Avant même sa draft, il y a un an et demi, les adeptes les plus assidus de la sphère orange et les stars des courts nord-américains étaient, pour beaucoup, très clairs. Victor Wembanyama oscillait dans leur bouche entre « un extraterrestre » et « celui qui révolutionnerait le jeu ». Évidemment, quelques consultants qui avaient besoin de se faire remarquer mettaient en doute son talent, mais force est de constater que la majorité avait raison.
Après un peu plus d’une saison dans la meilleure Ligue du monde, le Français s’est déjà imposé parmi les stars et commence à trouver son jeu. Statistiquement, il finira par être le meilleur bloqueur de l’histoire. Il est aussi souvent injouable dans la peinture. Mieux encore, malgré sa taille (2m22 en Europe, 2m26 aux Etats-Unis, où l’on mesure les joueurs avec leurs chaussures), c’est un redoutable tireur à longue distance, où il gagne de plus en plus en confiance et où il prend plus de feu, aussi.
Mercredi, lors du fameux « jour de Noël » de la NBA, qui réunit les meilleures équipes tout au long de la journée, de midi à minuit, il était au Madison Square Garden, le lieu le plus mythique du sport mondial. et un lieu qui révèle souvent des personnages. Les spectateurs new-yorkais n’ont pas été déçus. Pire, ou mieux (rayer la mention inutile), ils ont été impressionnés par la nouvelle manifestation de celui qui aura 21 ans (seulement !) le 4 janvier.
Son équipe a certes perdu (117-114), mais les Yvelinois ont fait rugir, soupirer, rager et même applaudir le Madison Square Garden. A-t-il raté ses premiers tirs à trois points ? Il n’a jamais semblé douter et a fini par les attaquer, parfois presque depuis le centre du logo du terrain. « Wemby » termine sa soirée avec 42 points au compteur et récupère 18 rebonds, avec une facilité déconcertante. Il lui arrive parfois de se coincer les pieds dans le sol « MSG » avec ses longs segments, mais dès qu’il s’approche du cercle, il n’y a plus rien à faire contre lui.
C’est en contre-attaque, spécialité qu’il développe de plus en plus, que Wembanyama se montre le plus impressionnant. Défensivement, il est si fort que les attaquants adverses y réfléchissent à deux fois avant de tenter leur chance. Souvent, mercredi, les New-Yorkais ont préféré changer d’option offensive à chaque fois que les Bleus étaient dans les parages, tant ses bras tentaculaires ont traumatisé les premiers Knicks à tenter d’attaquer le panier. Une arme de dissuasion massive.
Dans les allées de l’enceinte new-yorkaise, les fans des Knicks oscillaient entre admiration et résignation, lors de certaines phases de jeu. Mon voisin de tribune, entre deux réactions face aux agissements de Wembanyama et forcément intrigué par mon anglais avec un fort accent français, m’a posé une multitude de questions. « Est-il le plus grand homme de France ? Bonne question, eh bien. Et il se trouve que oui, à égalité avec un certain Vincent Pourchot, également basketteur. “Mais combien y a-t-il de Français dans cette Ligue ?!” Quatorze! Mais ensuite je lui ai expliqué que j’étais Suisse et je l’ai immédiatement rendu moins intéressé…
Wembanyama et ses collègues des Spurs ont fini par perdre dans le money-time. Le n°1 texan s’est vu refuser un autre tir à 3 points à environ 5 minutes de la fin en raison d’une faute sur l’un de ses coéquipiers et il a failli disparaître au moment du match. Cela a quand même laissé une impression incroyable. Le garçon n’a pas 21 ans, il est capable de passer plus de 40 ans dans l’une des meilleures franchises de la Ligue et on sent encore une grande marge de progression. Effrayant.
On croyait aussi, parfois, voir un adulte jouer au milieu des enfants, sur un panier placé à moins de deux mètres. Même face à une bête comme le New-Yorkais Karl-Anthony Towns (29 ans, 2m12 et 115 kg), parfois réduit au rôle de fleuret. Honnêtement, il faut le voir une fois dans sa vie pour le croire.