec un modèle similaire à son voisin belge.

La population est de plus en plus attentive à ce qu’elle fait, que ce soit par rapport au prix bien sûr, mais aussi en faisant attention à la qualité des produits.

Mikaël Wallerich, directeur, Parapharmacie Lafayette, Luxembourg

Lancées il y a 15 ans, les parapharmacies Lafayette ont également bâti leur réputation grâce à des prix bas, une gamme étendue à des dizaines de milliers de produits et une importance accordée au conseil et à l’expérience. 250 points de vente couvrent le territoire en France, avec, comme Medi-Market encore, une offre en ligne pour une distribution omnicanale. La présence en ligne est un canal sur lequel misent certaines pharmacies luxembourgeoises, comme la Pharmacie Gillain avec mapharmacie.lu, la Pharmacie du Globe, celle de Steinfort ou encore de Pétange.

Entre sensibilisation et #pharmaciefrancaise

Dans ce succès partagé par les deux marques, “le prix n’est pas le seul élément”, appuie le patron belge. La large gamme de produits et l’accent mis sur le conseil n’expliquent pas non plus entièrement la recette du succès des pharmacies low-cost. « Depuis le Covid, il y a eu un changement de mentalité. La santé est revenue au premier plan. Nous avons des citoyens qui comprennent que le capital santé est important et qu’il faut apprendre à le comprendre, à en prendre soin et à le respecter. Je pense que c’est un phénomène de transformation sociétale qui s’effectuera sur le long terme. En tant qu’acteurs de la santé, nous y sommes attentifs », note Cédric Antoine.

Un changement également constaté par son concurrent. « Je pense que la population fait plus attention à ce qu’elle fait, que ce soit le prix bien sûr, mais aussi en termes d’hygiène et d’alimentation, en faisant attention à la qualité des produits. Les modes de consommation ont changé», estime Mikaël Wallerich.

« Il y a une prise de conscience et, au même titre que le scoring pour les produits alimentaires, il n’est pas exclu qu’il y ait un jour quelque chose de similaire pour la santé, pour connaître l’impact des produits sur la santé. Parce que nous allons aussi vers une société où la santé ne sera plus seulement curative, mais aussi préventive : prendre soin de son corps, de sa peau, de son sommeil, de son bien-être… C’est quelque chose qui entre dans les mœurs et qui prendra de plus en plus d’espace », poursuit Cédric Antoine. Il existe d’ailleurs au moins une dizaine d’applications permettant de noter la composition des produits après les avoir scannés.

>>>>>>

Reprenant les mêmes stratégies que le modèle belge, le modèle français des parapharmacies Lafayette compte 250 points de vente en France, et un au Luxembourg, avenue de la Gare. (Photo : Mikaël Wallerich)

A placer également dans la case des évolutions sociétales, les réseaux sociaux comme outil de promotion qui peuvent peut-être aussi expliquer les raisons de ce succès, avec de plus en plus d’influenceurs vantant les mérites de produits un peu plus haut de gamme. , que l’on trouve en pharmacie. C’est ce que l’on appelle le phénomène « pharmacie française », en référence à l’engouement mondial observé sur les réseaux sociaux pour les produits de beauté et de soin, notamment ceux vendus dans les pharmacies françaises. Un phénomène qui symbolise une approche de la beauté centrée sur la qualité, l’efficacité et l’accessibilité, le trio sur lequel misent à juste titre Medi-Market et Lafayette.

Et tous deux n’ont pas fini de surfer sur la vague. Medi-Market a toujours des ambitions pour le marché luxembourgeois. « Nous sommes progressivement devenus leader sur notre marché en Belgique avec 18 % de part de marché. Je ne connais pas la part exacte du marché luxembourgeois, mais nous sommes aussi devenus une référence, avec des magasins qui sont appréciés des clients et qui se portent bien. Notre indice de satisfaction, mesuré par une méthode indépendante, présente un net promoteur score de 68, ce qui est très élevé dans notre métier de distribution, nous en sommes donc très fiers », déclare Cédric Antoine, qui n’exclut pas de se développer également. , les instituts de beauté Medi-Market, comme en Belgique.

« Cela dépend beaucoup de la taille des projets que nous développons, car nous sommes toujours locataires de notre espace et avons des contraintes. Dans nos instituts, nous avons historiquement commencé par proposer des soins basés sur la technologie, comme l’épilation définitive et les programmes minceur. Nous travaillons aujourd’hui à élargir cette offre, et lorsque nous aurons développé un mix vraiment complet, nous souhaiterons sans doute aussi le mettre en œuvre au Luxembourg», suggère-t-il. En attendant, des projets de nouvelles pharmacies sont toujours à l’étude : « Il est possible que dans les mois et années à venir, nous ayons quatre ou cinq projets phares qui émergent dans le pays. »

Le patron de la pharmacie Lafayette réfléchit également à des évolutions, mais à un rythme plus lent, « le temps de bien comprendre le marché ». La marque fêtera son premier anniversaire cet été. « Le premier bilan est positif pour le moment, on est à la hauteur des prévisions, on est même un peu au-dessus. Mais il faut attendre deux ou trois ans avant qu’on puisse avoir les mêmes statistiques qu’en France. Pour l’avenir, je n’ai pas du tout l’intention de me lancer dans la pharmacie, mais de développer la parapharmacie, et pourquoi pas plus tard l’optique et le matériel médical, à l’instar du modèle français », prédit Mikaël Wallerich.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Décès du présentateur et écrivain lyonnais Bernard Pivot
NEXT Résultats du repêchage de la LCF 2024 – Kevin Mital avec les Argonauts