« Vous êtes un menteur et un provocateur »… Un DJ sur la grille pour les questions des avocats

C’est une chanson bien connue, qui résonne ici et là depuis dimanche la révélation des résultats des élections européennes. Baptisé Porcherie, cette chanson du groupe punk Les Béruriers Noirs crie à qui veut l’entendre que « la jeunesse fait chier le Front National ». Un chant souvent brandi dans les manifestations qui a aussi la particularité d’être hostile aux forces de l’ordre. Sa diffusion le soir de la Fête de la Musique à Nantes 2019 a-t-elle contribué aux tensions entre les forces de l’ordre et les fêtards rassemblés quai Wilson ? Et qui a joué cette dernière chanson alors que tous les autres systèmes audio avaient été coupés ? A-t-il contribué au mouvement de foule et à la chute mortelle de Steve Maia Caniço dans la Loire ? C’est ce que semblent penser plusieurs protagonistes du procès du commissaire Grégoire Chassaing, policier jugé pour homicide involontaire depuis lundi.

Il ne s’attendait probablement pas à être chahuté ainsi. À la sortie de la salle d’audience numéro 101 du tribunal correctionnel de Rennes, Nicolas R. semblait stupéfait. Cité comme témoin, l’homme d’une quarantaine d’années a été le dernier DJ à sonoriser le soir de la Fête de la Musique 2019. L’homme se trouvait sur les platines de la dernière sonorisation lorsque les policiers sont arrivés. est arrivé pour lui demander d’éteindre la musique qui devait s’arrêter à 4 heures du matin

Il était alors presque 4h30 du matin et une foule nombreuse continuait de danser devant les enceintes, à quelques mètres de la Loire. “Je ne savais pas que la musique devait s’arrêter à 16 heures”, a assuré le DJ. Ce dernier a expliqué avoir coupé le son pour entendre les consignes de la police. Le problème, c’est qu’il a décidé de remettre la musique « mais pas fort ». Une étincelle suffisante pour enflammer l’assistance et donner lieu à des échanges de projectiles et de gaz lacrymogènes, sans que l’on sache qui a déclenché l’événement. Quelques minutes plus tard, Steve Maia Caniço tombait dans la Loire et perdait la vie, noyé dans les eaux sombres du fleuve. L’animatrice périscolaire de 24 ans, qui ne savait pas nager, a été retrouvée cinq semaines plus tard.

La police parle de « provocation » et intervient

Dans les enregistrements des conversations policières, le commissaire Chassaing a évoqué « une provocation » du DJ qui a rejoué la musique et a ordonné à ses troupes d’aller s’équiper. A la barre, le témoin a nié avoir diffusé la chanson de Bérus, expliquant qu’il « n’aime pas cette chanson ». Pas complètement convaincu et pas vraiment convaincant. « Vous êtes un menteur et un provocateur », a lancé l’avocat du commissaire Chassaing. Pour étayer sa déclaration, Me Louis Cailliez s’est appuyé sur deux déclarations du DJ, qui accusait le haut gradé de l’avoir dévalisé avec une bonbonne de gaz. Or, l’enquête a démontré que le commissaire n’en était pas équipé à ce moment-là. ” Tu as menti. Était-ce pour causer du tort à mon client ? Aujourd’hui, quelle est la différence entre vous et M. Chassaing ? »

L’avocat du commissaire Grégoire Chassaing Me Louis Cailliez s’en est pris au DJ qui jouait les derniers morceaux de musique le soir de la Fête de la Musique 2019 au cours de laquelle Steve Maia Caniço a perdu la vie.– Lou Benoist/AFP

Le jeune avocat n’a pas été le seul à s’emporter. Face au DJ, le procureur de la République s’est également lâché, estimant que le témoin porte une part de responsabilité dans la mort de Steve. “Quand on dépasse les ordres de la police, on bascule du côté obscur de la force”, estime Philippe Astruc, avant d’insister. « Vous ne vous sentez pas responsable moralement de ce qui s’est passé ? « . Gêné, le DJ a tenté de se justifier. « Ce n’est pas la musique qui l’a poussé à l’eau. Quand j’ai remis la musique, je n’y ai pas pensé, j’ai été influencé par les gens qui demandaient de remettre le son. J’étais pris dans l’excitation de la fête. Je n’ai provoqué personne, je jouais juste de la musique. »

“Je n’ai pas fait attention à l’heure”

Un autre DJ appelé à témoigner quelques minutes plus tôt avait confirmé avoir reçu l’ordre d’éteindre le son à 4 heures du matin. Une pratique inhabituelle à Nantes, où la fête pouvait auparavant se poursuivre jusque tard dans la nuit. “C’était le milieu de la soirée, je n’avais pas fait attention à l’heure”, s’est-il défendu.

Un portrait de Steve Maia Caniço a été peint sur un mur à Nantes, non loin de l’endroit où le jeune homme est tombé dans la Loire, où il s’est noyé.– L. Venance/AFP

Interrogé sur le positionnement des enceintes, orientées vers la Loire pour limiter les nuisances, le DJ a reconnu que lui et les organisateurs n’avaient “pas pensé” au danger potentiel du fleuve situé devant la scène. « Nous nous sommes installés où nous voulions. » C’est tout près de cet endroit que Steve Maia Caniço est tombé à l’eau. Sans jamais parvenir à s’en sortir.

Plus d’informations sur le cas Steve

Le procès du commissaire Grégoire Chassaing, récemment promu à la direction de la police de Lyon, se poursuit jusqu’à vendredi au tribunal correctionnel de Rennes, où il était désorienté.

 
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