Les ouvrages climato-sceptiques se multiplient dans les librairies virtuelles : « Une guerre culturelle est en cours »

Les ouvrages climato-sceptiques se multiplient dans les librairies virtuelles : « Une guerre culturelle est en cours »
Les ouvrages climato-sceptiques se multiplient dans les librairies virtuelles : « Une guerre culturelle est en cours »

Ces ouvrages ne sont que quelques exemples des nombreuses références climato-sceptiques qui se multiplient sur les plateformes de vente en ligne, contribuant à entretenir la confusion sur la réalité de l’urgence climatique.

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Le média français Bon Pote en a fait les frais en publiant son premier livre consacré au climat, écrit des scientifiques.« Nous avons publié notre livre ‘Comprendre presque tout sur le climat’, en travaillant avec 28 scientifiques, Amazon met ce travail collectif au même niveau que les autres charlatans, soutenu financièrement par les think tanks conservateurs et les médias qui en font la publicité. Amazon peut se cacher autant qu’il veut derrière son algorithme, il ne proposerait pas de livre expliquant que la Terre est plate. » a dénoncé les médias peu après la sortie de son œuvre.

Sébastien Doutreloup, climatologue à l’Université de Liège, s’inquiète également de cette profusion d’ouvrages propageant des fake news. “L’association des réalistes du climat est fantastique », ironise le scientifique, à propos de l’association revendiquée par l’auteur de « Climat : de la confusion à la manipulation ». “J’utilise leurs articles pour faire des exercices avec mes élèves. C’est une association climato-sceptique très active sur les réseaux sociaux qui a la particularité de proposer des articles hyper spécifiques, au défilé d’argumentaires parfaitement corrects mais qui dévient systématiquement vers des conclusions complètement fausses. C’est vraiment un cas d’école. s’exclame le scientifique.

« Parler de manipulation dans le contexte climatique reste une plaisanterie. Dès que le GIEC a commencé à être considéré comme un interlocuteur légitime, c’est-à-dire à partir de 2015-2020, il a été attaqué par de grands intérêts industriels qui se sentaient menacés. C’est comme Claude Allègre. (un scientifique et homme politique français de renom dont les mensonges ont été durement dénoncés par ses pairs, NDLR) à son époque, ainsi que bien d’autres aux États-Unis. Les gens n’hésitent pas à soutenir les plus grandes contre-vérités de l’espace public. »deplores Frédéric Caille, lecturer in political science at the University of Savoie Mont Blanc.

Chat GPT, intelligence artificielle climato-sceptique ?

Guerre culturelle

Dans un article intitulé « Petroknowledge, alliés des climatosceptiques contre les énergies renouvelables » publié dans le média de vulgarisation scientifique La conversationle chercheur va jusqu’à assimiler la déferlante des livres climato-sceptiques à une « guerre culturelle ».Ces travaux montrent indirectement qu’une grande partie du travail des lobbies se situe au niveau de l’imaginaire et des projections que peut faire la population sur son avenir. J’ai beaucoup travaillé sur l’histoire des énergies renouvelables, il est important de comprendre qu’il y a des choix politiques qui ont été faits. Les énergies fossiles ne se sont pas imposées ; Des alternatives intéressantes ont été négligées ou laissées de côté pour des raisons politiques et économiques. Si l’on ne comprend pas les rapports de force en jeu, on ne peut pas comprendre la guerre du savoir qui se déroule depuis plusieurs années pour tenter d’influencer la transition vers les énergies bas carbone.»

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Bernard Feltz, professeur émérite à l’Institut supérieur de philosophie de l’UCLouvain et spécialiste des enjeux philosophiques et politiques du réchauffement climatique, juge également que cette multiplication d’ouvrages climato-sceptiques dans les grandes librairies n’est pas anodine. “Il est évident que sur le plan environnemental, nous sommes dans une phase très prudente. C’est impressionnant à constater : en 2018 ou 2019, 200 000 jeunes et moins jeunes sont descendus dans la rue pour manifester pour le climat. Et quelques années plus tard, l’environnement n’est pratiquement plus mentionné dans les programmes gouvernementaux. Le succès des travaux climato-sceptiques illustre bien ce déclin. Mais cela illustre aussi le grand pouvoir des lobbies en matière climatique. Dans les années 1990, lorsque Total s’est rendu compte que les scientifiques avaient raison sur le réchauffement climatique, l’entreprise a payé des chercheurs pour semer le doute et retarder la prise de conscience du public afin que les carburants et autres produits pétroliers puissent continuer à être vendus. » il se souvient.

Le rôle des libraires

Les libraires indépendants constatent également ces dérives. “Le problème c’est que sur Amazon, il n’y a aucun contrôle qualité des livres vendus. À Tropismes (une librairie bruxelloise, NDLR)nous proposons parfois des livres plus optimistes que d’autres sur le climat, mais aucun livre qui met ouvertement en avant les fausses nouvelles. Et quand on sait qu’une maison d’édition a des sympathies d’extrême droite ou a tendance à diffuser de fausses nouvelles, on refuse automatiquement ses livres. C’est la liberté du libraire indépendant. En revanche, si un client nous commande un travail, nous le lui fournirons.explique Camille, libraire responsable de la rubrique environnement/climat chez Tropismes.

« Le climat a servi de test à la désinformation russe »

« Nous avons une totale liberté d’approvisionnement. Nous recevons des représentants de maisons d’édition et par expérience, nous connaissons les maisons et leurs lignes et nous savons à qui nous pouvons faire confiance. Amazon étant devenu éditeur, il propose des livres dont les libraires n’entendent jamais parler. Les livres complotistes, on ne les voit même pas passer.de son côté, s’étonne Régis Delcourt, co-gérant de la librairie Point-Virgule à Namur.

L’erreur du GIEC

« S’il n’y a qu’une chose que nous pouvons laisser à ces climato-sceptiques, c’est de reconnaître qu’ils ont raison lorsqu’ils disent que le GIEC avait tort. » Toutefois, Sébastien Doutreloup le concède. Mais cette erreur n’est pas celle que dénoncent les climato-sceptiques dans leurs travaux. “En réalité, les scientifiques se sont montrés trop optimistes quant à la vitesse réelle du réchauffement climatique. De nouvelles observations montrent que la Terre atteint des seuils qu’elle ne devrait pas franchir avant 20 ou 30 ans. La réalité est donc en avance sur les prévisions. En 2024, nous avons atteint le seuil mondial de 1,5°C de réchauffement alors qu’on estimait que cela n’arriverait qu’en 2040. Le climat évolue beaucoup trop vite et plus on attend pour agir, plus on risque de se retrouver avec son propre climat. le bec dans l’eau.”, prévient le climatologue.

 
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