Ingérence étrangère : Marie-Josée Hogue, gardienne de confiance

Justin Trudeau est catégorique. Malgré les efforts de certains États étrangers pour s’immiscer dans notre processus démocratique, les deux dernières élections se sont déroulées dans l’intégrité. « Elles ont été décidées par les Canadiens », a-t-il assuré lors de son témoignage devant la commission Hogue mercredi.

Il a mis en garde contre certaines fuites à l’origine de cette commission d’enquête et le caractère explosif des reportages médiatiques, découlant d’informations non fondées et non corroborées partagées par un lanceur d’alerte. Le Premier ministre s’est dit frustré de ne pas pouvoir contredire publiquement certaines allégations, car cela risquerait de compromettre le travail des agences de sécurité.

Si Justin Trudeau cherchait avant tout à rassurer, il devait aussi convaincre les Canadiens qu’il prenait la menace au sérieux et qu’il agissait en conséquence.

Le Premier ministre canadien Justin Trudeau a témoigné devant la commission sur l’ingérence étrangère le 10 avril 2024.

Photo : La Presse Canadienne / Sean Kilpatrick

Il est difficile de conclure à une réussite totale. Certaines parties de son témoignage laissent place à des faiblesses.

Justin Trudeau a par exemple expliqué sa préférence pour les briefings de sécurité oraux plutôt que les mémos écrits, moins adaptés à ses besoins. horaire chargé et qu’il n’aurait peut-être pas le temps de lire. Il a ainsi semblé contredire les déclarations de son chef de cabinet en commission parlementaire l’année dernière. Tout ce que le Premier ministre reçoit, il y consacre beaucoup de temps et il le lit très certainement» déclarait Katie Telford en avril 2023.

Lors de son témoignage, le Premier ministre n’a pas semblé convaincre le commissaire Hogue de la robustesse des suivis effectués après l’investiture de son candidat Don Valley-Nord, Han Dong, en 2019, marquée par des soupçons d’irrégularités.

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Le député Han Dong a quitté le caucus libéral après des informations faisant état d’allégations contre lui liées à l’ingérence chinoise.

Photo : La Presse Canadienne / Adrian Wyld

Après les élections, Justin Trudeau dit s’être concentré sur une éventuelle implication des autorités chinoises ici au Canada qui se seraient activement intéressées à un candidat en particuliermais il n’a pas cherché à connaître la vérité sur ce qui s’est passé lors de la nomination, car il peut être très difficile d’obtenir.

Après cet épisode, le Parti libéral et son chef n’ont pas jugé bon de modifier certaines règles d’investiture pour se protéger plus solidement contre d’éventuelles tentatives d’ingérence et dissiper les doutes.

Tout cela peut laisser l’impression que certaines actions n’ont pas été prises par le Premier ministre et son entourage.

Le lien de confiance

Les témoignages de Justin Trudeau et de ses ministres ont exposé les limites de l’exercice. Lors de ces audiences, les Canadiens n’ont pas pu tout voir derrière le rideau. Plusieurs documents ont été expurgés ou ont dû rester secrets pour des raisons de sécurité nationale.

Le Premier ministre avait également prévenu que très peu de choses pourraient être rendues publiques lors de la commission. Les Canadiens qui ont écouté les élus libéraux prendre la parole ont été contraints, à bien des égards, de les croire sur parole quant à l’intégrité des deux dernières élections. Dans ce contexte, il est difficile pour Justin Trudeau et son équipe de restaurer la confiance de la population dans le processus électoral.

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L’entrée aux audiences publiques sur l’ingérence étrangère dans les élections fédérales, à Ottawa.

Photo : La Presse Canadienne / Adrian Wyld

Désormais, cette tâche ne peut incomber qu’à une seule personne : Marie-Josée Hogue. C’est elle qui a eu droit au portrait d’ensemble, en public et à huis clos. C’est la commissaire qui doit dire la vérité aux Canadiens dans ses prochains rapports. Marie-Josée Hogue est la gardienne de la confiance.

Les audiences publiques ont permis de s’interroger sur certaines vulnérabilités face aux ingérences étrangères. Faut-il revoir les processus de nomination des partis politiques ? Le seuil d’intervention des autorités responsables en période électorale est-il trop élevé lorsqu’il s’agit d’avertir les citoyens d’éventuelles irrégularités ? L’information circule-t-elle correctement ?

C’est à Marie-Josée Hogue de mettre le doigt sur les problèmes et de proposer des solutions.

Et il appartiendra au gouvernement Trudeau de les appliquer en temps voulu, c’est-à-dire avant les prochaines élections fédérales.

 
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