Les paris de Pamela Brind’Amour

Même si elle y travaillait depuis 20 ans, Pamela Brind’Amour n’a pas fêté sa qualification pour les Jeux Olympiques de Paris. Cela s’est confirmé mi-mars, lors de la Coupe du monde à Saint-Nicolas, en Belgique, l’un des derniers événements d’un processus entamé un an plus tôt.


Publié à 1h29

Mis à jour à 5h00

Depuis sa médaille d’argent aux Championnats panaméricains au début de l’été 2023, l’escrimeuse de Sainte-Martine savait que ses chances de capter le seul quota réservé à la zone Amérique étaient excellentes. En Belgique, seule une Argentine pourrait la battre. Il lui fallait pourtant remporter le tournoi pour y parvenir, une issue improbable pour celle qui flirtait alors autour des 75 ans.e rang mondial.

Brind’Amour était chaude lorsqu’elle atteint la table des 32. « À un moment donné, je me suis dit : elle ne va pas gagner là-bas ! »

L’épéiste de 31 ans était déjà rentrée à l’hôtel lorsque l’Argentine a finalement perdu. De son côté, elle s’est arrêtée au tableau des 64, après son « pire match de l’année ». « Terrible match ! », sourit-elle un mois plus tard, lors d’une entrevue réalisée au Mūneris Performance, un gym du Plateau Mont-Royal où elle fait sa préparation physique.

Cette défaite au goût amer a quelque peu gâché cette sélection olympique. En fait, elle a attendu le lendemain pour appeler ses parents. Avec un peu de recul, la tireuse se permet désormais d’en rire, sachant d’où elle vient.

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PHOTO PRISE DU COMPTE INSTAGRAM ITSPAM.BA

Pamela Brind’Amour

Cinq ans plus tôt, lors de la même Coupe du monde à Saint-Nicolas, elle s’était déchiré le ligament croisé antérieur du genou gauche dans un mouvement vers l’arrière comme si elle avait fait des « millions » sur un ring d’escrime. Cette blessure est survenue un mois avant le début du processus de qualification pour les Jeux de Tokyo.

Malgré ses articulations faibles, elle s’est rendue aux Championnats panaméricains, où elle a contribué à la médaille d’argent de l’équipe canadienne, un excellent début pour avoir une délégation complète de trois sabres à Tokyo. Elle était alors deuxième du pays ; les chances qu’elle soit parmi eux étaient donc grandes. Cependant, le ligament a complètement cédé un mois plus tard aux Championnats du monde. L’opération était inévitable.

Pour « terminer sur une bonne note », l’escrimeuse a participé aux Jeux panaméricains de Lima, où elle a remporté le bronze par équipe. À son retour, elle s’est fait reconstruire le genou à l’hôpital Maisonneuve-Rosemont.

“Je pensais à la retraite”

Après une longue convalescence, Pamela Brind’Amour se préparait à reprendre la compétition lorsque la pandémie a frappé en mars 2020. Comme sa saison était sur pause et qu’elle avait du temps libre, elle a répondu à l’appel du gouvernement pour travailler en CHSLD, ce qu’elle a fait pour une année.

« J’étais jeune, en bonne santé, c’était comme si j’y allais. Cela m’a aussi vraiment rendu heureux. »

Les vagues de COVID-19 et les perturbations du calendrier sportif ont retardé son retour à la compétition. Elle a profité de cette pause forcée pour renforcer son genou, terminer son baccalauréat en kinésiologie et entamer une maîtrise dans le même domaine.

L’escrime n’était plus au sommet de ses priorités ; elle a donc raté les premières Coupes du monde à l’automne 2021.

Je pensais à la retraite. J’avais un peu peur de revenir et de ne plus être à mon niveau habituel.

Pamela Brind’Amour

En novembre de la même année, elle remporte cependant l’or aux championnats canadiens, deux ans et demi après sa dernière compétition. Cette victoire a provoqué une étincelle : « Je me suis dit : peut-être qu’il me reste encore un petit quelque chose. »

Au printemps 2022, elle a donc participé à trois Coupes du monde et un Grand Prix en Europe et en Tunisie. Entre deux voyages, elle est retournée vivre chez ses parents à Sainte-Martine, en Montérégie, pour économiser de l’argent. Son intention : tout tenter pour se qualifier à Paris.

