Elle n’a plus de mots assez durs contre celui qui a été reconnu coupable. Caroline Darian, la fille de Dominique et Gisèle Pelicot, est revenue dans un entretien à la BBC sur la tentaculaire affaire dite des « viols de Mazan », qui a bouleversé sa vie.
Dans un extrait de l’interview, qui sera diffusé ce lundi 13 janvier à 20 heures sur BBC 2, cette femme de 46 ans évoque pour la première fois cette soirée de novembre 2020 lorsqu’elle a reçu un appel de sa mère. Un coup de téléphone qui a changé sa vie pour toujours.
En quelques mots, elle comprend que son père est accusé d’avoir violé et coordonné le viol de sa mère pendant des années. «Je me souviens que j’ai crié, pleuré, je l’ai même insulté. C’était comme un tremblement de terre. Un tsunami», confie-t-elle.
Elle aussi a été droguée par son père
Pourtant, Caroline Darian ne savait pas encore tout. Quelques semaines plus tard, elle est à son tour convoquée par la justice. Deux photos d’elle, inconsciente et en sous-vêtements, ont été retrouvées sur l’ordinateur de son père. Un épisode sur lequel elle est revenue auprès de la BBC, notamment sur son déni du début : « J’étais dans une sorte de dissociation. J’ai eu du mal à me reconnaître.
Il a fallu l’aimable insistance d’un policier pour qu’elle comprenne que c’était elle. « Il m’a dit : Regarde, tu as la même marque sur ta joue… c’est toi. J’ai alors regardé ces deux photos différemment… J’étais allongée sur le côté gauche, comme ma mère sur toutes ses photos. Caroline Darian est persuadée d’avoir été droguée par son père et victime au moins d’une agression sexuelle. “Mais je n’ai aucune preuve”, admet-elle.
“Il savait exactement ce qu’il faisait”
« Je ne sais pas si c’est un monstre, mais il savait exactement ce qu’il faisait. Il n’est pas malade. Il fait tout cela en conscience », rappelle celle qui s’engage désormais dans la lutte contre la soumission chimique, et qui en a tiré un livre, « Et j’ai arrêté de t’appeler papa », publié en 2023. Elle veut porter la voix de tous. les « victimes invisibles », ces femmes qui n’ont pas de preuve des traumatismes et des crimes qu’elles ont vécus.
« Je porte le même ADN que (Dominique Pélicot) et la principale raison pour laquelle je suis si engagé en faveur du victimes invisibles c’est que c’est aussi pour moi le moyen de mettre une vraie distance avec cet homme. Être totalement différente de Dominique”, explique-t-elle à la journaliste Emma Barnett.
Sans détour, Caroline Darian aborde même l’avenir de son père à la fin du procès : « Mon père devrait mourir en prison », assène-t-elle. « Il est dangereux. Il ne doit pas sortir. En aucun cas”, poursuit-elle à propos de celui qu’elle décrit comme l’un des “pires prédateurs sexuels des 20 ou 30 dernières années”.
« Quand j’y pense, je ne me souviens pas vraiment du père qu’il était. Je vois directement le criminel, le criminel sexuel qu’il est”, admet-elle. Caroline Darian précise que sa mère Gisèle est désormais en train de se reconstruire suite au procès, dont elle est sortie « épuisée ». « Mais elle va bien », insiste sa fille. Un documentaire sur l’affaire, dans lequel la quadragénaire raconte son histoire, sera diffusé le 21 janvier sur France 2.
Des peines allant de 3 à 20 ans d’emprisonnement
Dominique Pelicot a été condamné le 19 décembre à 20 ans de réclusion criminelle, peine maximale qu’il encourrait et celle demandée par le procureur de la République lors des réquisitions. L’homme de 72 ans n’a pas fait appel de sa condamnation, qu’il doit désormais exécuter.
Au-delà de Dominique Pelicot, les 50 hommes coaccusés dans le procès pour viol de Mazan ont tous été reconnus coupables et condamnés à des peines allant de 3 ans (dont 2 ans avec sursis) à 12 ans de prison. Dix-sept d’entre eux ont fait appel du verdict et un nouveau procès aura lieu devant la cour d’assises du Gard avec un jury populaire, pour réexaminer les faits. Elle devrait avoir lieu avant la fin de l’année.