Il y a de la vie dans les mines abandonnées au Québec et cela pourrait être bénéfique pour l’environnement. C’est ce qu’observent deux chercheurs de l’UQAM qui étudient les communautés microbiennes se nourrissant de substances toxiques dans les aquifères, formations géologiques renfermant de l’eau douce souterraine.
En septembre dernier, l’hydrochimiste Violaine Ponsin et la microbiologiste Cassandre Lazar ont reçu près de 760 000 $ de la Fondation canadienne pour l’innovation, du gouvernement du Québec et d’autres partenaires pour leur projet.
Les deux chercheurs et leurs trois étudiants diplômés espèrent « comprendre les processus responsables des transformations biotiques et abiotiques des contaminants dans les aquifères ».
L’argent reçu permet de payer des doctorants et des masters « qui travaillent parfois jusqu’au petit matin ou le week-end », mais aussi de faire du séquençage en laboratoire, d’entretenir le matériel et de payer des déplacements et des analyses.
Grâce à une équipe de plongeurs, les chercheurs ont d’abord collecté des échantillons de vie dans l’ancienne mine Forsyth et travaillent maintenant dans l’ancienne mine de mica Blackburn, toutes deux situées en Outaouais.
Lorsque les mines sont abandonnées, « elles arrêtent de pomper l’eau souterraine, elle remonte donc à la surface », explique Cassandre Lazar, professeure agrégée au département des sciences biologiques de l’UQAM.
« Très vite, il n’y a plus d’oxygène : dans les premiers mètres de profondeur, il disparaît complètement », constate Violaine Ponsin, professeure au Département des sciences de la Terre et de l’atmosphère de l’UQAM. , qui effectue des analyses isotopiques spécifiques aux composés (CSIA) dans le cadre de ce projet.
Puis, en descendant, les quantités de méthane augmentent drastiquement. Toute la chaîne alimentaire de l’aquifère repose sur cette présence, puisque les micro-organismes s’en nourrissent.
L’autre intérêt majeur de la recherche : savoir si la profondeur influence la composition des communautés microbiennes. Jusqu’à présent, la réponse est oui : il y en a moins avec de la profondeur.
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« Nous avons découvert de nouvelles espèces de bactéries, actuellement inconnues dans les bases de données. Ils vivent dans un habitat tellement unique qu’il permet l’évolution d’espèces capables de transformer les formes d’oligo-éléments métalliques en métaux moins toxiques », illustre M.moi Lazare.
Le micro-organisme ne fait pas cela pour aider les humains. Ce qui l’intéresse, c’est la Source d’énergie, de carbone. Mais en transformant la substance à son avantage, cela génère pour nous une conséquence positive.
Cassandre Lazar, professeure agrégée au Département des sciences biologiques de l’UQAM
Dans le cratère de la mine, on retrouve également des daphnies, un zooplancton visible à l’œil nu mesurant 1 à 4 mm qui « bioaccumule tout ce qui est toxique dans ses tissus ». Normalement transparentes, les daphnies du site de Blackburn sont rouges en raison d’un stress important, mais elles résistent à des concentrations toxiques extrêmement élevées.
Même si ce n’était pas l’objectif principal, les chercheurs y voient un processus qui peut être externalisé et appliqué. Cette méthode, appelée bioremédiation, est utilisée pour nettoyer les déversements de pétrole en « mangeant » le pétrole présent dans l’eau. La dégradation par les micro-organismes peut également être utile comme « mesure de gestion de la pollution », notamment sous les réservoirs des stations-service, ajoute M.moi Ponsin.
Des souches de bactéries sont actuellement isolées à froid en laboratoire. Ils seront bientôt étudiés en culture à différents niveaux de métaux lourds.
« Dans un monde idéal, avec les bons financements, je dirais qu’en six mois, on pourrait caractériser toutes les souches et proposer un cocktail pour assainir des milieux qui auraient les mêmes conditions », estime Cassandre Lazar.