« Le procès pour viol de Mazan est un procès de lâcheté »

« Le procès pour viol de Mazan est un procès de lâcheté »
« Le procès pour viol de Mazan est un procès de lâcheté »

« Pour moi, ce procès sera le procès de la lâcheté. Il est grand temps que la société machiste et patriarcale, qui banalise le viol, change », estime Gisèle Pelicot.

AFP

“Il est temps que nous changions notre regard sur le viol”, a soutenu mardi Gisèle Pelicot, pour qui le procès de son mari et des dizaines d’hommes accusés de l’avoir violée pendant dix ans restera comme celui d’une “société machiste et patriarcale qui banalise”. agression sexuelle. «Pour moi, ce procès sera le procès de la lâcheté», a répété à trois reprises la septuagénaire, face à son désormais ex-mari, Dominique Pelicot, tête baissée dans le box des accusés.

Qualifié à l’unanimité de « chef d’orchestre » dans cette affaire, il a reconnu l’avoir bombardée d’anxiolytiques, pendant une décennie, pour la violer et la livrer à des inconnus qu’il avait recrutés sur internet. “Depuis le début de ce procès, j’ai entendu beaucoup de choses, (mais) c’était inaudible…” a poursuivi la principale victime de ce procès hors norme, devenu le procès des violences sexuelles et soumission chimique.

“J’ai entendu : j’étais télécommandé”, j’ai entendu : “J’ai bu un verre d’eau, j’étais drogué.” Mais à quel moment n’ont-ils pas touché ? s’est insurgée Mme Pelicot, 71 ans, devenue une véritable icône féministe depuis le début des débats, le 2 septembre, devant le tribunal correctionnel du Vaucluse à Avignon, refusant le huis clos.

« Ils ont violé ! J’entends ce monsieur dire +un doigt n’est pas un viol+. Faites-le se demander ! » a-t-elle crié.

Aux « ordres » d’un « démon »

Dernier des 51 accusés à comparaître mardi matin, juste avant de prendre la parole, Philippe L., 62 ans, avait adopté cette même ligne de défense, assurant qu’il était « sous les ordres » de Dominique Pelicot, un « démon”, et que cette nuit de juin 2018 il croyait participer au scénario d’un couple libertin où la femme faisait semblant de dormir.

Poursuivi pour « viol aggravé », ce sexagénaire vivant de légers travaux de jardinage encourt 20 ans de réclusion criminelle, comme la plupart des 50 autres accusés, 50 hommes âgés de 26 à 74 ans.

Malmenée par plusieurs avocats de la défense, certains allant jusqu’à l’accuser d’avoir consenti, Mme Pelicot s’est défendue d’avoir été “sous influence” ou “manipulée” durant leurs 50 années de vie commune avec son mari. : « Absolument rien n’a retenu mon attention ! »

«Vous martyrisez Mme Pelicot», a fustigé l’un de ses deux avocats, Me Stéphane Babonneau, face aux questions insistantes de Me Nadia El Bouroumi.

“Je ne pardonnerai jamais”, a en tout cas assuré Mme Pelicot : “M. Pélicot avait de nombreux fantasmes que je ne parvenais pas à satisfaire. (…) Comme je ne voulais pas aller dans un club échangiste, il a dit qu’il avait trouvé la solution en m’endormant ! J’ai perdu 10 ans de ma vie que je ne retrouverai jamais. Jamais ! Cette cicatrice ne guérira jamais ! », lâche-t-elle, retenant à peine sa colère.

Les explications de Pélicot ?

Une colère qu’elle entretient également contre les coaccusés, qui “à aucun moment ne sont allés dénoncer” les faits : “Ils sont venus assouvir leurs pulsions sexuelles et, seulement après, se sont dit que quelque chose n’allait pas dans cette pièce”.

Et si “certains hommes avaient pu être manipulés par M. Pelicot”, sur le site coco.fr (NDLR : désormais interdit et fermé) où ils ont tous fini », quand on passe à l’action, il n’est plus question de manipulation » : « Pour moi, ils sont tous venus me violer, ça ne fait aucune distinction entre eux ».

« Certains m’excusent et je peux les regarder davantage dans les yeux. Mais ils ont tous commis un crime », a-t-elle accusé : « Toute ma vie, je devrai vivre avec ça. Que les hommes m’ont souillé, je devrai vivre avec ça toute ma vie. Toute ma vie”, a-t-elle conclu, précisant qu’elle attendait aussi des “explications” de son ex-mari.

Il devait être interrogé une dernière fois mardi après-midi, dans le but, selon Me Béatrice Zavarro, que son client s’explique enfin réellement sur les raisons de cette dérive qui s’était accélérée au fil des années, avec quelque 200 viols au total, dont la moitié par se.

“Nous ne pouvons pas quitter cette audience sans avoir une explication tangible de sa part, au moins sur le respect qu’il doit à son épouse”, a-t-elle assuré lors d’une suspension d’audience.

Mercredi, le procès entrera alors dans sa phase finale, celle des plaidoiries, avec les parties civiles en premier. Puis, à partir de lundi, après deux jours de suspension, il y aura la mise en examen du procureur de la République, prévue sur trois jours, et enfin la défense, sur près de trois semaines.

Le verdict est attendu le 20 décembre au plus tard.

(AFP)

 
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