Des tirages exceptionnels et sur-mesure
L’institution s’est développée au même rythme que l’industrie de la mode et du luxe, dont la demande en emballages, objets en papier et autres éditions de cadeau (cadeaux personnalisés) s’est considérablement développé et sophistiqué au fil des années. De plus, les vidéos dedéballage (ou unboxing) ont progressivement envahi les réseaux sociaux. La pratique, très répandue chez les influenceurs, consiste à filmer l’ouverture de l’emballage d’un produit reçu – généralement un cadeau d’une marque. Il s’agit d’une forme de rituel très théâtralisé qui renforce le caractère sacré de l’objet et, in fine, celui de la marque.
Ainsi, l’entreprise se spécialise dans la réalisation d’imprimés exceptionnels et sur-mesure: invitations à des défilés de mode, livres de marquecoffrets luxueux, étiquettes de boutiques, magazines, menus, brochures diverses, etc. Des objets à part entière. Ses clients comprennent des maisons et des entrepreneurs du secteur du luxe (mode, bijouterie, spiritueux, beauté, hôtellerie), des studios de design et des institutions du monde de l’art et de la culture.
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Franchir le seuil de l’Imprimerie, c’est entrer dans une ruche bourdonnante dans laquelle s’affairent plus d’une dizaine d’artisans. Ses huit ateliers – de la photogravure à l’éco-conception en passant par le prototypage et le packaging, le gaufrage et l’estampage, la dorure, l’impression offset, la sérigraphie et le façonnage – sont interconnectés. « Cette configuration unique permet d’associer de manière innovante techniques, couleurs, matériaux et finitions. Cette approche favorise les synergies et nous permet d’accompagner nos clients dans toutes les phases de recherche et développement, explique Louise Le Moan, responsable de la communication et de l’événementiel à l’Imprimerie. Nous recherchons la solution créative et technique qui mettra en valeur les projets les plus complexes.
La règle est pas de limite
Ici, la règle est pas de limite. Les archives regorgent de projets de collectionneurs et d’objets exceptionnels, collectionnés comme des spécimens rares. «Nous sommes une bibliothèque vivante, nous archivons et révélons nos projets pour inspirer nos clients et montrer l’étendue de notre savoir-faire exceptionnel», souligne Mélody Maby-Przedborski, directrice du développement et de la communication.
Certaines de ces créations sont exposées au cœur même de l’Imprimerie : délicate brochure aux dorures ciselées, livret découpé au laser, coffret éclairé par des LED, coffret aux dégradés fluos et moirés d’impression offset, invitation en relief ornée de lettrages vernis, etc. . Le tout imprimé sur des papiers de création, colorés ou non, opaques ou translucides, aux effets mats, nacrés ou satinés, reliés de manière artisanale (suisse, japonaise, Singer couture, etc.) ou. encapsulé dans des boîtes soigneusement marquées à chaud. Sur un délicat pamphlet, il faut observer les détails infinitésimaux d’un gaufrage à plusieurs niveaux combiné à une dorure microstructurelle qui redonne vie à une abeille plus vraie que nature.
Sur place, un atelier de prototypage permet également de développer des objets imprimer en trois dimensions : cabas, étuis spéciaux, coffrets sur mesure, etc. La sérigraphie permet des combinaisons et superpositions de couleurs et de textures, le tout dans des nuances et dégradés de reliefs, effets métallisés, laqués, mats, irisés, pailletés, phosphorescents… Avril 2023, un photograveur rejoint l’équipe afin de mettre au point un calibrage encore plus précis des profils de couleurs ainsi que leur reproduction parfaite sur papier.
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Qualités sensorielles
Dans un monde où les communications sont numériques, les qualités tangibles de l’objet imprimé, tant optiques qu’haptiques, sont recherchées par de nombreuses maisons de luxe – une manière de soutenir leurs stratégies numériques. C’est également pendant la pandémie que les commandes ont connu un fort essor. « Les maisons ont souhaité entretenir un lien avec leurs clients et influenceurs : elles ont alors développé leur pratique du cadeau afin de recréer des événements à la maison. Ils ont imaginé des coffrets surprises pour accompagner le visionnage d’un défilé de mode ou des coffrets pour déguster des spiritueux. Cette relation client plus ciblée est restée la norme », précise Mélody Maby-Przedborski.
Par ailleurs, les packagings et coffrets signatures sont revalorisés, voire surévalués, par les marques dans le cadre de leur stratégie digitale comme étant l’un des rares éléments encore tangibles de l’expérience d’achat. Le packaging fait désormais partie intégrante du produit et il doit être à la hauteur du savoir-faire des marques.
180 francs pour un boîtier Rolex
Les objets imprimés gagnent alors en sophistication. Et les maisons font tout ce qui est en leur pouvoir pour que les clients les conservent avec soin. A eux de les recycler en objets de décoration ou de rangement par exemple. Ce grand engouement pour le papier se reflète dans le marché de l’occasion. Sur Vinted, Grailed ou encore eBay, la revente d’emballages est devenue une pratique courante. Les boîtes et sacs shopping aux marques Gucci, Louis Vuitton ou Balenciaga peuvent être échangés comme tout autre objet.
En avril 2021, une étude réalisée par le site britannique Money identifiait les packagings de produits de luxe les plus recherchés sur eBay, en estimant leur prix de revente moyen. Les coffrets vides des maisons horlogères arrivent en tête du classement : comptez 180 francs en moyenne pour un boîtier Rolex, 165 francs pour un équivalent TAG Heuer. Quant aux sacs de courses, là encore les prix laissent songeur. Il faudra débourser 75 francs en moyenne pour acquérir un sac en papier Louis Vuitton ou Gucci, 60 francs pour un modèle Louboutin. « Nous avons une relation intime avec le papier. Le tirage exceptionnel offre une expérience sensorielle unique », explique Louise Le Moan, également rédactrice à l’imprimerie.
Bibliothèque de matériaux éco-responsable
Depuis une dizaine d’années, l’Imprimerie mise sur l’innovation responsable dans ses techniques d’impression et son approvisionnement en papiers éco-conçus et durables. Elle dispose d’une bibliothèque de matériaux qui contient pléthore de supports tous plus originaux les uns que les autres : des compositions recyclées additionnées d’herbes, de lin, de chanvre ou d’algues sourcées en Europe pour réduire l’impact environnemental (la cellulose provenant d’Amazonie ou du Canada génère un grand empreinte carbone). On y retrouve également des panneaux de foin ou de plantes agglomérées avec de la farine et de l’eau, des écorces, des inclusions de café, des grains de chocolat ou des graines de plantes mellifères, des feuilles de bananier mais aussi du cuir recyclé. ou végétal comme le cuir de cactus etc.
Cette année, le groupe hôtelier anglais Soho House a distribué à ses clients des cartes postales un peu insolites : celles-ci ont été réalisées à partir d’un matériau sur mesure et en pénurie à partir de draps en lin usagés provenant des hôtels du groupe situés au Royaume-Uni. Uni. Les fibres textiles étaient ainsi transformées en « pâte à papier ». « Aujourd’hui, chaque marque développe son propre langage et ses propres rituels papier, et cela passe également par l’utilisation de matériaux éco-conçus. Les objets imprimés reflètent le savoir-faire d’une maison tout comme sa narration », note Louise Le Moan. Le journal n’a donc pas dit son dernier mot.
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