À Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier voyage surtout en fuite, son bureau dans son sac à dos, à la recherche de sujets et de gens fascinants. Il s’adresse à tout le monde et s’intéresse à tous les horizons dans cette chronique urbaine.
Renaissance, ce fleuron québécois du réemploi des biens de consommation, est devenue une immense machine capable de revaloriser quelque 30 000 tonnes de dons par année laissés par près de 2 millions de donateurs… et ce n’est qu’un début.
En visitant les coulisses de l’immense nouvelle succursale Renaissance à Anjou, je me dis qu’un Henry Ford ne serait pas déplacé ici.
On se croirait dans une usine, et Renaissance compte déjà une vingtaine de magasins de cette taille.
C’est l’un des trois étages de marchandises de la Renaissance à Anjou… et il existe une vingtaine d’autres succursales de cette taille.
Louis-Philippe Messier
Dans cette ruche humaine, nous sommes très loin du comptoir de charité au sous-sol de l’église.
Compte tenu du volume titanesque de vêtements et d’appareils à traiter, l’organisation est industrielle.
« Je dois trier 60 cartons de chaussures pour éliminer les invendables et fixer un prix juste pour celles qui iront en rayon », m’explique Denise Komo, sans cesser de faire son travail.
Denise Komo trie chaque jour des centaines de paires de chaussures et fixe leur prix.
Louis-Philippe Messier
Des centaines de boîtes de dons à trier attendent dans la salle.
“Il faut choisir des prix suffisamment bas pour que ça se vende vite, il ne faut pas que ça reste dans les rayons, car il y a constamment de nouveaux objets ou vêtements à placer”, explique Gerry Baramasco, directeur adjoint.
«La couleur de l’étiquette indique la date à laquelle le produit arrive, et ce qui ne trouve pas preneur au bout de quelques semaines part en liquidation», poursuit le jeune diplômé en commerce de 23 ans arrivé au Québec en provenance de France il y a trois mois. .
Bref, il faut que ça marche !
Le directeur adjoint Gerry Baramasco m’explique que les prix sont bas pour que les choses proposées partent vite puisque des tonnes d’autres vont arriver…
Louis-Philippe Messier
Le capitalisme social
«Nous utilisons le système capitaliste pur et le transformons pour en faire un modèle 100 % social», s’enthousiasme le directeur général Éric St-Arnaud.
« Au lieu d’enrichir les actionnaires, les bénéfices sont entièrement réinvestis dans la mission », insiste celui qui est lui-même salarié.
Le directeur général Éric St-Arnaud me montre son manteau acheté 30$.
Louis-Philippe Messier
Le conseil d’administration est entièrement bénévole.
Pour le client, ce modèle économique offre un avantage : pas de taxes.
Dans la première file de tri donnant sur le parking, un homme entre, pose un ventilateur sans rien dire, puis repart.
“MERCI!” crie M. St-Arnaud à ce donateur enthousiaste.
“Si ce ventilateur fonctionne bien, il faudra qu’il trouve rapidement preneur.”
Une dizaine de trieurs de vêtements s’affairent à trier et classer les dons pour le rayon friperie.
Lors de l’entrevue, deux vêtements pour mon fils ont attiré mon attention : un manteau qui semblait neuf à 7,50 $ et un manteau d’hiver bien chaud à 24 $ (sans taxes, je le rappelle).
J’ai repéré cette veste pour mon fils lors de mes entretiens. 7,50$… et aucune taxe dans cet OBNL !
Louis-Philippe Messier
« Chaque jour, le magasin propose 5 000 à 6 000 nouveautés… il faut donc revenir souvent pour attraper les perles », m’a expliqué le directeur général.
M. St-Arnaud s’habille avec des vêtements de la Renaissance : un élégant manteau acheté pour 30 $ et une chemise pour 10 $.
Bientôt au Québec
L’organisme ouvrira bientôt son premier magasin à Québec.
«Nous souhaitons avoir des agences dans toutes les villes de plus de 100 000 habitants», annonce M. St-Arnaud.
Avec des épiceries exorbitantes et des loyers élevés, les Québécois pris dans le pétrin ont besoin d’un OBNL de ce genre.