Elu en mars 2021 à la tête de la Ligue nationale de rugby, le patron du rugby professionnel compte sur un bilan largement favorable, dopé par les droits TV, pour briguer un second mandat. Et dans le but de fédérer les bonnes volontés de tous ceux qui sont prêts à s’impliquer au nom de l’intérêt général.
Vendredi, 15 heures. Le téléphone sonne quatre fois avant que René Bouscatel ne décroche enfin. Le président de la LNR est en route, direction l’ouest pour sa tournée des stades, avec la ProD2 au programme : « J’étais hier à Brive-Montauban et ce soir je me rends à Soyaux-Angoulême – Valence-Romans. L’année dernière, j’ai joué 64 matchs, dont 47 en ProD2 et Top14. J’essaie de voir tous les clubs au moins une fois à la maison, j’en suis déjà à plus de la moitié cette saison. La voiture est arrêtée quelques minutes et l’entretien peut commencer. Bilan et ambitions.
Vous êtes très présent sur le terrain. Pourquoi est-ce important pour vous ?
J’ai besoin de ce lien direct avec les clubs, les managers et les présidents. Cela me permet d’interagir avec des personnes actuelles ou anciennes, de faire le point et d’aborder les questions d’avenir selon les préoccupations de chacun : ici je rencontre des élus autour de projets structurants, ailleurs des partenaires… C’est essentiel à mes yeux pour compléter l’action du Bureau. et le Comité directeur de la Ligue. Nous construisons tous ensemble.
Ne perdons plus de temps et allons droit au but : êtes-vous candidat à un second mandat à la présidence de la Ligue nationale de rugby ?
Oui, je suis candidat. Bien sûr. D’abord parce que je m’en sens très capable et que je suis extrêmement motivé et enthousiaste. J’ai envie de continuer et contrairement à ce que j’entends parfois, l’âge n’est ni une barrière ni un critère… Qui peut se targuer d’être aussi présent et engagé que moi sur le terrain ? Je souhaite avant tout poursuivre la dynamique construite depuis quatre ans avec les résultats que l’on connaît.
C’est à dire ?
On disait qu’on s’était autoproclamé meilleur championnat du monde avec le Top 14. Mais ce n’est plus une autoproclamation, c’est une réalité. On voit aussi l’évolution que j’ai voulu apporter à la Pro D2 pour la rapprocher le plus possible du Top 14. C’est une magnifique compétition.
Sans oublier le rugby féminin, que nous essayons de soutenir, désormais en accord avec la FFR. Après avoir décidé d’inclure le rugby à sept féminin dans le programme « In Extenso Super Seven », nous avons réussi à convaincre Canal+ de diffuser une demi-douzaine de matchs « premium » du championnat féminin à 15 ainsi que des équipes masculines. . Dernier point, la réforme des statuts nous amène à ouvrir les portes du prochain comité directeur à la représentation féminine.
Comment y parvenir alors que tous les présidents de club sont des hommes ?
Vous oubliez les personnalités extérieures.
Revenons au plan stratégique que vous avez évoqué. Il a clairement été choisi de ne pas envisager la possibilité d’avoir un futur président salarié…
La question a été largement débattue avant d’admettre que, compte tenu de notre organisation avec un Directeur Général, le Président de la Ligue ne devrait pas être rémunéré.
Cela constitue un obstacle au rajeunissement des candidats potentiels.
Pourtant, j’ai lu récemment dans la presse le nom d’un jeune président de club…
Vous parlez certainement de Yann Roubert, le président du LOU. A notre connaissance, il ne s’est pas déclaré…
Je ne parlerai pas pour lui et je ne révélerai aucune discussion personnelle que nous avons pu avoir. D’après ce que j’ai compris, certains l’auraient demandé. A voir s’il décide de s’engager. D’autres y penseront certainement à un moment donné. C’est la règle et c’est même tout à fait sain.
Sauf qu’hormis votre élection, les précédentes avaient toujours été décidées avant les votes, dans une forme de consensus et d’union.
Lorsque je me suis lancé en 2021, je suis apparu un peu à la dernière minute, en candidat libre. Mais j’avais l’envie d’instaurer un mode de fonctionnement participatif et je crois que cela s’est fait en apaisant les relations avec la Fédération concernant l’équipe de France. Il a fallu arrêter les querelles permanentes et aujourd’hui, nous travaillons main dans la main avec la Fédé et la formation française est valorisée comme jamais. Ce sont nos clubs qui « font désormais ressortir » les grandes stars de notre sport.
Comment s’est concrétisée cette « opération plus participative » ?
Il a d’abord fallu arriver à rassembler tout le monde, à prendre des décisions beaucoup plus collectives et solidaires. Ce qu’on a fait, même s’il y aura toujours un club pour considérer, sur un point ou un autre, qu’une règle doit évoluer. C’est possible, nous en discutons collectivement.