« Oui, j’ai pris un risque, mais dans ma tête, il était clair que j’avais tout ce qu’il fallait pour réussir. […] J’étais tellement sûr de l’avoir en moi. »

Non sélectionnée pour les Mondiaux, elle en a profité pour se perfectionner lors de stages en Bulgarie, en Italie et à Toronto, une initiative personnelle. «J’ai pu me défendre contre ces filles. Cela m’a donné un avantage et dès que j’ai recommencé en septembre, cela s’est vu. »

Parmi ses faits d’armes en 2023, elle a battu la Grecque Déspina Georgiádou, alors leader mondial, lors de la Coupe du monde d’Athènes. « C’était un moment vraiment cool ! Je signais des autographes à des petites filles grecques parce que je venais de battre leur idole. J’étais la star pendant une journée ! »

Les vertus de Fast food

Forte de cette victoire, elle remporte cette médaille d’argent aux Championnats panaméricains de Lima, l’impulsion dont elle avait besoin pour entamer sa campagne olympique. “Sans cette médaille, je pense que ça aurait été fini”, reconnaît celui qui a actuellement 36 ans.e rang mondial. J’aurais pris ma retraite l’été dernier. »

Avec toute l’énergie consacrée à son sport, un tel scénario aurait été dommage pour celle qui rêve des Jeux olympiques depuis son enfance à Sainte-Martine. Bonne joueuse de basket-ball – son idole est LeBron James et elle admire la star de l’UConn Paige Bueckers – elle n’avait aucun intérêt pour l’escrime lorsqu’elle était adolescente. Eh bien oui : elle a accompagné sa mère vendredi soir à l’entraînement de son jeune frère au club Gadbois, à Saint-Henri. Pour qu’elle puisse manger Fast food sur le chemin du retour : « C’est ce qui m’a le plus attiré. Grâce à cela, je suis arrivé aux Jeux ! »

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PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Pamela Brind’Amour

Parce qu’elle a aussi commencé à tirer. À 14 ans, les Championnats canadiens avaient lieu à Montréal. Elle a décroché le bronze dans sa catégorie au fleuret, sa première arme.

Motivé par ce succès inattendu, Brind’Amour entreprend des démarches pour trouver les meilleurs entraîneur dans la ville. Elle a évidemment croisé Henri Sassine et son club Cœur de Lion, au collège Regina Assumpta, à Ahuntsic. Originaire de Chibougamau, le maître d’armes récemment décédé avait déjà entraîné huit athlètes olympiques. Inscrite dans un programme sport-études à Beauharnois, la recrue passait chaque jour deux heures dans les transports en commun pour assister aux cours de M. Sassine. Sa mère est venue la chercher le soir, pour encore une heure de route jusqu’à Sainte-Martine.

Le fleurettiste a progressé jusqu’à une médaille d’argent aux Championnats panaméricains juniors en 2013. Quelques mois plus tard, d’un coup, le jeune homme de 20 ans abandonne le fleuret pour adopter le sabre, une arme plus dynamique et plus intense. ce qui correspondait davantage à sa personnalité. Le fleuret féminin était également en plein essor sur la scène nationale, ce qui nuisait à ses chances de participer aux Jeux de Rio en 2016.

La transition a été tout un défi. « Au plus haut niveau, c’est comme pratiquer un nouveau sport. J’ai dû attendre 2018 pour atteindre mon premier score de 64. Il m’a fallu environ cinq ans pour démontrer que j’étais capable de concourir. Puis, alors que je commençais à aller mieux, je me suis blessé au genou. »

Henri Sassine est décédé en février à l’âge de 83 ans, un mois avant la qualification de Brind’Amour, qui sera donc la 10e Athlète olympique à avoir bénéficié de ses enseignements. « Il souffrait de la maladie d’Alzheimer et il ne m’a pas reconnu la dernière fois que je l’ai vu, l’année dernière. J’aurais aimé qu’il le sache. Cela m’a rendu un peu triste. »

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PHOTO PATRICK SANFAÇON, ARCHIVES LA PRESSE

Entraîneur d’escrime Henri Sassine en 2016

Sans ce mentor, elle estime qu’elle n’aurait jamais atteint un tel niveau. « J’ai été avec lui de 14 à 22 ans environ, une étape cruciale dans le développement d’un athlète. C’est lui qui m’a appris la discipline, la rigueur, le travail. »

Par ses propres moyens

À 22 ans, elle poursuit son développement au collège Brébeuf auprès de Jean-Marie Banos, élève de Sassine à Chibougamau et quadruple escrimeur olympique. Depuis que Banos a pris sa retraite l’année dernière, elle est entraînée par son successeur, le Français Artur Zatko, qui est également sélectionneur national.

Brind’Amour a tout mis en œuvre pour arriver à Paris. Elle couvre tous ses frais de formation, de déplacement, d’équipement, etc., soit environ 40 000 $ depuis 2022, calcule-t-elle. Elle ne reçoit aucun financement de Sport Canada puisqu’elle a raté sa qualification d’un point ou « d’une touche », déplore-t-elle.

Elle s’estime néanmoins chanceuse que sa fédération provinciale ait pris des mesures pour la rendre admissible au programme Équipe Québec, d’une valeur de 10 000 $ par année. Elle bénéficie d’un crédit Airbnb d’environ 3 000 $ grâce à un partenariat avec le Comité International Olympique. Sinon, elle puise dans ses économies et compte sur le soutien indéfectible de ses parents.

Le 29 juillet, Pamela Brind’Amour n’aura pas volé sa place lorsqu’elle baissera son masque pour son premier duel olympique au Grand Palais à Paris.

 
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