A Oran, où est né Étienne Daho et où il a vécu les premières années de sa vie. Il était insouciant, curieux de tout, aux côtés de ses grands-parents immigrés espagnols dans l’épicerie qu’ils tenaient dans le petit village de Falcon. Sa tante l’emmène ensuite à Reims pendant la guerre d’Algérie avant de débarquer à Rennes. C’est dans cette ville qu’il fut élevé par sa mère et ses deux sœurs et qu’il découvrit pour la première fois la pop anglaise du Velvet Underground et du groupe Marquis de Sade et Skinny Toys. Pour marquer ces quatre décennies de carrière, il revient sur ces grandes scènes avec son Étienne Daho Show. Quelque 26 pièces viennent de sortir avec Éle vôtre en directenregistré le 22 décembre 2023 à l’Accor Arena de Paris.
franceinfo : Le petit garçon que tu étais, qui était tombé amoureux de ce juke-box, qui prenait plaisir à l’écouter. Que penses-tu de cet artiste que tu es devenu ?
Étienne Daho: Déjà, j’ai l’impression d’être la même personne depuis que je suis petite. Je n’ai pas beaucoup changé, j’ai toujours eu les mêmes envies. En fait, c’était tout de suite de la musique. C’est peut-être parce que mes parents étaient des mélomanes et qu’il y avait beaucoup de musique à la maison et que j’étais exposé à beaucoup de musique. Mais oui, c’est dans mes cellules, c’est une vraie vocation.
Ce sont 26 titres à l’intérieur de ce live que l’on redécouvre. Vous avez suggéré d’autres choses. Vous avez plus de confiance dans votre voix et surtout vous l’appréciez davantage.
Oui, je l’apprécie davantage, je pense que ça doit avoir un lien. Je ne viens pas du tout du milieu musical.
“Je n’avais jamais ouvert la bouche avant mes premiers modèles.”
Etienne Dahosur franceinfo
C’était une succession de coïncidences heureuses, mais une coïncidence quand même. Et c’est un métier qui s’apprend. J’ai pris le - et c’est vrai que je me sens aussi beaucoup plus heureux dans mon travail, car j’ai l’impression de contrôler un peu les choses, mais pas de manière technique. En tant qu’amateur, j’aime l’idée d’être amateur. Il y a le verbe aimer dedans. J’ai moins peur aussi. La peur s’estompe, disparaît. En fait, la voix est quelque chose de très spécial. Les émotions sont dans la voix, on entend tout et plus on chante calmement, meilleure est la performance.
De quoi avais-tu peur ?
De ne pas être assez bon. Nous avons toujours une image, une idée de nous-mêmes qui est meilleure que ce que nous sommes probablement. J’ai toujours eu l’impression que je n’étais pas assez bien pour moi-même. Je ne parle pas des autres et de soi-même.
“Je voulais être meilleur à chaque fois et je ne pensais pas être assez bon à chaque fois.”
Etienne Dahosur franceinfo
Dans cet album, on entend aussi certaines personnes disparues. Jane Birkin, Françoise Hardy et même Dani. Ils ont façonné l’homme que vous êtes devenu et l’artiste que vous êtes devenu. La musique, d’ailleurs, sert-elle aussi à cela, à garantir qu’ils soient toujours là ?
Oui bien sûr. Finalement, déjà le fait d’être artiste et d’avoir existé en image et en son fait qu’il y a une sorte d’éternité. Par exemple, pour parler de Dani, j’ai produit un morceau dans son album posthume et j’ai donc travaillé avec sa voix et c’était très fort et très émouvant d’avoir le souffle de l’entendre respirer. Cela semble idiot de dire cela, mais travailler avec sa respiration a été très émouvant.
Sur scène, ce tête-à-tête montre aussi à quel point le public vous porte un amour extraordinaire depuis vos débuts. Vous qui êtes plutôt modeste et réservé, comment gérez-vous cela ?
C’est réciproque. La scène fait qu’on est bien plus à l’aise sur scène que dans la vie. Sur scène, il y a en fait une sorte de lâcher prise, car c’est un moment où il n’y a ni passé ni futur. C’est vraiment le moment présent. On est vraiment dans l’instant présent, dans le chant et ça enlève toute pudeur. Par exemple, il y a une chanson qui est particulière, c’est Ouverture avec lequel j’ai terminé car ça pourrait être une réouverture ! C’est une chanson qui a été écrite pour une personne dont j’étais très amoureux et qui est finalement devenue une chanson collective, et c’est ce qui est merveilleux. En fait, on quitte complètement le cadre intime à deux pour quelque chose de plus grand que soi et de plus beau.
Fier de ses 40 années passées à nos côtés ?
Personnellement, je suis particulièrement fier que vous les ayez passés à mes côtés.