Depuis plusieurs semaines, vous avez commencé à consulter les présidents susceptibles de rejoindre votre future liste…
Non, j’ai juste eu quelques échanges informels.
Alors, qui vous accompagnera ? Allez-vous jouer l’ouverture que certains préconisent largement ?
Tout d’abord, j’ai une équipe autour de moi, qui sera certainement la base du prochain projet si les gens souhaitent continuer. Mais l’ouverture dont vous parlez s’est déjà concrétisée avec l’émergence de nouveaux dirigeants au cours des quatre dernières années. S’ils ou d’autres sont prêts à se mobiliser, ils seront les bienvenus de la manière la plus claire possible pour poursuivre l’excellent travail que nous avons accompli avec toutes les parties prenantes du rugby professionnel. Et je ne parle pas seulement des droits TV qui sont garantis jusqu’en 2032 (700 millions d’euros pour la période 2027-2032). Décidément, la Ligue se porte bien.
Développez, s’il vous plaît.
Il y a encore des problèmes à résoudre, certes, mais nous avons deux compétitions magnifiques, avec 30 clubs impliqués et des modèles forts qui émergent. Quand je vois l’évolution de clubs comme La Rochelle, Bordeaux ou Bayonne par exemple, c’est fantastique. D’autres sont moins dans les économies réelles, soutenus à leur guise par les investisseurs, et il faut aussi les accompagner dans leur développement. Bref, chacun doit être considéré et entendu ; la présence de tous est absolument nécessaire lors des réunions. Enfin, près d’une centaine de dirigeants qui s’impliquent dans nos commissions.
Quels seront vos critères lors de la constitution de votre équipe ?
D’abord la volonté de s’engager pour l’intérêt général. Et puis, évidemment, la compétence. L’ouverture enfin : je veux donner la parole à tous ceux qui sont prêts à agir, au-delà de leurs intérêts particuliers.
Quels sont vos projets pour un éventuel second mandat ?
Je veux m’inscrire dans la continuité de ce que nous avons mis en place autour de piliers très forts que sont le sport, l’économie, la féminisation, le médical et l’arbitrage. Il y a aussi, j’y reviens, du respect pour ce mode de fonctionnement que nous avons adopté et des points d’avancement réguliers pour améliorer ce qui doit l’être. Nous ne partons plus d’une feuille blanche : le cap est fixé à travers le plan stratégique que nous avons voté depuis plus de 4 ans et qui nous engage depuis l’année dernière. Mais, encore une fois, nous saurons changer ce qui doit l’être et nous serons flexibles dans notre évolution. La montre est permanente.
L’enjeu sera aussi de se projeter dans l’avenir et peut-être d’accompagner un futur président capable de vous succéder…
J’imagine et j’espère qu’il pourrait y avoir plusieurs successeurs potentiels qui émergeront autour de ces 4 années et qui prendront le relais à l’expiration de mon mandat.
Selon vous, qui aurait le profil ?
Ce n’est pas une question d’actualité et il ne m’appartient pas de dire qui devrait emboîter le pas. La grosse difficulté pour un président de Ligue, c’est que tant qu’il n’est pas élu, il s’intéresse logiquement plus à son club qu’à l’ensemble. Cependant, après l’élection, tout change et seul l’intérêt général du rugby prime dans le respect des structures, de l’histoire et des projets de chacun.
Oui mais…
(Il coupe) Ce qui est le plus important, c’est la compétition que nous créons. Il faut que ce soit compétitif, avec du suspense jusqu’au bout.
Un mot sur le Salary Cap et la question de la rémunération des agents… Des sujets qui divisent visiblement les clubs. Quelle est votre vision de ces sujets ?
Tout d’abord le plafond salarial. La décision a été prise sous le mandat de Paul Goze de la baisser (-300 000 euros par saison) mais les présidents ont voulu revenir sur cette décision. Nous avons trouvé une solution intermédiaire en le gelant pendant quelques années. Le sujet revient sur la table : certains veulent le baisser et d’autres veulent l’augmenter. Alors, j’ai mis tout cela à l’ordre du jour de la prochaine réunion des présidents et nous verrons ce qu’ils décideront. Ma position est claire : je suis contre son augmentation et même favorable à une réduction à condition qu’elle ne mette pas en danger le rugby français. Il faut conserver les moyens d’avoir des clubs compétitifs, notamment en ce qui concerne la compétition internationale.
Qu’en est-il de la rémunération des agents ?
A la demande des clubs, nous recherchons des éléments pour mieux encadrer leur mandat. Là encore, ce seront les présidents qui choisiront.