les œillets fanés de la révolution, l’éditorial

Quelques révolutions du 20ème siècle^e siècle ont atteint leur objectif. Beaucoup ont donné naissance à des dictatures sanglantes. D’autres aspirations démocratiques ont été anéanties par des guerres civiles ou des contre-révolutions réinstallant un régime autocratique.

À cet égard, la révolution des œillets du 25 avril 1974 au Portugal constitue une exception. Soutenu par de jeunes capitaines d’armée, il met fin à quarante-huit ans de dictature et treize ans de guerres coloniales pour instaurer un véritable changement démocratique dans le pays.

Il est difficile de comprendre aujourd’hui ce qu’était la dictature de Salazar, maintenant la majeure partie de la société portugaise dans la pauvreté, sous la surveillance des agents du régime, des bufosfondu dans la population.

Traumatisme

On oublie qu’il y a 50 ans, toute opposition politique ou syndicale y était interdite. Nous minimisons également le traumatisme de ces dizaines de milliers de jeunes envoyés combattre en Guinée-Bissau, en Angola, au Mozambique et dans les îles. Pour le mesurer, Didier Péclard, professeur à l’Université de Genève, a une formule frappante : « La proportion de jeunes Portugais envoyés combattre dans les colonies entre 1961 et 1974 est à peu près la même que celle des jeunes Américains envoyés au Vietnam. »

Jusqu’à présent, on croyait que le Portugal ou l’Espagne étaient vaccinés contre l’extrême droite, parce que leurs populations avaient connu la dictature. Ce n’est plus vrai. Au Portugal, le parti Chega, qui a repris le slogan salazariste « Dieu, patrie et famille », en y ajoutant le travail, est désormais le 3^e force politique du pays. Et le parti vomit ces émigrés qui sont en partie l’héritage de l’aventure coloniale de la dictature. Les œillets fleurissent dans les esprits depuis un demi-siècle. On craint qu’ils ne dépérissent aujourd’hui.

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