Jordan Bardella, l’enfant gâté du lepénisme : Actualités – .

Jordan Bardella, 28 ans, toujours plus proche de Matignon depuis le succès du Rassemblement national au premier tour des législatives, s’est imposé comme l’enfant chéri et l’incarnation du pénisme sans même en porter le nom.

Depuis l’annonce de la dissolution, il s’essaye au costume trois pièces dont l’austérité doit souligner le sérieux et la rigueur.

Il lui a aussi parfois fallu refouler ceux qui brandissaient leur téléphone à chacune de ses apparitions : un crève-cœur presque pour celui qui a fait de cette stratégie du selfie une marque de fabrique depuis des mois pour asseoir sa popularité.

A quelques jours d’une éventuelle accession à Matignon, il s’agit de rééquilibrer cette image de pop star aux chemises et vestes toujours plus moulantes, entourée de groupies à chaque sortie de gala, et de présenter le visage d’un putatif Premier ministre de la France.

Mi-juin, Marine Le Pen a confirmé que ce serait lui, et non elle, qui deviendrait chef du gouvernement si elle obtenait la majorité à l’Assemblée.

Après cinquante ans de pénisme, c’est donc un ancien afficheur de même pas trente ans qui doit installer l’extrême droite au pouvoir.

« Marine Le Pen le considère comme un fils spirituel », estime un député proche des deux. Presque un avantage dans cette famille où les liens du sang n’ont jamais empêché trahisons et rancœurs.

Bardella, l’héritier du clan ? Le jeune homme aime jouer les ingénus « nés en 1995 » pour mieux renvoyer le passé sulfureux du Front national et les dérives de Jean-Marie Le Pen à une histoire révolue.

Une grosse corde qui casse parfois, notamment lorsqu’il explique en novembre que le fondateur du FN n’était « pas antisémite », malgré les condamnations judiciaires. Face au scandale, il est contraint de faire marche arrière.

– Des identitaires aux souverainistes –

Celui qui se présente aujourd’hui comme le leader du camp de la « raison » et de la « modération » face à « l’extrémisme » a néanmoins lié son adolescence et sa jeunesse au lepénisme pur, voire radical.

A 18 ans, il fait la queue pour se faire prendre en photo aux côtés du « diable de la République », Jean-Marie Le Pen. Plus tard, c’est sous l’œil bienveillant de Frédéric Chatillon, figure du Groupe Union Défense (GUD) dans les années 90, que Jordan Bardella débute son apprentissage politique, tout en nouant une relation intime avec sa fille.

L’étudiant Bardella, qui s’est inscrit en école de géographie après son bac éco avec mention, fréquente les mêmes bars que les « identitaires » de sa génération, rive gauche à Paris. Et c’est auprès de Philippe Vardon, ancien leader du groupuscule d’extrême droite Bloc identitaire, qu’il a fait ses armes au Rassemblement national.

Le militant saint-denisien, qui a sorti sa carte en 2012, a été rapidement repéré par le parti à la flamme : il incarne le new look Le Penisme cher au nouveau président du mouvement.

Descendant d’immigrés italiens, le jeune homme comprend aussi l’avantage qu’il peut tirer de son parcours « méritant » au milieu des bars de cette banlieue nord défavorisée de la capitale, fils d’une agente d’école maternelle divorcée. Sans insister auprès de son père, patron d’une PME prospère qui lui offre une voiture et lui loue un appartement.

A 20 ans, Jordan Bardella est déjà conseiller régional RN d’Île-de-France, après avoir rapidement quitté les amphis. Quelques mois plus tôt, il était l’assistant parlementaire de Jean-François Jalkh, rouage aussi extrême-droite qu’essentiel de la machine Front national.

Mais c’est sans difficulté, sinon avec zèle, qu’il a ensuite emboîté le pas au tout-puissant numéro deux du parti, Florian Philippot, pourfendeur des identitaires et chantre d’un souverainisme à connotation sociale.

– Boîte noire –

Au Rassemblement national, sa plasticité est appréciée.

Une première consécration intervient en 2019, lorsque Marine Le Pen lui propose la tête de liste aux élections européennes. En dépassant le score de la macronie, Jordan Bardella lave l’insulte du débat raté de son patron contre Emmanuel Macron deux ans plus tôt.

Il a ensuite trouvé un nouveau mentor, Philippe Olivier, beau-frère et principal conseiller de Marine Le Pen, tout en entamant une relation avec sa fille, Nolwenn Olivier, aujourd’hui terminée – le jeune homme a depuis adopté une grande discrétion sur sa vie privée.

Porte-parole de la candidate Le Pen en 2022, Jordan Bardella impressionne par son aisance médiatique et son agilité dans les débats. « Il apprend vite », murmure-t-on au RN. Ses détracteurs décrivent un « Frankenstein » qui absorbe, digère puis régurgite les éléments du langage, et dont le talent oratoire cacherait, au mieux, un vide doctrinal.

Même des « positions de droite », comme l’a exprimé le maire RN d’Hénin-Beaumont, Steeve Briois, lorsque le député européen prendra la tête du Rassemblement national en 2023, mettant en garde contre une « potentielle re-radicalisation » du parti. N’était-ce pas le même Bardella qui avait estimé que « Didier Raoult est à la médecine » ce que le RN est « à la politique » ?

Marine Le Pen coupe court à toute rébellion : le jeune homme doit élargir sa base électorale bloquée sous un plafond de verre. Au lepéniste ni de droite ni de gauche, Jordan Bardella fait ainsi entendre sa nuance plus libérale et pro-business. « Complémentarité », jurent les deux.

« Entre eux, c’est une boîte noire, on ne sait pas ce qui se passe », relève un député RN. De son côté, le jeune homme met en avant sa déférence autant que sa singularité, cherchant à déjouer le sort funeste que le parti à la flamme a toujours réservé à ses numéros deux.

Mais le prodige du lepénisme est aussi, en un certain sens, celui du macronisme.

Emmanuel Macron avait en effet ouvert la voie en cassant les codes de la politique et en plaçant les jeunes aux commandes.

Jordan Bardella n’hésite pas à se placer en miroir de Gabriel Attal, dont il a fait son meilleur ennemi.

Le mois dernier, lors d’un débat avec la macroniste Valérie Hayer, il n’a pas hésité à reprendre des formules que le candidat Macron avait lancées à sa rivale Le Pen lors de leurs débats présidentiels.

La dissolution a néanmoins plongé le perturbateur Jordan Bardella dans un gouffre de questions : s’il venait à être nommé à Matignon, la cohabitation pourrait mettre à mal les chances de victoire de Marine Le Pen en 2027.

Son expérience gouvernementale acquise allait également alimenter plus que jamais ses propres prétentions élyséennes.

Est-ce ce vertige qui l’a conduit la semaine dernière à affirmer qu’il refuserait le poste en cas de majorité relative simple ? A moins qu’il ne s’agisse de parier qu’une Assemblée nationale ingérable entraînera la démission d’Emmanuel Macron. Pour que tout se passe (presque) comme prévu à nouveau.

 
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